Devoir de vigilance : L’UE s’accorde, l’industrie flippe

La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) est devenue centrale dans la stratégie des entreprises, mais aussi dans la lutte contre les pratiques dangereuses de ces dernières, en particulier dans les pays sous-développés ou en voie de développement. L’Union européenne (UE) a franchi un pas décisif, en votant pour l’obligation faite aux entreprises de respecter les droits humains et l’environnement. Mais voilà que les entreprises s’inquiètent.

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Modifié le 18 mars 2024 à 10h37
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10413 MILLIARDS €Le secteur de l'industrie dans l'ensemble des pays de l'Union Européenne s'élevait à 10.431 milliards d'euros.

Le devoir de vigilance pour les entreprises européennes

Le "devoir de vigilance" deviendra une injonction adressée aux grandes entreprises après l’accord trouvé entre les pays de l’Union européenne le 15 mars 2024. L'objectif ? Les contraindre à identifier, prévenir et atténuer les risques d'atteintes aux droits humains et à l'environnement tout au long de leur chaîne d'approvisionnement. Ce qui signifie une vigilance pour leurs activités… mais surtout pour leurs sous-traitant, y compris à l’étranger. Une ambition louable, qui s'inscrit dans une volonté de rendre les entreprises actrices de la lutte contre l'exploitation de l’homme et la dégradation environnementale.

Toutes les entreprises n’y seront évidemment pas soumises. Selon le texte adopté, après deux échecs, ce seront les entreprises de plus de 1.000 employés et dont le chiffre d’affaires dépasse les 450 millions d’euros qui devront se plier. La mesure « aura des implications majeures dans le monde entier. Les gens et la planète doivent passer avant les profits », estime Lara Wolters, rapporteuse du texte.

Mais déjà les ONG s’inquiètent : selon Global Witness, finalement, seulement 5.400 entreprises en Europe seront soumises au devoir de vigilance, près de trois fois moins que ce que prévoyait l’accord initial.

Les industriels s’inquiètent de ce nouveau devoir de vigilance

France Industrie, lobby du secteur industriel français, s’inquiète. Les entreprises redoutent un surcroît de contraintes réglementaires et administratives susceptibles de nuire à leur compétitivité, surtout dans un contexte international où leurs concurrents ne sont pas soumis aux mêmes exigences. Le texte « dégraderait la compétitivité de l’industrie européenne en faisant peser sur celle-ci des obligations bien plus sévères que celles concernant les entreprises des pays tiers ».

Sans surprise, France Industrie a demandé aux parlementaires européens de ne pas voter le texte, qui devra être approuvé en avril 2024 par au moins 15 des 27 pays de l’Union européenne. Car même avec une réduction du nombre d’entreprises assujetties à la nouvelle réglementation, « ce ne sont pas des retouches de dernière minute qui conduiront à atténuer les dommages de long terme que produirait un tel texte ».

Les patrons sauvés de devoir faire trop d’efforts pour le climat

Le texte, revu à la baisse, cible également les émissions de CO2 des entreprises. « La législation prévoit toujours l’obligation (pour les grandes entreprises) d’avoir un plan de transition climatique conforme à l’Accord de Paris, c’est une avancée majeure », affirme de son côté Pascal Canfin, président de la commission environnement au Parlement européen.

Pour autant, pas question d’inciter financièrement les patrons à faire des efforts sur les émissions de carbone. Alors que la première version du texte prévoyait d’imposer une rémunération variable aux dirigeants, qui serait soumise au respect des objectifs environnementaux, le texte adopté vendredi 15 mars 2024 la supprime.

Paolo Garoscio

Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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