Réforme des retraites : la grenouille veut se faire aussi grosse que le boeuf !

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Par Jacques Bichot Modifié le 24 mars 2023 à 13h32
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55,7%Parmi les retraités en France, 55,7% sont des femmes.

On parle ce mardi 8 juin 2021 de « retour inattendu de la réforme des retraites ». C’est une formulation inadéquate, car nos dirigeants ne s’apprêtent pas à réformer le système ; ils veulent simplement réaliser un ajustement paramétrique, un petit réglage des variables de commande. Or un tel réglage devrait être effectué par des responsables techniques, non par des instances politiques.

Nos dirigeants présentent comme « une réforme » de légers changements apportés à la valeur de quelques paramètres utilisés pour calculer les droits à pension. Pourquoi, si ce n’est pour donner l’impression qu’il s’agit de quelque chose d’important ? La grenouille veut parfois paraître aussi grosse que le boeuf !

La France, et bien d’autres pays, ont besoin d’une véritable réforme de leurs systèmes de retraite. Nous l’avons dit maintes et maintes fois, à la suite d’Alfred Sauvy : ce ne sont pas les cotisations versées au profit des retraités qui risquent de préparer réellement les futures pensions des cotisants. Pourquoi obtiendrions-nous des droits à pension quand nous cotisons pour que nos aînés, retraités, puissent vivre décemment ? Ce faisant, nous leur renvoyons simplement l’ascenseur : ils ont d’abord beaucoup fait pour nous, en nous procurant ce qui est nécessaire pour passer de l’état de fœtus à celui de travailleur, si bien que nous leur sommes donc redevables. Nos cotisations vieillesse ont ainsi la nature d’un remboursement, pas d’un investissement !

Il n’y a donc aucune raison pour que les cotisations versées aux caisses de retraite procurent des droits à pension. En revanche, il serait juste, et logique d’un point de vue économique, d’acquérir des droits à pension chaque fois que nous contribuons à la venue au monde, à l’entretien et à l’éducation des nouveaux êtres humains. Allons-nous continuer à ne pas recevoir des droits à pension en échange des impôts et cotisations que nous payons pour la formation des enfants et des jeunes ? C’est un scandale ! C’est de cela qu’un législateur digne de ce nom devrait s’occuper.

Quand il est besoin de réformes de cette importance, vraiment structurelles, bien sûr qu’il faut légiférer : supprimer des dispositions totalement absurdes, et les remplacer par des lois conformes au bon sens et à l’équité. Nous n’avons pas besoin d’un législateur ressemblant à la grenouille de la fable, mais d’un législateur qui remette sur la bonne route le char des retraites, qui donne un cadre légal juste et efficace à l’échange entre générations successives.

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Jacques Bichot est économiste, mathématicien de formation, professeur émérite à l'université Lyon 3. Il a surtout travaillé à renouveler la théorie monétaire et l'économie de la sécurité sociale, conçue comme un producteur de services. Il est l'auteur de "La mort de l'Etat providence ; vive les assurances sociales" avec Arnaud Robinet, de "Le Labyrinthe ; compliquer pour régner" aux Belles Lettres, de "La retraite en liberté" au Cherche Midi et de "Cure de jouvence pour la Sécu" aux éditions L'Harmattan.

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