Routes françaises : 400 000 ralentisseurs jugés illégaux mais intouchables

Le Conseil d’État, plus haute instance administrative française, a rendu le 27 mars, son verdict tant attendu concernant les ralentisseurs. Malgré la reconnaissance officielle de l’illégalité de 400 000 dispositifs sur le territoire, ces installations routières controversées ne seront pas supprimées. Un choix qui suscite incompréhension, colère et inquiétude, tant pour les automobilistes que pour les collectivités.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 29 avril 2025 16h00
Routes françaises : 400 000 ralentisseurs jugés illégaux mais intouchables
Routes françaises : 400 000 ralentisseurs jugés illégaux mais intouchables - © Economie Matin

400 000 ralentisseurs ont été jugés non conformes par le Conseil d'État mais seront maintenus

C'est une décision qui a fait l'effet d'un coup de tonnerre dans le monde de l'automobile et de l'aménagement urbain, 400 000 ralentisseurs ont été jugés non conformes par le Conseil d'État. Un chiffre colossal, résultat du combat acharné mené par l'association Pour une Mobilité Sereine et Durable (PUMSD) et la Ligue de Défense des Conducteurs (LDC). Le Conseil d'État, tout en admettant leur illégalité, a opté pour une position modérée en refusant d'ordonner leur suppression.

La plus haute instance administrative a reconnu que la plupart de ces installations enfreignaient les normes en vigueur, tout en s'opposant à leur démolition. Un décret du 27 mai 1994 impose des règles très strictes :

  • interdiction d'implantation sur les routes à grande circulation,
  • obligation d'associer ralentisseurs et autres dispositifs pour réduire la vitesse,
  • contraintes drastiques sur les dimensions : une hauteur maximale de 10 centimètres et une longueur entre 4 et 10 mètres selon la typologie du ralentisseur.

Pourquoi les ralentisseurs illégaux ne disparaîtront pas ?

La logique voudrait qu'une installation illégale soit purement et simplement supprimée. Mais ici, le Conseil d'État a invoqué un principe bien connu des juristes : "il existe un principe de droit public selon lequel on ne détruit pas un ouvrage public, même mal implanté", a confié une source juridique au Figaro. Résultat : les ralentisseurs illégaux restent en place, et tant pis pour les normes de sécurité, tant pis pour les automobilistes qui endurent les secousses injustifiées.

Ce paradoxe n'est pas sans rappeler l'immobilisme administratif, où la reconnaissance d'une faute ne conduit pas nécessairement à sa réparation. La décision laisse également présager un nouveau front judiciaire : si la destruction massive est écartée, les futures implantations devront respecter scrupuleusement le décret de 1994, sous peine d'actions contentieuses ciblées. À l'avenir, les associations pourraient contester en justice les décisions des conseils municipaux ou les appels d'offres avant même la construction.

Quelles conséquences pour les collectivités locales ?

Pour les mairies, la partie est loin d’être gagnée. La jurisprudence ouvre la voie à une avalanche de recours, et la moindre entorse au règlement pourrait leur valoir des poursuites, notamment en cas d'accident lié à un ralentisseur non conforme. Antonin Morelle, président de la PUMSD, prévient dans Le Figaro : "les élus pourraient désormais se retrouver poursuivis en cas d’accidents liés à ces aménagements".

Une menace judiciaire qui plane lourdement sur les élus locaux, autrefois prompts à multiplier les dos-d'âne pour calmer les vitesses excessives sans véritable considération pour les prescriptions techniques. Ceux qui persistent à installer des ralentisseurs hors des clous pourraient ainsi non seulement voir leurs projets bloqués, mais aussi être personnellement mis en cause devant les tribunaux civils, voire pénaux. Un avertissement clair, l'ère de l'approximation est terminée.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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