Pourquoi le dollar n’a pas encore été remplacé

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Par Matt Insley Publié le 25 juillet 2014 à 2h26

Les décisions que nous prenons aujourd'hui dépendent de circonstances passées, que ce soit pertinent ou pas. Le clavier AZERTY, les voitures à essence, le courant alternatif, les DVD – voilà des exemples de choses que nous utilisons du fait d'une trajectoire passée. Un autre exemple est la réserve de monnaie mondiale, le dollar américain.

Depuis des décennies, le dollar détient le titre de monnaie « de référence ». Il existe plus de dollars dans les banques nationales étrangères que toute autre devise – environ 60 % des devises détenues dans le monde. Voici graphiquement ce que cela donne...

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En tout, il y a des millions de dollars dispersés à travers le monde. Dans les coffres des banques tout comme dans les taxis clandestins.

Le dollar est LA monnaie d'échange. Quels que soient les défauts du dollar – il est contrôlé par l'Etat, sur le point de se dévaluer et très souvent utilisé comme arme politique – le monde est dépendant de la trajectoire du dollar. C'est là un fait simple.

Pourquoi le dollar n'a-t-il pas encore été jeté à la poubelle

En parlant d'armes politiques, de nombreux pays à travers le monde sont mécontents du rôle que joue le billet vert sur la scène mondiale. Il s'agit toujours des mêmes : Iran, Corée du Nord, Russie... Tous ont été la cible de sanctions américaines.

Les sanctions peuvent faire mal. Mais la principale idée à retenir est que ces pays sont encore à la merci du dollar. C'est-à-dire qu'ils choisissent encore de jouer selon les règles du système monétaire mondial.

Voici un exemple. Au début de ce mois, je me trouvais à Londres avec mon collègue Byron King. Nous enquêtions sur les marchés pétroliers mondiaux et avons eu la chance d'interviewer un magnat du pétrole russe. Lorsque nous lui demandâmes si la Russie allait vendre du pétrole non libellé en dollars, Andrey Bogatenkov, président de Rosneft, une compagnie pétrolière à moitié détenue par l'Etat russe, nous répondit : « C'est une possibilité. » Toutefois, le dollar est « plus pratique, plus traditionnel », ajouta-t-il. Après tout, quel serait pour la Russie le bénéfice d'une monnaie non adossée au dollar ?

Pour répondre à cette question, il faut prendre un peu de recul. Parce que pour NE PAS traiter en dollars américains, il faut traiter avec une autre devise.

Quelle alternative au dollar ?

Certes, dans un accord récent avec la Chine, les Russes auraient pu proposer un système de troc. Mais le troc devient compliqué à moins que les deux parties ne veuillent ce que l'autre partie possède. Il est beaucoup plus facile d'avoir une monnaie d'échange. L'accord aurait pu être fait dans un panier de devises ou en roubles/yuans. Mais cela signifie que la Russie aurait dû faire confiance à la valeur du yuan chinois, ou à tout autre panier de devises. Ce qui nous ramène à la case départ. Finalement, n'est-il pas plus simple de traiter en dollars ?

Enfin, l'accord aurait pu être libellé en métaux précieux. Traiter avec de l'or serait facile si le métal avait une valeur constante. Mais les quatre dernières décennies ont montré que le prix de l'or peut fortement varier. En d'autres termes, qu'arrive-t-il si on signe un traité sur le long terme avec la Chine en or aujourd'hui et que dans cinq ans le métal jaune a à nouveau dégringolé à 300 dollars l'once ? Rien que cela pourrait mettre à mal l'accord.

Si l'on additionne tous ces éléments, ne pas traiter en dollars entraîne beaucoup de risques. Des risques qu'aucun pays ne prendrait aujourd'hui. Autrement dit, il n'existe tout simplement pas de bonne alternative dans le jeu monétaire mondial actuel.

Détrôner le billet vert ne sera pas rapide. C'est comme penser que les moteurs à essence disparaîtront du jour au lendemain. Il y a simplement une trop forte dynamique, trop d'efforts et de richesses qui favorisent le dollar. Mais ne vous méprenez pas. Même si le dollar américain semble être encore pour un bon bout de temps la devise « universelle », tout le monde s'accorde à dire que le billet vert est un investissement perdant sur le long terme. En voici deux preuves.

Le dollar est destiné à déchoir

Selon les propres calculs du Bureau of Labor Statistics, le dollar a perdu plus de 80 % de son pouvoir d'achat depuis 1973. Autrement dit, il faut 5 dollars aujourd'hui pour acheter quelque chose qui valait 1 dollar en 1973. Si vous aviez dormi au cours des 41 dernières années, votre compte en banque vous permettrait d'acheter 80 % de produits en moins.

J'utilise 1973 comme jalon parce que cette année-là a été créé le Dollar Index. Aujourd'hui, cet indice se situe aux environs de 80 points. Il a débuté en 1973 à 100 points de base. Il mesure la valeur du dollar américain par rapport à un panier de devises majeures (euro, yen, livre, dollar canadien, couronne et franc). Un Dollar index à 80 signifie que, depuis 1973, le dollar a perdu 20 % de sa valeur par rapport à ce panier de devises. Oups. Par conséquent, non seulement le dollar a perdu en valeur en terme d'inflation de base mais également par rapport aux autres devises.

Pour résumer, votre philosophie d'investissement devrait être claire. Le bon sens commande de diversifier une partie de ses placements à distance du dollar. Et le meilleur moyen de faire cela est d'investir dans ce qui a une valeur réelle. Plus d'analyse de ce genre ? C'est ici et c'est gratuit.

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Matt Insley est le spécialiste des matières premières et énergie pour Agora Financial. Il est diplômé de l'université du Maryland en business et économie environnementale. Il a travaillé au Département américain de l'agriculture et des ressources naturelles.

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