Un tiers des salariés craignant l’IA cherchent déjà un nouvel emploi

Le rapport People at Work 2025 publié par ADP, le 9 septembre, souligne un phénomène inquiétant. Un salarié sur trois recherche activement un nouvel emploi par crainte d’être remplacé par l’IA. Cette étude, réalisée auprès de près de 38 000 travailleurs dans 34 pays, apporte un éclairage inédit sur l’état d’esprit des salariés face à la transformation technologique.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 15 septembre 2025 13h30
Un tiers des salariés craignant l’IA cherchent déjà un nouvel emploi
Un tiers des salariés craignant l’IA cherchent déjà un nouvel emploi - © Economie Matin
27 %Parmi les salariés qui voient dans l’IA une opportunité pour leur emploi, plus d’un sur quatre craint malgré tout d’être remplacé par cette technologie.

Un sentiment mondial partagé mais contrasté

À l’échelle internationale, 50 % des salariés estiment que l’IA aura un impact positif sur leur emploi dans les douze prochains mois, et 17 % se disent même « tout à fait d’accord » avec cette affirmation, selon le rapport People at Work 2025 d’ADP. Cependant, cette perception optimiste se heurte à une inquiétude persistante : 10 % des travailleurs expriment une crainte forte d’être remplacés par ces technologies. Plus largement, l’ADP Research Institute indique que 85 % des travailleurs mondiaux s’attendent à ce que l’IA affecte directement leur emploi dans les deux à trois prochaines années. Ce contraste révèle une fracture dans le rapport au travail.

Une partie des salariés considère l’IA comme un outil d’efficacité, tandis qu’une autre l’associe à une menace existentielle. « L’impact de l’IA n’est pas seulement technologique, il est aussi émotionnel pour de nombreux salariés », souligne Carlos Fontelas De Carvalho, président d’ADP France et Europe centrale. Le paradoxe est particulièrement visible dans les chiffres : 28 % des employés pensent que l’IA remplacera certaines de leurs fonctions et 13 % redoutent qu’elle supprime la majorité de leurs tâches actuelles. Ces projections divergentes montrent que l’emploi se redéfinit, sans certitude sur le rythme ni sur l’ampleur des mutations.

Le cas français : pessimisme modéré mais réel stress

En France, la perception de l’IA reste globalement prudente. Seuls 11 % des salariés déclarent être « tout à fait d’accord » avec l’idée que l’IA aura un impact positif sur leur emploi, un chiffre nettement inférieur à la moyenne mondiale. Parallèlement, 8 % expriment une inquiétude forte quant au risque de remplacement. Ces résultats traduisent une méfiance vis-à-vis de la technologie, mais aussi une difficulté à imaginer comment l’IA pourra concrètement améliorer le quotidien professionnel. Au-delà des perceptions, l’effet psychologique est tangible.

L’étude montre que les salariés qui redoutent le plus d’être remplacés sont deux fois plus susceptibles de subir un stress élevé au travail que ceux qui s’estiment moins exposés. Ce climat anxiogène influence aussi les comportements : parmi les Français convaincus que l’IA pourrait menacer leur poste, plus de 30 % sont déjà en recherche active d’un autre emploi, contre seulement 16 % chez ceux qui considèrent le risque comme faible. « Il faut bien sûr expliquer le sens de l’intégration de l’IA dans le cadre du travail, et respecter l’équilibre entre l’humain et la technologie », insiste Carlos Fontelas De Carvalho, dans des propos rapportés par le communiqué.

Facteurs aggravants : âge, secteur, confiance dans les compétences

Les écarts générationnels accentuent encore ce sentiment d’incertitude. En France, 12 % des 18-26 ans anticipent des effets positifs de l’IA sur leur emploi, mais 13 % redoutent déjà d’être remplacés. Chez les 27-39 ans, l’optimisme monte à 18 %, tandis que 11 % expriment une inquiétude réelle. Les jeunes salariés apparaissent donc comme les plus ambivalents : enthousiastes face aux opportunités, mais lucides sur le risque d’automatisation massive au cours de leur carrière. À cette fracture générationnelle s’ajoute une disparité sectorielle. Les professions intellectuelles et technologiques, où l’IA est perçue comme un outil de productivité, mêlent optimisme et peur d’obsolescence.

À l’inverse, dans les métiers à forte dimension humaine, comme la santé ou l’éducation, l’enthousiasme pour l’IA est plus faible, souvent au profit d’une prudence accrue. Le rapport ADP rappelle également que la confiance dans ses propres compétences est déterminante. À l’échelle mondiale, seuls 24 % des travailleurs se disent confiants dans leur capacité à acquérir les compétences nécessaires pour progresser dans leur emploi dans les trois prochaines années. Ce déficit de confiance renforce la perception d’un avenir professionnel incertain, nourrissant à la fois stress et mobilité contrainte.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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