Dirigeant et caution de votre entreprise : ce qu’il faut savoir ?

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Par Clarisse Tomé Duarte Publié le 31 décembre 2020 à 7h00
Caution Entreprise Dirigeant
99%99% des entreprises en France sont des TPE.

La survenance de la seconde vague de la Covid-19, pérennise la crise dans la durée, entrainant entre autres conséquences, le durcissement des conditions d'octroi de financement aux entreprises.

Les créanciers des sociétés commerciales qui présentent peu de garanties (capital social faible ou actifs détériorés) vont multiplier le recours au cautionnement pour éviter les prêts non-performants.

En effet, le cautionnement est un contrat par lequel une personne appelée caution s'oblige envers le créancier à payer la dette de l'entreprise en cas de défaillance de celle-ci.

Cet engagement personnel accepté par nécessité peut être lourd de conséquences sur le patrimoine du dirigeant ou de l'associé majoritaire en ce qu'il le prive du bénéfice de la limitation de la responsabilité inhérente à la forme sociale.

L'urgence de la situation ne doit pas se traduire en vulnérabilité ! Il est indispensable de prendre la mesure de votre engagement, pour cela vous devez maîtriser les conséquences des modalités qui vous seront proposées.

Un dispositif légal qui se veut protecteur

La loi prévoit diverses dispositions qui ont pour objet de vérifier que la caution a suffisamment été informée.

Ainsi, l'omission d'une mention manuscrite rédigée par la caution personne physique envers un créancier professionnel, indiquant le montant de la somme garantie en chiffres, en lettres et la durée du cautionnement (articles L. 331-1 du Code de la consommation et 1376 du Code civil) a pour conséquence la nullité du cautionnement.

Une seconde mention manuscrite est prévue en cas de cautionnement solidaire (article L. 331-2 du Code de la consommation). La solidarité ayant pour effet de permettre au créancier de poursuivre indifféremment la caution ou l'entreprise dès lors que la dette est exigible .

Enfin, le créancier est également redevable d'une information en cas d'incident de paiement du débiteur principal ainsi que d'une information annuelle à peine de déchéance des intérêts et des pénalités de retard.

Néanmoins, ces clauses n'ont pas pour effet d'alerter le dirigeant sur la durée de son engagement.

Dans la pratique, les créanciers soumettront souvent la caution à l'acceptation d'un engagement dont la durée déterminée est calquée sur celui du prêt majoré de 24 mois. Dans cette hypothèse, la caution devra répondre des dettes pendant toute la durée de l'engagement.

Lorsque le cautionnement est à durée indéterminée, la caution bénéficie nécessairement d'une faculté de résiliation unilatérale (article L. 313-22 du Code monétaire et financier). Cependant, encore faut-il que le dirigeant caution exerce cette faculté lorsque ces fonctions cessent pour ne plus avoir à répondre des dettes sociales alors même qu'il ne possède plus aucune prérogative de direction sur la société.

Pour se prémunir contre les conséquences préjudiciables d'un tel oubli, il convient d'insérer à l'acte de cautionnement, une clause par laquelle l'exercice des fonctions est inscrit comme une condition déterminante de son engagement. Cette simple précision dispense le dirigeant de toute formalité de résiliation.

Préserver son patrimoine familial

La loi impose également que la somme garantie par la caution soit proportionnée à son patrimoine. Il est ainsi prévu qu'en cas de disproportion manifeste, le créancier ne puisse pas se prévaloir du contrat de cautionnement (article L. 332-1 du Code de consommation).

La proportionnalité du cautionnement est appréciée tant au moment de la conclusion du contrat que de sa mise en œuvre. Ainsi, dans le cas où le patrimoine de la caution était insuffisant pour répondre des dettes au moment de la signature, qu'il vient à s'accroître et que cela permet à la caution de répondre de la dette au moment où elle est appelée par le créancier, l'acte sera valable.

La disproportion manifeste est appréciée strictement par les juges qui considèrent qu'elle n'est caractérisée que lorsque la caution est privée du minimum vital nécessaire à ses besoins et à ceux dont elle a la charge (Com. 28 février 2018, n° 16-24.841).

En conséquence, il est préconisé de faire preuve de sincérité au moment de renseigner la déclaration de situation patrimoniale généralement proposée par les créanciers. Les déclarations de la caution ne font l'objet d'aucune vérification. Aussi, l'exagération de la valorisation de son patrimoine lui sera défavorable au moment où la caution sera appelée en garantie.

Par ailleurs, il convient de préciser que pour ce qui est des cautions personnes physiques mariées sous le régime de la communauté, le conjoint doit consentir expressément au cautionnement (article 1415 du Code civil). Néanmoins, dans les faits, cette simple autorisation aura pour conséquence d'engager les biens communs. Ainsi, les biens et revenus de la caution et ceux de la communauté , salaires du conjoint inclus seront compris dans l'assiette de recouvrement du créancier.

Bénéficier des remises de dettes

Le cautionnement revêt un caractère impérativement accessoire à l'engagement principal. Cette caractéristique a pour conséquence que le dirigeant ou l'associé caution ne peut jamais être engagé dans des conditions plus onéreuses que l'entreprise (article 2290 du Code civil).

Par conséquent, si le créancier vient à consentir une remise de dette à l'entreprise, la caution bénéficie également de cette diminution de son engagement.

Cependant, si la société débitrice est placée en redressement judiciaire, les remises imposées au créancier par le Tribunal de Commerce ne bénéficient pas à la caution (article L. 631-20 du Code de commerce).

Les recours de la caution après paiement

La caution est redevable du paiement dès exigibilité de la dette principale. Après avoir désintéressé le créancier, la caution a la possibilité de recouvrer la dette auprès de l'entreprise.

Néanmoins, la caution est susceptible de perdre son recours personnel contre l'entreprise si elle a omis de faire valoir les exceptions permettant de déclarer la dette éteinte avant de désintéresser le créancier, comme la compensation des dettes par exemple (article 2305 du Code civil).

Enfin, en cas de pluralité de cautions du même débiteur, la caution qui a payé l'intégralité de la dette a la possibilité de recourir contre les autres cautions.

Cependant, en application du principe de la division des poursuites, la caution qui a payé l'intégralité de la dette au créancier, devra quant à elle, poursuivre personnellement chacun des cofidéjusseurs à concurrence de leurs parts respectives (article 1317 du Code civil). Cette règle a pour effet de limiter considérablement ses chances de succès de recouvrer l'intégralité de la dette.

Vous l'aurez compris, le cautionnement n'est pas un long fleuve tranquille ! N'hésitez pas à solliciter l'expertise d'un conseil, qui saura vous alerter sur les points de vigilance à connaître et vous permettre ainsi de sauvegarder vos droits et votre patrimoine.

Par ailleurs, envisagez toujours l'opportunité de recourir à d'autres types de garanties, telles que les garanties bancaires, qui représentent un risque plus mesuré pour le dirigeant ou l'associé majoritaire.

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Experte en droit des affaires à SVP Information Décisionnelle. Titulaire d’un Master 2 en droit du commerce international, Avocat. Elle initie sa carrière en qualité de juriste dans le secteur de la distribution, puis des télécommunications. Intervient dorénavant à SVP en qualité d’expert en droit des sociétés, droit commercial, droit des contrats, concurrence, distribution, procédures, responsabilités, propriété intellectuelle et difficultés des entreprises.  

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