Mes chères impertinentes, mes chers impertinents,
Je n’aime pas relayer les rumeurs (celle-ci concerne le prince saoudien Ben Salmane), encore moins les commenter, pourtant les systèmes d’alertes de signaux faibles sont pleinement en train de clignoter rouge depuis plusieurs jours. Restons prudents, pondérés, mais évoquons tout de même ce sujet car il est potentiellement explosif et nous avons des mouvements suspects également sur les marchés.
Officiellement Ben Salmane va bien. Il n’est pas mort. Et toutes ces rumeurs sont infondées.
Il y a du vrai et du « on ne sait pas ». Faisons le point pour tenter de comprendre pourquoi.
Il n’y a, dans cette information sur la mort présumée du dirigeant saoudien, du vrai et de l’inconnu. Pas de faux en réalité.
Souvenez-vous. Nous sommes en avril dernier, dans la nuit du 21 au 22 pour être précis, des échanges nourris de tirs qui semblent se répondre avec quelques gros calibres d’ailleurs retentissent dans le palais princier. Officiellement, les gardes ont tiré sur un drone qui survolait sans autorisation ledit palais, créant une panique parmi la soldatesque. Vu ce qui a été tiré sur le drone dit et qualifié officiellement de drone de loisir, on peut croire aux communiqués officiels annonçant triomphant que le drone a été abattu…
Fin de l’histoire ?
Pas vraiment, car depuis quelques heures, le prince Ben Salmane, qui exerce le pouvoir en Arabie saoudite et tente de la réformer à grandes enjambées y compris en changeant la nature même de l’islam saoudien, est porté disparu ! Enfin presque.
Sa dernière preuve de vie c’est le 28 avril dernier, lors de l’inauguration de la citée de divertissement qui sera construite à une quarantaine de kilomètres de Ryad. Le prince comme le roi semblent bien vivant et pas particulièrement blessé comme en atteste cette vidéo ci-dessous dont j’ai trouvé la trace sur le site de l’ambassade saoudienne à Rome. Vous pouvez voir cette vidéo ici.
C’est d’ailleurs une très belle cérémonie.
Pourtant, depuis le 28 avril dernier, Ben Salmane, si prolixe et si visible n’a fait aucune apparition publique alors que l’actualité dans sa région s’emballe ces derniers temps. Pas d’intervention. Pas d’article. Pas de conférence de presse. Rien. Le néant total ou presque.
De quoi donc alimenter les rumeurs à un moment où les relations avec l’Iran sont à couteaux tirés, où les Israéliens tirent sur les manifestants, où la Syrie est en pleine guerre, et où le royaume saoudien combat au Yémen tout en recevant quelques missiles sur la tête de temps en temps.
Des rumeurs d’assassinat qui commencent à enfler dans la presse
Encore une fois j’insiste. Officiellement tout va bien, tout a été démenti, mais le pétrole explose à la hausse et si nous avons quelques problèmes avec l’Iran et le retour des sanctions, cela pourrait fort bien être l’arbre qui cache la forêt.
Vous allez me dire oui mais le pétrole iranien ne pourra plus être vendu, cela fait du pétrole en moins, donc un baril dont le prix est en hausse. Je vous répondrai évidemment que oui, mais la production iranienne en moins, c’est combien de dollars en plus par baril à votre avis ?
1, 2, 5, 10 ou 20 ou 30 $ ?
Personnellement, mon analyse est la suivante.
Si l’Iran ne peut plus vendre son pétrole sur le marché international, il le vendra en direct à la Chine qui, du coup, aura besoin de moins en acheter sur ledit marché international. Plus 1 – 1 = 0 et la tête à Toto. Je valorise donc l’absence de l’Iran sur le marché pétrolier de 1 à 5 € en plus par baril dans un premier temps. Or là, les marchés s’emballent un peu à la hausse et nous avons passé, jeudi 17 mai, les 80 dollars le baril.
Cette hausse est très forte et pourrait fort bien cacher autre chose (et pas uniquement un problème au niveau du prince saoudien). Gardez-donc cela à l’esprit.
Nous avons également un euro qui baisse et un dollar qui monte, et monte encore… Surprenant, surtout que ce mouvement haussier sur le dollar valeur refuge par excellence a commencé… le 20 avril… Gardez donc cela à l’esprit.
Au moment où j’écris ces lignes, nous avons des dépêches iraniennes annonçant l’assassinat du Prince, une dépêche russe de l’agence Sputnik qui reste prudente et un article d’un site algérien.
« Rumeur sur une tentative d’assassinat du prince héritier saoudien dans la presse iranienne »
« D’après l’agence iranienne Fars, une tentative d’assassinat aurait eu lieu contre le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane Al Saoud il y a un mois. D’autres médias précisent par contre qu’il s’agirait d’une désinformation et que la rumeur sur son décès a été lancée sur Twitter.
Apparemment lancée sur Twitter, la rumeur sur la présumée mort du prince héritier saoudien a également fait son apparition dans la presse iranienne. Se référant au journal en persan Keyhan, l’agence iranienne Fars écrit qu’un rapport de service secret envoyé aux hauts responsables d’un État arabe non cité aurait révélé que le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane Al Saoud, a été touché par deux balles lors d’une attaque perpétrée le 21 avril dernier dans son palais. Comme, selon l’agence de presse, le prince ne serait jamais réapparu en public, elle suppose qu’il pourrait être mort. Un point pourtant facilement démenti, puisque le Prince a notamment assisté en personne à l’inauguration de la Cité du divertissement à Ryad, le 28 avril dernier. »
Alors que se passe-t-il en Arabie saoudite ?
Eh bien personne n’en sait vraiment rien pour tout dire. Si ce n’est que nous avons toutes les raisons de croire que la politique intérieure saoudienne est très, très tendue.
Ben Salmane est-il mort assassiné ? Probablement pas, et on devrait bien nous le sortir rapidement dans les prochains jours, lui, ou son père, pour nous rassurer, sinon la rumeur enflera à nouveau et de plus belle.
Mais alors pourquoi autant d’agitation ?
Justement parce que la région est devenue une poudrière comme rarement, que l’Iran et l’Arabie saoudite sont deux ennemis jurés, et que les risques de guerre entre ces deux pays sont devenus réels, alors qu’ils s’opposent déjà en Syrie et au Yémen.
Il n’est pas forcément étonnant que le prince Ben Salmane, pour des raisons de sécurité, se fasse discret. Cela montre néanmoins sans ambiguïté à quel point la situation est explosive et dangereuse au Moyen-Orient.
Les mouvements financiers, eux, plaident pour un conflit armé de grande ampleur à venir d’ici l’été.
Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !
Article écrit par Charles Sannat pour Insolentiae