En 2014, la Cour des comptes règle encore ses « comptes » avec le Gouvernement : Objectif de déficit intenable ?

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Par Daniel Moinier Publié le 18 février 2014 à 5h30

Malgré un effort structurel important, le déficit effectif et le déficit structurel sont restés en 2013 à des niveaux nettement supérieurs à ceux inscrits dans la loi de programmation et la loi de finances initiale pour 2013.

La croissance des recettes a, en effet, été sensiblement plus faible que prévue tandis que celle des dépenses a été plus rapide. (Même si au toute dernière nouvelle, elle est annoncée à 0,3)

Si nous reprenons l’historique sur les années écoulées 2012-2013, les années se suivent et se ressemblent. Des prévisions toujours optimistes, tant sur la diminution des dépenses, que de l’augmentation de la croissance.

Les chiffres :

En 2012, déficit effectif prévu à 4,5, réalisé 4,8. Le déficit structurel prévu à 3,6, réalisé à 3,9.

En 2013, déficit effectif prévu à 3,0, réalisé 4,1. Le déficit structurel prévu à 3,9 réalisé à 2,6 (avec peut-être encore des surprises en Mars avec les véritables chiffres de l’Insee)

Analyse-Explication

Le déficit structurel s’est élevé à 2,6 % du PIB en 2013 (contre 1,5 % dans la zone euro et 2,1 % dans l’Union européenne) alors que la loi de programmation prévoyait 1,6 %.

La composante conjoncturelle du déficit est estimée à 1,4 % du PIB en 2013, portant le déficit effectif à 4,1 % du PIB compte-tenu des arrondis.

En 2012, la réduction du déficit public (de 4,8 à 4,1 % du PIB, soit 0,7 point) avait déjà été deux fois moins importante que prévu dans la loi de programmation (de 4,5 à 3,0 % du PIB, soit 1,5 point).

En 2013, le déficit de 4,1 % (minimum) du PIB sera donc supérieur aux déficits prévus par la Commission européenne pour les pays de la zone euro (3,1 %) et de l’Union européenne (3,5 %).


Suite à un optimisme forcené essayant toujours de minimiser des prévisions peu florissantes, reprenons le feuilleton des ajustements au fil de l’année 2013.

Les prévisions de recettes des administrations publiques de la loi de programmation et de la loi de finances initiale pour 2013 reposaient sur une croissance du PIB de 0,8 % et une élasticité de ces recettes au PIB de 1. Ce qui est intéressant c’est le terme élasticité des recettes qui apparaît pour expliquer que les recettes ne sont pas maîtrisables.

Ces prévisions ont été révisées une première fois à l’occasion du programme de stabilité d’avril 2013, l’hypothèse de croissance du PIB ayant été ramenée de 0,8 à 0,1 % et l’élasticité des recettes de 1,0 à 0,9.

Dans son rapport de juin 2013 sur la situation et les perspectives des finances publiques, la Cour avait souligné que les nouvelles prévisions de recettes pour 2013 du programme de stabilité lui paraissaient optimistes en raison d’une élasticité encore trop forte.

Le rapport social, économique et financier annexé au projet de loi de finances initiale pour 2014 et le projet de loi de finances rectificative de fin 2013 ont révisé une seconde fois cette élasticité (de 0,9 à 0,4).

Compte tenu des cadeaux effectués et d’une faible inflation mal programmée, la croissance des dépenses en volume a été révisée de 0,8 point à la hausse en septembre 2013 par rapport aux objectifs retenus en décembre 2012 et avril 2013. Les budgets étant votés en valeur et le déficit public étant la différence entre des dépenses et recettes en valeur, l’écart sur la croissance des dépenses en valeur constitue aussi un indicateur pertinent de la qualité du pilotage des dépenses en 2013.

La perte de recettes qui résulte de ces révisions de la croissance du PIB et de l’élasticité des recettes, par rapport à la loi de programmation s’élève à 16 Md€ (8 Md€ du fait de la croissance du PIB et 8 Md€ du fait de l’élasticité), soit 0,8 point de PIB.

La réduction du déficit s’en est de ce fait trouvée limitée à 0,7 point de PIB en 2013 par rapport à 2012, au lieu de 1,5 point dans la loi de programmation. Mais une nouvelle épine dans le pied, apparue lors de nouveaux éléments communiqués par le gouvernement non pris encore en compte par la cour, ferait apparaître une perte supplémentaire de recettes fiscales (impôts sur le revenu et des sociétés) de 3,5 Mds€.


