Covid-19 : année 2020, les gagnants et les perdants

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Par Daniel Moinier Publié le 5 janvier 2021 à 4h31
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16%Le secteur pétrolier et de l'énergie a vu son chiffre d'affaire baisser de près de 16%

Avec l’arrivée en France début 2020 de cette pandémie, nous avons vécu une année inattendue, atypique, éprouvante, accablante tant moralement, psychologiquement que physiquement pour certains.

C’est un bouleversement sanitaire, économique et financier jamais égalé même comparé à celui de 1929, voire 2008 dont l’origine était plus boursière et financière.

Cette période ressemblerait plus aux grandes périodes épidémiques plus lointaines, peste noire en 1347, la variole au XVème siècle…, le choléra 1877, la grippe espagnole de 1918, la grippe asiatique en 1956…, la grippe H1N1 de 2009…. Mais compte tenu de l’évolution et de la rapidité des systèmes de transmissions, de fabrication, transport, le secteur économique a été beaucoup plus rapidement impacté.

Dès le début du premier confinement, il a été possible de s’apercevoir que des secteurs en fonction de leur activité se sont trouvés rapidement en perte de vitesse alors que d’autres à l’inverse ont profité du boom des commandes liées aux besoins de nouveaux produits, matériels et à leur logistique.

Alors quels sont les perdants et les gagnants ?

LES GRANDS PERDANTS

Une très grande partie du secteur des transports et de la logistique (industrielle)

En premier, l’aéronautique, la défense et leurs sous-traitants.

Leur production a chuté de 21% à mi-année par rapport à son niveau de 2019. Ces industries ne devraient retrouver leur niveau d’avant crise d’ici 2023, voire 2024, selon certains experts.

En deuxième, l’automobile et ses sous-traitants.

Suite au premier confinement, les ventes de voitures neuves ont chuté de 70% et celles d’occasion de 90%. Après le rebond de l’été, le marché automobile s’est à nouveau effondré. Sur l’ensemble de l’année la vente de voitures neuves devrait reculer de 25 à 30%, niveau jamais atteint depuis 50 ans. Seules les commandes des voitures autorisées se maintiennent. Les concessions ont eu 60% de visites en moins, 30% de baisse pour l’entretien et 50% pour la carrosserie. Une seule branche sort la tête de l’eau : la voiture électrique et surtout l’hybride grâce au plan de soutien de l’état.

L’ensemble des entreprises sous-traitantes emploient 400.000 personnes en France. Elles fabriquent les principales pièces de voiture des différents constructeurs. Elles sont très durement touchées par les conséquences de cette crise sanitaire qui a mis le marché automobile presque à l’arrêt. Heureusement, il y a un mieux depuis l’automne.

Le secteur pétrolier et de l’énergie a vu son chiffre d’affaire baisser de près de 16% et a essuyé des pertes nettes en raison de l’effondrement des cours du brut. Le raffinage, le transport, les stations étaient en perte de vitesse.

La construction. Sur la période du premier confinement le secteur a enregistré une baisse de 57% en volume (10 200 appels d’offres contre 23 600 en 2019), et de 48% en valeur (4 579 M€ contre 8 771 M€ en 2019).

La fabrication d'autres produits industriels, c’est 59 % de baisse dont 25 % sont à l’arrêt. Ceux des procédés de machinerie et d’automatisation sont en baisse de 10%.

Le secteur du transport. Le plus touché, c’est le transport aérien avec une baisse de l’ordre de 46 à 60 % suivant les branches d’activités ; professionnelles, marchandises, tourisme, cette dernière est de loin la plus touchée, amplifiée par le rejet écologique. Les autobus, cars, trams, métro manquent de passagers. Seuls les transports de marchandises, de livraisons s’en sortent. Les commandes internet ayant boosté cette activité.

Liée aux transports la fabrication de matériels de transport est en baisse de 92 % avec 29 % des entreprises qui se sont trouvées à l’arrêt.

Les télécoms, contrairement à ce que l’on pourrait penser et même si le trafic en volume a augmenté, cela n’a pas entraîné de hausse du chiffre d’affaire en raison du resserrement des forfaits.

L’immobilier d’entreprise et les espaces de coworking souffrent de voir leurs bureaux déserts et ont commencé à faire un geste sur les loyers et plus.

Tous les fabricants et services liés au sport, à l’événementiel, souvent moins visibles car sans devanture, ont subi une perte énorme car les secteurs sont à l’arrêt notamment les sports en salle et l’événementiel : cabarets, casinos, feux d’artifices pour n’en citer que quelques-uns.

