Les conséquences du Brexit sur les marchés de l’emploi britannique et européen

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Par Alexandre Modifié le 25 décembre 2018 à 12h14
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30 000 livresAprès le Brexit, pour travailler au Royaume-Uni il faudra avoir décroché un emploi avec un salaire minimum de 30 000 livres par an.

Le Royaume-Uni post-Brexit devrait continuer d'attirer les banquiers et les informaticiens étrangers, mais beaucoup moins les travailleurs du BTP ou de la santé. La place des professions qualifiées mais peu rémunérées (professeur de langue, traducteurs, commerciaux, stagiaires) est, elle, plus incertaine.

Les Britanniques cherchent à travailler hors de leur pays

5 000 emplois en moins. En octobre dernier, le secrétaire d'État britannique au Trésor, John Glen, chiffrait ainsi le nombre d'emplois financiers perdus par Londres. De son côté, Paris Europlace, l'association chargée de la promotion de la place financière parisienne, anticipait l'arrivée de 3 500 de ces emplois à Paris.

Faut-il voir dans ces deux chiffres la preuve d'un « Brexode » des traders de Londres vers Paris ? Faut-il également y voir un phénomène annonciateur d'une pénurie de main-d’œuvre en Grande Bretagne à l'approche du Brexit, prévu pour le 29 mars 2019 ?

Sans doute non à la première question. Sans doute oui à la seconde, mais avec des nuances. Faute d'un accord entre le Royaume-Uni et l'Union européenne, les plus grandes incertitudes planent sur la circulation des biens, des services et des personnes entre ces deux espaces. Les tensions politiques, les risques de hausse du coût de la vie et de ralentissement de l'économie inquiètent les salariés britanniques. Comme a pu le mesurer Indeed, les recherches d’emploi effectuées par ces derniers en dehors de leur pays n'ont cessé de progresser depuis 3 ans et demi (+25 %), avec deux pics aux moments du référendum de juin 2016 et des premières précisions du gouvernement sur le contrôle des frontières, quelques mois plus tard.

Les Européens désertent le Royaume-Uni

Dans le même temps -phénomène inverse- le nombre de recherches d'emplois d'Européens au Royaume-Uni diminuait, à nouveau selon les statistiques Indeed. D'ailleurs, le nombre d'emplois occupés outre-Manche par des Européens a diminué de 132 000 depuis le 3ème trimestre 2017, la baisse la plus importante depuis des années.

Des Britanniques qui recherchent un emploi hors de Grande-Bretagne, des Européens qui s'en détournent : la conjonction de ces deux phénomènes fait craindre une pénurie de main d'œuvre dans certains secteurs de l'économie.

Travailler au Royaume-Uni après le Brexit : seulement pour les plus qualifiés !

Selon des annonces récentes du gouvernement britannique, les règles d'immigration appliquées aux Européens pourraient être alignées sur celles des non-Européens : seuls les emplois qualifiés et rémunérés plus de 30 000 livres par an seraient alors accessibles. Dans cette hypothèse, les entreprises britanniques rencontreraient des difficultés à trouver des professionnels du BTP et du secteur de la santé, postes peu qualifiés souvent occupés par des ressortissants européens. Mais il faudrait également s'attendre à des pénuries d'enseignants en langue, de commerciaux à l'international, de traducteurs et de stagiaires, postes qualifiés mais rémunérés en-dessous du barème précité. Sur le site Indeed, les trois emplois les plus recherchés par les Européens sont professeur de langue (salaire moyen : 29 000 livres), commercial stagiaire (15 000 livres) et commercial bilingue (26 000 livres).

A contrario, les non-Européens recherchent des postes de chercheur associé (37 000 livres), de consultant SAP (54 000 livres) et de développeur iOS (50 000 livres). Les postes d'analyste financier (66 000 livres) arrivent en 6ème position. Dans les 10 postes les plus recherchés par les non-Européens, aucun ne rémunère moins que 30 000 livres. Ces demandeurs d'emploi savent que leur visa de travail est conditionné à un salaire minimum.

Résultats : il est très probable que la Royaume-Uni continue d'attirer et d'employer nombre de banquiers, d'informaticiens et de chercheurs. En revanche, l'avenir de secteurs comme le BTP et la santé semble compromis par le Brexit. Celui des traducteurs, des enseignants en langue, des commerciaux à l'international et des stagiaires -dont beaucoup sont français- est incertain et dépendra du degré d'ouverture du marché du travail britannique après le Brexit.

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Alexandre Judes est économiste au sein de l’institut de recherche Hiring lab, Indeed.

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