Dans la région Grand Est, une transformation s’opère depuis janvier 2025 : la gestion de 500 km de routes stratégiques change de main.
Réseau routier : 500km de routes reprises en main par le Grand Est

Mobilités : le Grand Est reprend la main sur 500 km de routes stratégiques
Le 13 janvier 2025, la région Grand Est entame un projet inédit : la reprise de gestion de 500 kilomètres de routes nationales, parmi lesquelles des axes majeurs comme l'A31 et la RN4. Cette expérimentation s’inscrit dans le cadre de la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et la simplification (3DS) adoptée en 2022. Quels sont les objectifs et les défis de cette démarche ?
Une prise en main historique pour un réseau stratégique
La reprise de gestion de ces axes routiers par la région Grand Est s'explique par des décennies de critiques envers l'État, accusé d'insuffisance dans les investissements et de laisser les infrastructures se dégrader progressivement.
Pour remédier à cette situation, la loi 3DS a ouvert la voie à une gestion locale, estimant que les collectivités territoriales, mieux au fait des réalités du terrain, seraient plus aptes à répondre aux besoins spécifiques de leurs réseaux.
Dans cette optique, la région prévoit un budget ambitieux de 92 millions d'euros dès 2025, soit un triplement des fonds consacrés à l’entretien. Ces ressources permettront de moderniser les chaussées et de renforcer la sécurité des équipements, des mesures importantes pour garantir une infrastructure routière adaptée aux enjeux actuels.
Enjeux économiques et défis pour la région
Les routes reprises par le Grand Est ont été sélectionnées en raison de leur rôle stratégique pour l’économie régionale et le transport transfrontalier. Ces axes, qui relient la région à des pays voisins comme le Luxembourg, l’Allemagne et la Belgique, sont essentiels à la circulation des travailleurs transfrontaliers et au transport logistique.
Parmi elles, l’A31, souvent engorgée, incarne un enjeu majeur puisque sa modernisation est attendue pour renforcer l’attractivité économique de la région. Toutefois, ces infrastructures sont soumises à une forte usure, en grande partie due à l’intensité du trafic poids lourds. Leur entretien et leur mise à niveau représentent un défi de taille pour garantir leur pérennité et leur efficacité.
Une expérimentation accompagnée d’une éco-redevance
Pour financer les investissements nécessaires à la modernisation et à l’entretien des 500 kilomètres de routes stratégiques, la région Grand Est prévoit de mettre en place une éco-redevance ciblant les poids lourds dès 2027.
Inspirée de dispositifs similaires déjà appliqués dans d'autres pays européens, cette redevance permet de répondre aux besoins de financement croissants liés aux infrastructures. Les fonds collectés seraient directement réinvestis dans l’amélioration des chaussées, la sécurisation des équipements et la réduction des impacts environnementaux du transport routier.
Cette mesure ambitionne de modifier les comportements des transporteurs en les incitant à adopter des itinéraires alternatifs ou des solutions de transport plus respectueuses de l’environnement, contribuant ainsi à réduire l’usure des routes et les nuisances écologiques.
Une décision qui ne fait pas l'unanimité
Cette initiative n’est pas sans susciter des débats. Certains acteurs économiques locaux redoutent que ce coût supplémentaire pour les transporteurs soit répercuté sur les consommateurs, avec une augmentation des prix des biens transportés.
D'autres craignent que cette taxe affaiblisse la compétitivité des entreprises de transport régionales face à leurs concurrents étrangers. Ces préoccupations soulèvent des interrogations sur l’équilibre à trouver entre le financement des infrastructures et le maintien d’un environnement économique favorable aux acteurs locaux. Bien qu’innovante, l’éco-redevance devra démontrer sa capacité à atteindre ses objectifs tout en apaisant les tensions qu’elle engendre.
Quelles perspectives pour l’avenir ?
L’expérimentation menée par le Grand Est, prévue pour une durée de cinq ans, pourrait marquer un tournant dans la gestion des infrastructures routières en France. Si cette initiative s’avère concluante, elle pourrait inciter d'autres régions à emboîter le pas, illustrant les avantages d’une décentralisation adaptée aux réalités locales.
Ce projet pilote ambitionne de prouver que confier la gestion des routes aux collectivités régionales, mieux à même de cerner les besoins spécifiques de leur territoire, est une approche efficace et innovante. Les attentes autour de cette expérimentation sont particulièrement élevées.
Les habitants, confrontés depuis des années à des routes dégradées et à des congestions chroniques, espèrent des améliorations tangibles, tant en termes de qualité des infrastructures que de fluidité du trafic. De leur côté, les entreprises locales misent sur une optimisation des flux logistiques et une réduction des coûts indirects liés aux retards ou aux dégradations routières. Les enjeux environnementaux ne sont pas en reste : une meilleure gestion pourrait réduire l’impact écologique des transports, en favorisant des solutions plus durables.