Dictatures : les sanctions économiques ne servent à rien #BESTOF

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Par Fabrice Balanche Publié le 4 août 2013 à 2h30

Les dictateurs se moquent des sanctions économiques. Ils ont les moyens de les contourner et utilisent les sanctions pour renforcer leur pouvoir. Cuba est sous embargo depuis 1958, ce qui n’empêchera pas Fidel Castro de mourir dans son lit. A Cuba d’immenses panneaux vous expliquent que « el bloqueo » (le blocus) est responsable de tous les problèmes : « Un jour de blocus c’est 20,000 livres scolaires en moins », pour explique la pénurie de manuels, ou bien « Trois jours de blocus, c’est 20 km d’autoroute » car rapidement en quittant la Havane pour Santiago nous nous retrouvons sur une route de campagne.

En Syrie, c’est plutôt Israël qui était responsable de tous les disfonctionnements du système, aujourd’hui le régime de Bachar el Assad peut arguer de la coalition internationale et des différentes séries de sanctions économiques internationales pour justifier le mal développement. Cependant qu’il s’agisse de Cuba ou de la Syrie, ces pays détournent sans peine les sanctions, mais elles sont mises en exergue pour justifier les mesures d’exception sur le plan des libertés politique et entretenir le sentiment nationaliste du petit pays seul contre tous. Le régime utilise d’éventuelles pénuries pour asservir la population en favorisant ses partisans tandis que les autres n’ont plus d’autre ambition que de se nourrir comme en Corée du Nord. Saddam Hussein a profité de l’embargo, entre 1991 et 2003, pour raffermir son pouvoir en centralisant entre ses mains les ressources du pays. Sans intervention militaire il pouvait continuer à régner par la terreur et la faim tout en accusant l’Occident de laisser mourir les enfants irakiens faute de médicaments.

Aujourd’hui, Il est impossible de reproduire l’embargo sur l’Irak sur un autre pays, tel que la Syrie. Il s’agissait d’une période exceptionnelle où les Etats Unis dominaient le monde sans partage. L’URSS avait disparu et la Chine s’éveillait seulement. Par ailleurs l’Irak était entouré par des voisins hostiles qui jouaient globalement le jeu, à l’exception de la Syrie qui a accumulé durant cette période un pactole de plusieurs milliards de dollars en aidant l’ennemi d’hier à détourner le programme « pétrole contre nourriture ». Désormais, sanctionner un régime sur le plan économique, cela consiste à le pousser dans les bras des Russes et des Chinois, beaucoup moins regardant sur les droits de l’homme que les démocraties occidentales.

Outre le fait que le dictateur prospère davantage dans un système économique protectionniste que dans un environnement libéral, il peut compter sur la deuxième puissance économique mondiale et le retour des ambitions impériales de la Russie.

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Article initialement publié le 29/06/2012

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Maître de conférences à l’Université Lyon 2 et directeur du Groupe de Recherches et d’Etudes sur la Méditerranée et le Moyen-Orient (GREMMO) à la Maison de l’Orient et de la Méditerranée (MSH MOM).

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