« Philentreupreneurs » : l’effet Bill Gates

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Par Sandrine L'Herminier Modifié le 19 novembre 2012 à 5h48

On ne peut pas parler aujourd’hui d’une philanthropie mais de philanthropies.

La philanthropie est multiple dans la manière de s’engager car elle couvre un large spectre allant du simple don à l’investissement solidaire. Cette diversité dans les pratiques et les manières de donner s’illustre à travers des parcours de donateurs très différents les uns des autres. Car chacun peut écrire sa propre biographie philanthropique. Jean-Baptiste Descroix Vernier est un entrepreneur comblé. Il préside aujourd’hui le groupe côté Rentabiliweb et possède un patrimoine plus que confortable…

Pourtant, cet homme n’est pas foncièrement attaché aux valeurs matérielles. Ou plutôt, la richesse pour lui ne se limite pas aux biens matériels, il préfère lui associer d’autres formes de richesses : la richesse spirituelle, la richesse humaine, la richesse du cœur. S’enrichir, certes mais à condition d’enrichir les autres. Cet homme d’affaires a donc légué l’intégralité de sa fortune de son vivant à sa fondation privée : ses terres, ses forêts, ses comptes bancaires.

"Aujourd’hui je ne suis que l’usufruitier de mon patrimoine" relate ce philanthrope dont le plus grand luxe est de s’envoler au Burkina Faso pour regarder les petits africains gambader à proximité des puits d’eau potable qu’il a financé. Ce "philenthrepreneur" comme le nomment certains experts n’est pas un cas isolé. De plus en plus d’hommes et de femmes, influencés par "l’effet Bill Gates", souhaitent affecter une grosse partie si ce n’est l’intégralité de leur fortune, de leur vivant au profit des plus démunis.

Jacqueline Délia Bremond, épouse du fondateur de Pierre & Vacances, et vice-présidente de la Fondation familiale Ensemble, s’applique de son côté à faire rimer générosité avec rigueur. Partant du constat qu’il faut être efficace y compris dans la philanthropie car le bénéficiaire le mérite, sa fondation mise sur le professionnalisme, empruntant volontiers règles et méthodes à la sphère privée. La structure souhaite d’ailleurs capitaliser sur cette expérience en "traçabilité du don" en invitant de grands donateurs à soutenir les programmes qu’elle finance.

Des initiatives parmi d’autres qui témoignent d’une philanthropie plus stratégique et décomplexée, plus ouverte sur l’extérieur. Portée par un individu qui désire améliorer l’environnement dans lequel il vit, la philanthropie n’est plus le privilège des ultra-riches. Aujourd’hui pour quelques milliers d’euros et une simple déclaration à la préfecture, tout citoyen peut créer son fonds de dotation au profit de la cause qu’il souhaite défendre.

Le couple Jacqueline et Bernard Blanchy n’est pas millionnaire, loin de là. Les ressources que ces retraités allouent à leur fondation abritée sont modestes mais utiles à l’instar de ce projet qu’ils affectionnent particulièrement : un "dictionnaire dans chaque cellule". Il s’agit moins dans cette opération d’un don d’argent, que d’un don matériel : un dictionnaire, qui permet aux détenus de correspondre avec leur famille, leurs avocats, le juge, car "tout passe par l’écrit dans les prisons" rappellent les intéressés.

Au-delà de ces rencontres, de ces choix de vie, comment expliquer la générosité des uns et l’absence de générosité des autres ? Plus de la moitié des Français ne donne pas. Le don demeure, au fond, un geste mystérieux. A la lumière des réflexions de sociologues tels qu’Alain Caillé, il prend toute sa complexité.

L’aide apportée à son semblable vaut dans le geste plus que les bénéfices attendus, relate en substance cet expert. Il faut en tout cas voir dans cet acte désintéressé la volonté et la possibilité pour la société civile de participer plus activement à la résolution des problèmes sociaux.

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Sandrine L’Herminier est experte RSE et journaliste. Elle réalise des missions de conseil éditorial sur la démarche RSE des entreprises. Elle compte plus de 20 ans d’expérience dans le domaine de la presse écrite (Le Monde Argent, Les Echos, La Tribune). Auteur de : « Tu seras un manager responsable, mon fils ! » Editions Yves Michel. Collection Place publique. Février 2015.

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