Face à l’explosion du paiement fractionné et à l’augmentation des situations de surendettement, l’exécutif lance une réforme ambitieuse. Objectif : encadrer les pratiques des banques et des commerçants pour protéger les foyers les plus fragiles.
Payer en « trois fois sans frais » va devenir beaucoup plus compliqué

Le 3 septembre 2025, le Conseil des ministres a adopté une ordonnance relative au crédit à la consommation, et plus particulièrement au micro-crédit. Fondée sur la directive (UE) 2023/2225, le changement de réglementation à venir vise à encadrer plus strictement le paiement fractionné, devenu omniprésent dans la consommation française.
Alors que les encours de crédit atteignent des records, et que le surendettement progresse de 6 % sur les cinq premiers mois de 2025, le gouvernement affirme vouloir préserver l’accès au paiement tout en réduisant le risque d’endettement excessif.
Paiement fractionné : une pratique massive désormais dans le viseur du gouvernement
Le paiement fractionné, souvent proposé en trois ou quatre mensualités sans frais, a connu un essor spectaculaire ces dernières années. Selon La Tribune, 41 % des Français y ont recours plus de huit fois par an. Dans 55 % des cas, il concerne des achats inférieurs à 500 €, en particulier dans l’électroménager, la téléphonie ou le tourisme. Autrefois perçu comme un outil de souplesse budgétaire, il est désormais considéré par les autorités comme un facteur aggravant de surendettement.
Le constat est préoccupant : « En 2024, 17 % des dossiers de surendettement déposés auprès de la Banque de France étaient liés à un paiement fractionné ou un mini-crédit, contre seulement 1 % en 2022 et 7 % en 2023 », rappelle l’Observatoire de l’inclusion bancaire cité par La Tribune. Une progression fulgurante qui montre les effets pervers d’un modèle qui séduit d’abord par sa simplicité, mais piège ensuite les ménages fragiles.
Le paiement fractionné mieux encadré dès 2026
Le 3 septembre 2025, l’Élysée a confirmé l’adoption d’une ordonnance fondée sur la loi n° 2025-391 du 30 avril 2025. Ce texte transpose en droit français la directive (UE) 2023/2225 du 18 octobre 2023 relative aux crédits à la consommation. Selon le compte rendu officiel du Conseil des ministres, il s’agit d’« adapter le droit aux usages numériques et de renforcer la protection des emprunteurs ».
L’ordonnance prévoit une entrée en vigueur progressive. L’encadrement s’appliquera pleinement à partir du 20 novembre 2026, selon le Journal officiel. À cette date, les opérateurs de paiement fractionné devront se conformer à de nouvelles obligations : vérification systématique de la solvabilité des clients, transparence accrue sur les coûts, et interdiction de certaines pratiques commerciales jugées agressives.
Les crédits à la consommation atteignent un encours record à plus de 200 milliards d’euros d’encours
Si le gouvernement commence à s’inquiéter, c’est que les Français, de plus en plus en difficulté à la fin du mois, se tournent massivement vers le crédit. Ainsi, les crédits à la consommation représentent désormais plus de 200 milliards d’euros d’encours en France.
Le problème n’est pas uniquement quantitatif. La structure même de ces crédits a évolué : multiplication des offres de mini-crédits, banalisation des paiements fractionnés, publicité agressive en ligne. Selon Capital, le gouvernement cible particulièrement les prêts de faible montant (moins de 200 €), les crédits rapides avec démarches simplifiées, et les offres entre 75 000 et 100 000 € souvent proposées pour des projets immobiliers ou de travaux.
La nouvelle réforme impose donc une consultation plus systématique du fichier national des incidents de paiement (FICP), afin d’éviter que des consommateurs déjà fragilisés puissent accumuler des dettes supplémentaires. Et pour ce faire, il y aura encadrement strict de la communication commerciale : les publicités vantant la simplicité ou la rapidité des crédits à la consommation devront désormais respecter des normes plus contraignantes. Enfin, certaines pratiques promotionnelles seront interdites, notamment celles visant explicitement les jeunes adultes ou minimisant les risques financiers.
Le paiement fractionné sera un crédit à la consommation classique
La directive européenne transposée en droit français prévoit donc d’assimiler le paiement fractionné (souvent appelé BNPL – Buy Now Pay Later) à un crédit à la consommation classique. À partir de 2026, il sera donc soumis aux mêmes obligations que les prêts traditionnels : fourniture d’un échéancier détaillé, droit de rétractation de 14 jours, et vérification systématique de la situation financière de l’emprunteur.
