Réindustrialisation : pourquoi les seniors sont indispensables

La pandémie de Covid-19, marquée par des ruptures d’approvisionnements, suivie par la guerre en Ukraine et les tensions sur le marché de l’énergie ont mis en lumière la dépendance de la France vis-à-vis de l’étranger. La nécessité de réindustrialiser et de reconquérir notre souveraineté fait désormais consensus. Elle risque pourtant de se heurter au manque de compétences.

Photo Caroline Young Presidente Experconnect
Par Caroline Young Publié le 28 septembre 2023 à 5h00
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12,4%L'industrie représente 12,4% du PIB en France

En effet, le déploiement d’une politique de relocalisation implique de mobiliser des profils qualifiés et expérimentés. Or, avec un taux d’emploi de 36,2% chez les 60-64 ans, la France ne capitalise pas sur les profils seniors dont l’expertise est pourtant nécessaire au rétablissement du tissu industriel.

Le secteur industriel est en proie aux difficultés de recrutement :

Jamais notre industrie n’avait été confrontée à une telle pénurie de compétences. La Dares estime qu’entre 2017 et 2022 le nombre d’emplois industriels vacants a été multiplié par trois pour atteindre 60 000. En 2022, 67% des chefs d’entreprise de l’industrie manufacturière déclarent ainsi éprouver des difficultés de recrutement.

Or, selon la Fabrique de l’Industrie, la réindustrialisation va nécessiter en moyenne 110 000 nouveaux profils par an formés aux métiers industriels jusqu’en 2035. Le risque est ainsi manifeste pour l’avenir des grands programmes industriels.

Le nucléaire, la construction navale et ferroviaire ou encore la métallurgie sont autant de secteurs clés pour la réindustrialisation du pays menacés par la perte de compétences. Les noms de certains métiers en tension, tels que les chaudronniers ou les soudeurs, évoquent d’ailleurs l’ancienneté. A la perte de compétence se couple également le manque de professionnels expérimentés et susceptibles de contribuer à la formation des générations plus juniors.

Mais en dépit des enjeux nettement identifiés, l'industrie peine à pourvoir ses postes vacants. Le contexte actuel montre donc bien la nécessité de faire appel à toutes les compétences. Raison de plus pour ne pas se priver de celles des seniors.

Les seniors ont l’expérience et les compétences nécessaires à la réindustrialisation :

S’il est nécessaire de former plus de jeunes aux métiers de l’industrie, la formation est un processus long. Par ailleurs, les jeunes profils ne possèdent pas l’expérience accumulée au cours d’une vie de travail.

Les préretraités et retraités ont donc un triple avantage : ils ont les compétences, l'expérience et sont disponibles immédiatement. Ils détiennent ainsi un rôle essentiel pour transmettre et maintenir les savoir-faire industriels au sein des entreprises. Leur expertise technique, leur connaissance des difficultés inhérentes à l’industrie et leur prise de recul leur permettent de faire face à des situations complexes et de guider les équipes dans des environnements où la prise de décision rapide est nécessaire.

Les entreprises doivent innover pour mieux accompagner la fin de carrière :

Les entreprises doivent ainsi prendre conscience des avantages que revêtent l’accompagnement et la gestion de la fin de carrière des collaborateurs les plus expérimentés. Dans un monde en constante accélération, la pérennité des entreprises dépend de leur capacité à innover et à prendre certains risques. Elles doivent donc faire preuve de créativité, y compris sur le terrain de l'innovation sociale.

Bon nombre d’entreprises préfèrent encore se séparer des seniors plutôt que d’étudier des schémas alternatifs susceptibles de maintenir leur employabilité au profit de la performance globale. Si les a priori ont la vie dure, les dirigeants de start-up ont, quant à eux, une perception nouvelle de la séniorité. Mentors pour les jeunes collaborateurs, passeurs de bonnes pratiques ou encore guides pour éviter les écueils, les aînés sont ainsi de véritables leviers d’innovation et de création de richesse.

Ainsi, l’industrie française doit s'appuyer sur les seniors désireux de poursuivre une activité professionnelle. De leur maintien en emploi peut dépendre l’efficacité d’une réindustrialisation reposant sur leurs compétences.

Photo Caroline Young Presidente Experconnect

Caroline Young est co-présidente de la Commission Social et Emploi de CroissancePlus et Présidente d'Experconnect depuis 2005. Diplômée HEC de l'Université de Lausanne, elle a débuté sa carrière dans les fusions acquisitions chez Schroders puis au Crédit Agricole Indosuez. En 2002, elle devient Secrétaire Générale d'IP France, régie publicitaire du groupe RTL.

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