Dans un contexte où l’industrie veut gagner en agilité, la qualité reste l’arme décisive. Mais sans données de mesure fiables et partagées, les promesses de l’IA, des jumeaux numériques et de l’automatisation restent lettre morte.
Qualité industrielle : sommes-nous prêts à changer d’échelle ?

L’industrie mondiale traverse une zone de turbulences, avec des coûts élevés des lancements produits, des chaînes d’approvisionnement fragilisées et des exigences réglementaires accrues. Dans ce paysage, la qualité n’est pas un luxe mais un impératif stratégique. Or elle repose sur un socle trop souvent négligé : la capacité à mesurer avec précision et à exploiter ces données tout au long du cycle de production.
Selon l’étude Advanced Manufacturing 2025, 91 % des industriels rencontrent des freins à leur transformation digitale, dont 62 % liés à des problèmes de données. Plus grave, 71 % peinent à obtenir des mesures réelles et en temps réel pour alimenter leurs systèmes. Résultat : un tiers des fabricants (34 %) ne parviennent pas à identifier la cause racine des défauts qualité, se contentant de corrections ponctuelles qui grèvent les coûts et allongent les délais.
Sans mesure fiable, l’IA n’est qu’un algorithme aveugle, le jumeau numérique une simulation incomplète et l’automatisation une promesse sous-exploitée. Or ces technologies sont précisément celles que les industriels placent en tête de leurs investissements pour améliorer la qualité : 72 % prévoient d’accroître l’automatisation dans les 12 prochains mois, 65 % veulent recourir à l’IA pour prédire les problèmes, et 78 % estiment qu’une meilleure collaboration le long de la supply chain rejaillirait sur la performance des produits.
La clé est d’agir plus tôt, en « shift left ». Mesurer et contrôler dès les premières phases de conception permet de détecter les défauts avant qu’ils ne coûtent cher. Près de 39 % des dirigeants d’entreprises industrielles jugent que la simulation précoce est l’investissement le plus rentable pour la qualité, et 70 % placent la conception produit et process parmi leurs priorités pour gagner en efficacité. Le lien est clair : plus la mesure est intégrée tôt, plus la qualité finale est maîtrisée, plus les cycles sont courts et les coûts contenus.
Construire un « fil numérique » de la mesure - reliant conception, production et contrôle - transforme la donnée en langage commun entre métiers. Cette traçabilité continue alimente les décisions, réduit les reprises, sécurise la conformité et accélère la mise sur le marché. Dans un contexte de concurrence mondiale, cette capacité devient un avantage différenciateur.
La qualité industrielle de demain se joue aujourd’hui, dans la capacité à mesurer et partager l’information en temps réel. En faisant de la mesure un outil stratégique et non un simple contrôle final, l’industrie passera de la réaction à l’anticipation, et de l’anticipation à l’avantage compétitif.
