Aide médicale d’Etat (AME) : Retailleau promet des changements

Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, a annoncé sa volonté de réformer l’Aide Médicale d’État (AME), un dispositif destiné à couvrir les frais de santé des étrangers en situation irrégulière. Cette initiative, qui s’inscrit dans un contexte budgétaire tendu et de débats sur les politiques migratoires, pose des questions économiques, sociales et sanitaires complexes.

Jade Blachier
Par Jade Blachier Publié le 21 janvier 2025 à 16h15
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aide-medicale-detat-ame-retailleau-changements - © Economie Matin
466.000 personnes466.000 personnes ont bénéficié de l'AME en 2023.

Le 19 janvier 2025, Bruno Retailleau a déclaré son intention de transformer l’Aide Médicale d’État (AME), un dispositif souvent critiqué pour son coût et son supposé effet d’attraction sur l’immigration clandestine. Cette annonce intervient alors que le projet de loi de finances pour 2025 est en discussion. Retailleau propose de remplacer l’AME par une aide d’urgence, limitée aux soins essentiels. Cette réforme s’inscrit dans une volonté plus large de réorganiser les finances publiques et de répondre aux attentes de l’opinion sur la maîtrise des flux migratoires.

L’AME : un dispositif sous tension budgétaire

Depuis sa création en 2000, l’AME garantit un accès aux soins pour les étrangers sans titre de séjour en France. En 2024, son coût a dépassé le milliard d’euros, un montant régulièrement dénoncé par certains élus comme une charge disproportionnée pour les finances publiques. Les partisans de l’AME soulignent que ce dispositif permet d’éviter des dépenses encore plus importantes en réduisant les hospitalisations d’urgence coûteuses et les risques sanitaires.

Bruno Retailleau estime que l’AME est l’une des causes indirectes des flux migratoires irréguliers vers la France. Il affirme que cette aide place la France en décalage par rapport à ses voisins européens. À titre de comparaison, l'Allemagne et le Royaume-Uni limitent l'accès des sans-papiers à des soins d’urgence strictement définis, tandis que l’Espagne réserve son système de soins universel aux besoins primaires.

Les propositions de réforme de Bruno Retailleau

Le ministre propose une transformation radicale de l’AME. Son idée centrale est de recentrer le dispositif sur une aide d’urgence limitée aux soins vitaux, comme les consultations en cas de maladie grave ou les interventions chirurgicales d’urgence. En théorie, cette réforme permettrait une réduction significative des dépenses publiques associées à ce dispositif, bien que les estimations budgétaires précises restent floues.

Retailleau souhaite également aligner la France sur les standards européens pour réduire l’« effet d’appel » des migrants. Selon ses arguments, la générosité du système actuel serait exploitée par des réseaux de passeurs pour promouvoir la France comme une destination privilégiée.

La proposition rencontre des limites structurelles. Une étude de 2023 citée dans les débats parlementaires souligne que réduire l’accès aux soins pourrait accroître les hospitalisations en urgence, entraînant des coûts indirects.

Impacts économiques et sociaux attendus

L’argument budgétaire est central dans le projet de Bruno Retailleau. Limiter l’AME aux soins d’urgence pourrait réduire les dépenses immédiates associées au dispositif, mais au risque de déplacer les coûts vers d’autres secteurs. Certains alertent sur une augmentation probable des recours aux urgences hospitalières, nettement plus coûteux que des consultations médicales préventives.

L’accès réduit aux soins préventifs et curatifs pourrait favoriser la propagation de maladies contagieuses. Les épidémies de maladies infectieuses, telles que la tuberculose, nécessitent des prises en charge rapides et coordonnées. Limiter l’accès aux soins pourrait mettre en péril ces efforts de santé publique.

Réactions politiques et sociétales

La proposition de Bruno Retailleau est soutenue par des partis comme le Rassemblement National, qui voit dans cette réforme une mesure nécessaire pour renforcer la souveraineté budgétaire de la France. Certains élus de droite estiment que l’AME, dans sa forme actuelle, n’est pas soutenable à long terme.

De nombreux élus de gauche, ainsi que des associations de défense des droits de l’homme, dénoncent la réforme comme une atteinte aux principes fondamentaux de solidarité. Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, a qualifié la mesure de « dangereuse et contre-productive », rappelant que l’AME ne représente qu’une fraction des dépenses publiques globales. D’autres figures politiques, comme Raphaël Glucksmann, insistent sur le fait que limiter l’AME ne résoudra pas les problèmes structurels liés aux flux migratoires.

Une réforme à surveiller de près

La proposition de Bruno Retailleau de transformer l’AME en une aide d’urgence s’inscrit dans un contexte de tension entre les impératifs budgétaires, les enjeux de santé publique et les débats sur l’immigration. Si la réforme promet une rationalisation des dépenses, ses conséquences indirectes, notamment en termes de coûts sanitaires et sociaux, pourraient atténuer les gains escomptés.

L’avenir de l’AME dépendra en grande partie des discussions parlementaires et de l’arbitrage du gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances. Il s’agira également de mesurer si cette réforme pourra effectivement s’inscrire dans une politique européenne plus cohérente ou si elle isolera davantage la France sur ces questions sensibles.

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Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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