Le prélèvement à la source : l’impôt sera-t-il vraiment contemporain ?

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Par Caroline de Francqueville Publié le 22 août 2018 à 5h00
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1914L'impôt sur le revenu est instauré en France en 1914.

Le prélèvement à la source ne modifie pas le calcul de l'impôt sur le revenu mais son mode de recouvrement et s'inscrit dans une démarche de simplification. Censé devenir contemporain du revenu, c’est-à-dire payé au moment où le revenu est perçu, l’impôt s’adaptera-t-il totalement à la réalité financière du contribuable ?

Calcul du taux : des revenus de référence de l’année N-2

Comment est déterminé le montant du prélèvement à la source (PAS)? Par l’application au revenu d’un taux calculé par l’administration selon les données disponibles soit vos revenus de l'année N-2. Ainsi, si perception des revenus et paiement de l'impôt vont devenir contemporains, l’application d’un taux calculé sur la base des revenus de l’année N-2 constitue une première limite du dispositif.

En pratique, le taux applicable sera chaque année, de janvier à août, calculé sur la base de l’impôt sur les revenus N-2, et de septembre à décembre calculé sur celle des revenus N-1 au vu des éléments de la déclaration de revenus. Ainsi en 2019, de janvier à août, le taux de prélèvement d’un salarié sera calculé sur ses revenus 2017, puis réactualisé à compter de septembre suite à la déclaration -au printemps 2019- des revenus 2018.

Le montant du prélèvement peut être modulé sur demande du contribuable, sous sa propre responsabilité. Attention, une modulation à la baisse excessive ou erronée est passible de pénalités. Pour les revenus -notamment fonciers- faisant l’objet d’un acompte, c’est le même principe. De janvier à août les revenus taxés au titre de l’année N-2 constituent la référence, et ceux taxés en N-1 pour septembre à décembre.

Un taux qui ne tient pas compte des crédits et réductions d'impôts

Dans le calcul du taux de prélèvement, l’administration ne prend pas en compte les éventuels réductions et crédits d’impôt du contribuable. Pour leurs bénéficiaires, le taux sera donc supérieur au taux « réel » d'imposition. L’avance de trésorerie faite au Trésor public en 2019 par rapport à sa situation d’avant mise en œuvre du PAS, sera sans doute le sujet qui soulèvera le plus d’incompréhension. D’autant que la demande de modulation n’est pas prévue pour le cas des réductions et crédits d’impôts. Et ces avantages ne seront pris en compte que dans un deuxième temps, fin août-début septembre 2020 pour donner droit à restitution du Trésor au titre du trop-perçu éventuel.

Toutefois, à titre dérogatoire pour les seuls crédits d’impôt afférents aux frais de service à domicile et à la garde d’enfant (et désormais les dépenses d’hébergement en Ehpad), les bénéficiaires recevraient un acompte de 30% mi-janvier pour un paiement du solde fin aout-début septembre. Les contribuables feront un autre effort de trésorerie : l’assiette de la retenue à la source ne tient en effet pas compte de la déduction des frais professionnels pour les salariés de 10% forfaitaire ou pour leur montant réel, ni de la déduction de 10% pour les pensions de retraites. Conséquence : la régularisation interviendra après la déclaration de revenus.

Un système fiscal actuel qui complique l’application du dispositif

Mieux se préparer au prélèvement à la source, c’est surtout comprendre le taux auquel vous serez prélevé (voir l'infographie BforBank sur le sujet). Cette étape se heurte rapidement à la complexité du choix offert au contribuable dans le cas où le taux commun du foyer fiscal ne lui convient pas. Il peut opter pour le taux individualisé s’il est marié ou pacsé ou le taux neutre s’il refuse que son taux réel ne soit communiqué à l’employeur. Le taux neutre rime avec confidentialité car il ne reflète que le niveau des seuls revenus que l’employeur lui verse. Son inconvénient principal : il a comme base le barème de revenus d’un célibataire sans enfants et peut se révéler souvent supérieur au taux effectif.

Quant à l’option du taux individualisé, elle permet de limiter l’impact de certaines spécificités du régime fiscal français comme le quotient conjugal. Présent dans de nombreux pays, le prélèvement à la source y rime en général avec l’individualisation de l’impôt ce qui est inconnu chez nous. Le taux individualisé tient compte des différences de revenus entre conjoints soumis à imposition commune, évitant que celui qui gagne moins ne soit soumis à un prélèvement trop élevé. Il est à noter que les revenus fonciers restent forcément soumis au taux commun.

Prélèvement à la source ne rime pas avec absence de déclaration

Ceux qui espéraient que le PAS n’allège leur tâche administrative de déclaration de revenus, seront déçus. Chaque année au printemps, le contribuable restera soumis aux mêmes obligations qu’actuellement. Les éléments de sa déclaration permettront d’opérer toutes les diverses régularisations et notamment la prise en compte des réductions et crédits d’impôt.

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Caroline de Francqueville est expert patrimonial chez BforBank.

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