Nous nous retrouvons donc avec une croissance des dépenses plus rapide que prévu, un objectif de réduction des déficits en 2014 à la réalisation incertaine.

Les prévisions de recettes publiques pour 2014 reposent sur une croissance du PIB de 0,9 % qui est plausible et sur une élasticité des prélèvements obligatoires au PIB égale à 1,0 qui paraît trop élevée. Et un objectif de 3,6% du PIB dont l’atteinte n’est pas assurée. Bienque les économies soient mieux programmées que dans le passé, laréalisation des objectifs de dépenses est grevée de nombreusesincertitudes. La réduction prévue des déficits, effectif et structurel,demeure incertaine.

Le déficit effectif devrait ainsi être supérieur de 1,1 point à l’objectif de la loi de programmation (3,0 %), écart qui se retrouve pour l’essentiel (1,0 point) au niveau du solde structurel.

Toute cette analyse nous amène à une hypothèse de croissance du PIB possible. Mais des prévisions de recettes trop optimistes, malgré des efforts de rationalisation, des objectifs de maîtrise des dépenses difficiles à atteindre ne pourront permettre de retrouver rapidement le chemin de l’équilibre.

Pour 2014, le Gouvernement prévoit une croissance de 0,4 % des dépenses publiques, ce qui correspond à une économie de 15 Md€ par rapport à une croissance tendancielle estimée à 1,6 % par an (soit 19 Md€).

Les économies programmées pour 2014 par le Gouvernement, ne peuvent donc pas conduire à une baisse des dépenses mais à un simple ralentissement de leur croissance.

Avec une croissance tendancielle des dépenses estimée à 7 Md€ par an par, pour respecter la loi de finances initiale de 2014, le gouvernement devra trouver en plus 8,4 Md€.

Les économies programmées

Elles sont réparties, pour l’essentiel, entre la masse salariale (1,7 Md€), les autres dépenses de fonctionnement (0,9 Md€), les concours aux collectivités locales (2,0 Md€) et aux opérateurs (1,0 Md€), ainsi que les dépenses d’intervention (2,5 Md€).

Au total, les économies documentées représentent 6,5 Md€ sur 8,4 Md€ annoncées et certaines d’entre elles sont probablement surestimées (aides à l’apprentissage et au logement).


Les nouvelles dépenses budgétées

Des dépenses nouvelles sont budgétées et concernent notamment : les emplois d’avenir (0,8 Md€) ; les contrats de génération (0,2 Md€) ; les aides à l’insertion (0,4 Md€) ; les moyens de Pôle emploi (0,1 Md€) ; les aides sociales aux étudiants (0,2 Md€) ; l’hébergement d’urgence (0,1 Md€) ; la couverture maladie universelle (0,1 Md€) ; l’allocation de rentrée scolaire (0,1 Md€).

Le coût de ces mesures en 2014 représente environ 2,0 Md€.

Si l’on réalise la synthèse, compte tenu des 7 Mds€ de dépenses tendancielles, de 2 Mds€ de dépenses nouvelles, le Gouvernement pour simplement réduire les dépenses de 1,4 Md€, devra trouver 10,4 Mds d’économie. C’est loin d’être gagné.

Avec un si maigre résultat, compte tenu des efforts déployés, on peut se demander alors, comment ce Gouvernement va pouvoir trouver les 35 et plutôt 50 Mds d’économie nécessaires à la suppression des cotisations d’allocations familiales accordée aux entreprises ? Sans parler des dépenses non programmées, souvent octroyées pour calmer les imprévus et mécontentements. (Ex : Bretagne, Marseille, etc…) et des retours en arrière (Manque de rentrées fiscales).

Sauf si par miracle, la croissance revenait ?

Au lieu de se polariser sur les dépenses, les économies, la question à se poser devrait être :

Comment augmenter le PIB, donc la richesse ?

Cette croissance tant attendue, pourrait revenir rapidement si comme une entreprise en difficulté, l’analyse était effectuée dans sa globalité. Tout l’objectif devrait être porté sur le relèvement du niveau de richesses, donc du temps de travail et d’activité.

Il ne faut pas oublier que les dépenses apportent de la consommation, de la croissance. Les diminuer trop tôt et massivement, freinerait la reprise.

Une fois l’équilibre atteint, pour obtenir des résultats positifs, il sera temps de s’attaquer cette fois aux dépenses lâcher du lest pour les rémunération des fonctionnaires, supprimer les emplois aidés et les diminutions de charges.

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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