L’entreprise Bonneval Emergence a assigné Nestlé Waters devant le tribunal des activités économiques de Nanterre. Cette procédure s’inscrit dans la continuité du scandale lié à l’utilisation de procédés de filtration contestés sur certaines eaux revendiquées comme eau minérale naturelle. Au-delà du contentieux, l’affaire soulève des enjeux lourds pour le marché, la confiance des consommateurs et la régulation du secteur.
Concurrence déloyale : Nestlé Waters face à une plainte à plus d’un milliard d’euros

« Concurrence déloyale » : Bonneval estime avoir perdu des parts de marché
Le scandale des eaux minérales connaît un nouveau rebondissement judiciaire. Selon les informations révélées par Les Échos le 17 décembre 2025, Bonneval Emergence, producteur de l’eau minérale naturelle Bonneval, reproche à Nestlé Waters d’avoir bénéficié d’un avantage économique indu. En effet, l’entreprise estime que la commercialisation d’eaux ayant subi des traitements non autorisés sous l’appellation réglementée d’eau minérale naturelle aurait faussé la concurrence, tout en pesant durablement sur les acteurs respectant strictement le cadre juridique.
Dans son assignation, Bonneval Emergence chiffre son préjudice à 1,3 milliard d’euros, un montant porté à 1,6 milliard d’euros intérêts compris. Ce calcul repose notamment sur des pertes de parts de marché cumulées sur plusieurs années, dans un secteur où la valeur ajoutée repose largement sur la promesse d’une eau naturellement pure, sans transformation chimique ni désinfection. La procédure vise plusieurs marques phares de Nestlé Waters, parmi lesquelles Perrier, Vittel, Contrex et Hépar. Bonneval demande également au juge d’ordonner l’arrêt de la commercialisation des produits litigieux sous leur dénomination actuelle, assorti d’une astreinte d’un million d’euros par jour de retard.
Les positions de Nestlé Waters risquent d'être fragilisées
Le cœur du litige repose sur l’utilisation passée de procédés de filtration, notamment par charbon actif et traitements UV, jugés incompatibles avec la définition réglementaire de l’eau minérale naturelle. Ces pratiques auraient été mises en œuvre pour garantir la sécurité sanitaire de certaines ressources, sans modification revendiquée de la composition minérale. Cependant, du point de vue du droit de la consommation, cette distinction est centrale. Il faut savoir que l’eau minérale naturelle bénéficie d’un régime d’exception précisément parce qu’elle est protégée de toute désinfection. Toute entorse, même motivée par des impératifs sanitaires, remet en cause l’équilibre économique du secteur, où la valeur perçue repose autant sur la naturalité que sur la marque.
Cette affaire pourrait fragiliser les positions de Nestlé Waters sur un marché français très concurrentiel, estimé à plusieurs milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel, tout en renforçant la visibilité de producteurs plus modestes comme Bonneval, qui misent sur une conformité stricte aux normes pour se différencier.
Nestlé Waters face au risque de rappel des produits
Au-delà des enjeux industriels, cette procédure judiciaire relance un débat sensible pour les consommateurs. Ce scandale des eaux minérales a déjà érodé la confiance dans l’étiquetage, en particulier pour des produits historiquement associés à la pureté et à la transparence. D’un point de vue juridique, le risque pour Nestlé Waters ne se limite pas à l’indemnisation réclamée. Une décision défavorable pourrait entraîner des rappels de produits, une révision massive des mentions commerciales et un durcissement du contrôle administratif sur l’ensemble du secteur.
Enfin, cette affaire pourrait servir de précédent. Une condamnation pour concurrence déloyale fondée sur l’usage de procédés de filtration ouvrirait la voie à d’autres actions similaires, tant en France qu’à l’échelle européenne, dans un contexte où la réglementation sur l’eau minérale naturelle est déjà sous forte pression.