Les autres grands perdants

En premier, toute la branche du commerce, les bars, les restaurants et les commerces non essentiels déjà fermés à deux reprises et toujours en attente de l’amélioration de la pandémie et de l’autorisation d’activité. Ils sont dans une situation financière exécrable et pour un nombre non négligeable, poussés au dépôt de bilan. A un degré moindre l’hôtellerie qui reste ouverte mais en baisse et beaucoup plus pour ceux qui ne peuvent plus restaurer.

En deuxième, les « industries » culturelles et créatives

Trois secteurs distincts, le spectacle vivant : Théâtre, danse, musique, cirque, cabaret et le spectacle enregistré : cinéma (-70%), publicité…Et l’événementiel avec trois acteurs principaux, les agences créatrices, les annonceurs et les prestataires. A part la radio et la télévision qui ont été boostées par cette pandémie, les autres se trouvent dans des situations catastrophiques dans l’attente de réouverture.

Pour les autres activités de service liées au spectacle, c’est 68 % de baisse dont 41% à l’arrêt du fait notamment des arts, spectacles et activités récréatives pour ces dernières c’est du 90 %, dont 66 % à l’arrêt.

Le secteur du sport et activités de plein air. Tous les sports et activités ont été à l’arrêt lors du premier confinement, puis réouverts pour les activités pleine air. Puis en reprise pour les professionnels sans spectateur ou presque. La perte est très importante pour les sports médiatiques nationaux et internationaux, y compris pour les services annexes, droits télé, publicité, personnel…etc.

Le secteur des loisirs et culturel, bibliothèques, médiathèques, musées, salles de réunions, conférences, foires, salons, expositions, parcs d’attractions, bowlings…etc, sont toujours fermés.

La mode a toujours été un secteur solide mais avec l’épidémie, n’étant pas considérée comme de première nécessité et alors que de nombreux magasins étaient fermés, elle a subi une forte chute : -14,1 % pour le chiffre d’affaires, malgré la hausse des ventes en ligne (+25 %), et - 92 % pour le bénéfice net en moyenne pour ce secteur (LVMH, EssilorLuxottica, Adidas…).

Pour le secteur du commerce, c’est surtout l’habillement qui a souffert avec - 19% de baisse avec les librairies, coiffeurs, institut de beauté, etc…toujours fermés, alors que les opticiens, cavistes, cordonniers, chocolateries, drogueries, etc…ont pu réouvrir après le deuxième confinement. Même la presse papier avec pourtant des kiosques ouverts a vu leur fréquentation en baisse.

Le secteur du tourisme. C’est aussi un des secteurs les plus touchés avec la fermeture des campings, villages vacances et hébergements touristiques, agences…etc, sauf lorsqu’ils constituent pour ceux qui y vivent un domicile régulier ou pour l’accueil de personnes en isolement ou en quarantaine. Le tourisme international a été complétement à l’arrêt depuis le début du premier confinement et réouvert depuis peu. La perte est double surtout pour les commerces français liés à ce secteur d’activité.

Hors secteur d’activité, il est possible de noter les artisans et les chefs d’entreprise qui ont été parmi les plus touchés par les conséquences économiques du Covid-19. Selon le baromètre annuel Cofidis-CSA, 74% d’entre eux ont déjà vu leur situation financière personnelle se dégrader.

Les professions libérales et les indépendants ont perdu leur clientèle. Les indépendants à qui on a interdit de poursuivre leur activité, y compris les sous-traitants de ces secteurs.

L’intérimaire qui n’a plus de mission, le CDD qui a perdu son emploi et les étudiants qui ont perdu leur job.

Les salariés en chômage partiel avec une perte de salaire. Les jeunes qui n’arrivent pas à trouver un emploi. Le déséquilibre entre les non-diplômés et les diplômés s’accentue d’ailleurs au détriment des premiers lors des moments de crise.

Pour ce qui concerne les métiers qui sont les plus ou moins touchés par cette crise, vous trouverez ci-dessous un tableau détaillé

LES GRANDS GAGNANTS ou non impactés

Les deux premiers grands gagnants sont les secteurs du numérique et de l’e-commerce (hors voyages…)

Le très grand gagnant ; Amazon et les autre français, Cdiscount, Vente privée, Veepee, booking, Fnac…et les achats en ligne de première nécessité. La crainte de la contamination et divers aspects d’ordre pratique ont conduit de nombreux Français à se tourner vers l’achat de leurs courses en ligne et le retrait en drive ou la livraison.

Les multinationales de l’internet (le WebSoft) occupent la première place du podium parmi celles tirant leur épingle du jeu. Le chiffre d’affaires du secteur (dont Amazon représente plus d’un tiers) a bondi de 17,4 % et son bénéfice net de 14,9 %.

L’industrie pharmaceutique a augmenté son taux de production de 10% et de 13% en Europe. Les ventes de masques et de Gel hydroalcooliques, les produits et matériels hospitaliers liés aux soins anti-covid ont eu une augmentation exponentielle.

