La fermeture des anciens réseaux mobiles 2G et 3G pourrait coûter des centaines de millions d’euros. Derrière les antennes qui s’éteignent, c’est une chaîne économique complète qu’il faut réaligner.
Téléalarmes, ascenseurs, téléassistance : la facture de la fin de la 2G

Un virage technique à haute tension budgétaire
Le compte à rebours est enclenché : Orange fermera son réseau 2G dès fin 2025, suivi par SFR et Bouygues Telecom d’ici fin 2026 (Arcep, mars 2025). Quant à la 3G, sa désactivation sera échelonnée jusqu’en 2029, selon les opérateurs.
Derrière ces annonces techniques, l’impact économique est massif. Des millions d’équipements encore actifs reposent sur ces technologies. Le simple passage à la 4G ou à la 5G nécessite des investissements urgents dans l’ensemble des filières : téléassistance, ascenseurs, sécurité, santé, immobilier, industrie.
L’Arcep alerte dans une publication officielle que cette transition est « indispensable mais non sans conséquences » (Plaquette Arcep/DGE, mars 2025). La migration ne relève pas d’une simple mise à jour, mais d’une restructuration complète des parcs matériels dans les secteurs les plus vulnérables.
Des millions d’euros à débloquer pour les ascenseurs et les téléalarmes
Le secteur le plus affecté est celui des ascenseurs. En France, environ 230 000 cabines sont encore équipées de systèmes de téléalarme utilisant le réseau 2G. Alain Meslier, délégué général de la Fédération des Ascenseurs, avertit dans Le Parisien : « Il y a urgence à intervenir avant la fin de la connectivité mobile actuelle ».
Le coût unitaire de remplacement varie entre 300 et 1 000 euros par ascenseur. Pour les bailleurs sociaux et les copropriétés, la facture s’alourdit vite. Un parc moyen de 100 équipements peut représenter un investissement immédiat de 50 000 à 100 000 euros, sans compter les frais annexes d’installation, d’inspection et de mise en conformité.
À cela s’ajoutent les systèmes de téléassistance pour personnes âgées, les capteurs environnementaux, et les appareils médicaux connectés. En tout, près de 8 millions de dispositifs pourraient devenir inopérants, selon une enquête menée par Le Parisien.
Répercussions en cascade sur les marchés, les contrats et les collectivités
Les collectivités locales doivent également s’adapter. De nombreux dispositifs de sécurité urbaine, gestion de l’eau, signalisation intelligente ou mesure environnementale utilisent encore la 2G pour des raisons d’autonomie énergétique. La fermeture technique les contraint à investir dans des modules plus récents, souvent plus énergivores et plus chers.
Dans le secteur automobile, le système eCall, obligatoire dans les véhicules neufs depuis 2018, s’appuie encore sur les anciens réseaux pour les modèles les plus anciens. Des millions de voitures nécessitent des mises à jour logicielles ou matérielles dont le coût pourrait, à terme, se reporter sur l’utilisateur.
Enfin, les prestataires du secteur (installateurs, distributeurs, sociétés de maintenance) sont soumis à une pression logistique accrue : délais de fabrication allongés, hausse des prix des composants, saturation des plannings d’intervention.
Qui paiera la facture ? L’arbitrage budgétaire s’annonce tendu
La question du financement reste entière. Aucun plan national d’aide n’a été annoncé à ce jour. Les coûts seront majoritairement absorbés par les usagers, les syndics, les bailleurs sociaux et les collectivités. Les petites structures, notamment dans le logement social, peinent à intégrer ces dépenses non anticipées à leurs budgets 2025-2026.
Les appels d’offres pour du matériel compatible 4G/5G se multiplient, créant un effet de tension sur le marché. En parallèle, certains prestataires proposent des solutions provisoires (passerelles hybrides, modules de rechange compatibles multi-réseaux), mais à des tarifs souvent prohibitifs.
Le risque d’inaction ? Un défaut de service généralisé dans les équipements publics critiques, une perte de performance dans les systèmes industriels, voire une mise en danger des usagers dépendants de la téléassistance.