900 M€ manquants : l’enseignement catholique tire la sonnette d’alarme

Selon une étude publiée le 19 novembre dernier par la Fédération des Ogec (Fnogec) dans le journal Les Echos , l’enseignement catholique sous contrat accuse un manque à gagner proche de 900 millions d’euros en 2024, en raison d’un forfait d’externat versé en-deçà des obligations légales.

19424182 666686806871568 3563256725307607897 N
By Aurélie Giraud Last modified on 24 novembre 2025 12h15
établissements catholiques écoles
900 M€ manquants : l’enseignement catholique tire la sonnette d’alarme - © Economie Matin
450 €Montant moyen qui manque pour chaque élève du privé sous contrat, selon l’étude de la Fnogec.

Le forfait d’externat est au cœur du fonctionnement des écoles privées sous contrat : c’est la somme que les collectivités doivent leur verser pour financer une partie de leurs dépenses de fonctionnement, comme le font ces mêmes collectivités pour leurs propres écoles publiques. L’étude publiée par la Fnogec montre que ce mécanisme, prévu par la loi Debré, n’est plus respecté partout. Et cela crée un déséquilibre majeur dans le financement des établissements.

Ce que doit verser une collectivité aux établissements catholiques — et pourquoi cet argent est essentiel

Pour comprendre la situation, il faut partir du principe clé : une école privée sous contrat fait partie du service public. Elle scolarise les enfants de la commune, du département ou de la région, exactement comme une école publique, mais sans que l’État ou les collectivités aient à construire ou entretenir les bâtiments.

En échange, la collectivité doit verser le forfait d’externat. Cette contribution sert à payer :

  • l’entretien courant du bâtiment,
  • les équipements pédagogiques,
  • les dépenses de fonctionnement indispensables à la vie scolaire.

La Fnogec le rappelle dans son étude dévoilée par Les Echos : « le forfait n’est pas une subvention mais une participation obligatoire ». Autrement dit, ce n’est pas un “cadeau” fait aux écoles privées — c’est la compensation légale prévue pour remplir une mission de service public.

Pourquoi il manque près de 900 millions d’euros en 2024

Selon l’étude, les collectivités ont bien versé environ 1,96 milliard d’euros. Mais ce montant ne couvre pas ce qu’elles devraient verser si elles appliquaient correctement la loi Debré et si le forfait reflétait le coût réel d’un élève dans le public.

Plusieurs problèmes se cumulent :

  • certaines communes versent trop peu ;
  • d’autres ne versent rien pour les élèves qui n’habitent pas la commune, alors que l’obligation existe ;
  • et, comme l’indique la Fnogec, les coûts réels du public sont difficiles à connaître faute de transparence budgétaire.

D'après les calculs de la Fnogec, « jusqu’à 900 millions d’euros manquent à l’appel ». Les Échos parlent d’un « manque à gagner massif », correspondant à « 450 euros par an et par enfant en moyenne ». Famille Chrétienne s’inquiète de son côté d’un « déficit qui menace la survie de certains établissements ».

L’écart n’est donc pas marginal : il est structurel, généralisé et parfaitement documenté.

Les écarts entre communes explosent : une école bien financée ici, étranglée là-bas

L’étude relève un point qui change tout : les montants varient énormément d’une commune à l’autre. Dans certaines villes, le forfait est correctement versé ; dans d’autres, il est sous-évalué ; ailleurs encore, il est tout simplement absent.

La Fnogec observe des écarts « allant d’un facteur de 1 à 30 selon les communes ».
Cela signifie que deux élèves, scolarisés dans des écoles identiques à quelques kilomètres d’écart, peuvent recevoir des financements publics sans rapport.

Les Échos soulignent d’ailleurs que cette absence de transparence budgétaire dans le public « empêche toute harmonisation ». Le résultat : une école à plusieurs vitesses, qui ne correspond plus à l’esprit de la loi Debré.

Les écoles privées se retrouvent à payer ce que les collectivités ne financent plus

Quand le forfait n’est pas versé, les établissements doivent absorber seuls la différence.
Concrètement, cela signifie :

  • retarder des travaux ;
  • réduire certains projets éducatifs ;
  • augmenter les contributions des familles ;
  • voire, dans certains cas, envisager la fermeture.

La Fnogec alerte sur un paradoxe : les écoles privées

Les écoles privées se retrouvent à payer ce que les collectivités ne financent plus

Quand le forfait n’est pas versé, les établissements doivent absorber seuls la différence. Concrètement, cela signifie :

  • retarder des travaux ;
  • réduire certains projets éducatifs ;
  • augmenter les contributions des familles ;
  • voire, dans certains cas, envisager la fermeture.

La Fnogec alerte sur un paradoxe : les écoles privées « financent à perte une partie du service public ».
Elles accueillent des élèves que l’école publique n’aurait parfois pas les moyens de scolariser, mais sans recevoir un financement équivalent.

C’est ce déséquilibre qui inquiète les gestionnaires, en particulier dans les zones rurales ou les petites communes où la marge de manœuvre est très faible.

Pour en sortir : transparence et règles nationales

La Fnogec avance deux solutions claires :

Transparence totale sur les coûts du public.
Les dépenses sont aujourd’hui « noyées dans des masses globales », écrit la Fnogec. Impossible, dans ces conditions, de calculer un forfait juste.

Fixer un plancher national.
Cela éviterait qu’un élève reçoive x30 moins selon son adresse.

Un recours au préfet ou au tribunal administratif est possible quand une collectivité refuse de verser. Les Échos notent que plusieurs OGEC envisagent cette option.

Points clés

  • près de 900 M€ non versés en 2024 (Fnogec).
  • le forfait d’externat sert à financer les dépenses courantes des écoles sous contrat.
  • obligations légales souvent mal appliquées.
  • écarts territoriaux pouvant aller de 1 à 30.
  • les familles et les écoles absorbent le déficit.
19424182 666686806871568 3563256725307607897 N

Aurélie Giraud, juriste de formation, titulaire d'une maîtrise de droit public (Sorbonne, Paris I), est journaliste à Economie Matin, après avoir travaillé comme correctrice et éditrice dans l’édition.

No comment on «900 M€ manquants : l’enseignement catholique tire la sonnette d’alarme»

Leave a comment

* Required fields