Le secteur de l’E-Santé avec ses technologies de communication et d’information dans le domaine de la santé et de la recherche, est en plein développement. Il est aussi tiré par la hausse des ventes d’antiviraux, de médicaments liés au système respiratoire compensant la perte du fait de la baisse des autres interventions chirurgicales et de consultations hors Covid.

Le nombre de consultations à distance a explosé et de nouveaux outils de téléconsultation sont en cours de développement pour les professionnels de la santé.

Tous les laboratoires de biologie médicale se sont trouvés rapidement débordés par les tests. Les implantation des centres improvisés ont trouvé des lieux propices et du personnel qualifié, quitte à faire revenir des retraités…

Les services liés à la personne notamment des personnes âgées, a bénéficié de la crise, ainsi que les outils de télécommunication en plein développement pour les liaisons personnes âgées-familles.

Le secteur du nettoyage connaît également un grand boom, les entreprises étant très sollicitées pour désinfecter les lieux publics comme les hôpitaux, les écoles ou les bureaux afin de limiter les risques de contamination.

Le télétravail s’est généralisé, c’est à dire le travail à la maison pour les activités qui le permettent. Il a entraîné des commandes d’équipements informatiques et télécommunication, ordinateurs, unités périphériques, logiciels, matériel de liaison pour Visio et téléconférence…Les activités à distance ont provoqué des ventes internet de logiciels de gym, lecture, jeux à domicile…

Le commerce a vu ses ventes augmenter fortement dans l’alimentaire, l’hygiène (papier toilette surtout) et les produits de santé à tel point que ses rayons se trouvaient couramment dévalisés. Par contre les autres étaient partiellement délaissés. Le chiffre d’affaire du secteur ayant augmenté de 9,1%. Le commerce en ligne a progressé fortement de 40% pour les produits alimentaires. Le tabac et les jeux de grattage ont nettement augmenté.

Autre gagnant, le secteur de l’électronique a progressé de 4,5% entraîné par l’augmentation de plus de 20% des ventes de semi-conducteurs et micro-processeurs et du secteur technologique.

Côté presse et revues, les abonnements ont bondi de 26,5 %.

Autre gagnant, le secteur de l’électronique (+4,5 %), entraîné par l’augmentation de plus de 20 % des ventes de semi-conducteurs et micro-processeurs.

Les paiements électroniques (Visa, Mastercard…) ont connu une croissance de 4,7 %, malgré la baisse des transferts d’argent et des voyages. Néanmoins, le bénéfice net du secteur a reculé de 17 %.

Technologie & impression 3D

Le secteur technologique (et l'impression 3D en particulier) se montre également sous son meilleur jour, certaines entreprises ont même apporté leur contribution en créant des buccaux en impression 3D.

La location de maisons de campagne a connu un petit boom avec le départ des parisiens à la campagne pour se préparer au confinement y compris pour les vacances de fin d’année.

Certains agriculteurs qui ont réussi à se convertir en commerçant sur place dans leur ferme et en montant un site pour attirer les clients.

Les salariés de la grande distribution qui ont touché une prime.

Et pour finir nous avons des grands gagnants dans le secteur des audiovisuel : les médias en ligne bien sûr, télévision et en particulier les chaînes d’information en continu pendant cette crise et aussi les plateformes de streaming comme Netflix, Amazon Prime et Canal + qui a fait une très belle opération promotionnelle en offrant ses chaînes jusqu’au 15 avril.

Il existe tellement de secteurs et de branches d’activité que certains pourront se sentir oublié. Vous avez toutes mes excuses.

Pour conclure,

La France qui avait déjà une dette colossale, va se retrouver à fin 2020 avec un supplément d’emprunt approchant les 300 milliards d’euros, certains experts annoncent qu’il faudra environ 25 années pour réduire ce seul supplément ! A la fin du deuxième trimestre 2020, le PIB avait chuté de 13,8% et les chiffres de l’emploi étaient très inquiétants : 4.149.300 personnes sans emploi et 1.665.700 exerçant une activité réduite. En mai le nombre de salariés en temps partiel se montait à 12,4 millions et 1.015.000 entreprises faisaient une demande de chômage partiel.

Pour atténuer les pertes, la plupart des entreprises françaises ont annulé ou réduit les dividendes, diminué leurs investissements et leurs dépenses en recherche et développement, ce qui ne sera pas propice à une relance rapide.

Et pendant ce temps-là, la Chine a déjà retrouvé un taux de croissance qui va nous faire pâlir !

Dans « les livres », dans une cinquantaine d’années, 2020 +, sera une période qui pourra peut-être se comparer à celle de 1929, sans les mêmes causes.

www.danielmoinier.com

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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