Le 23 octobre 2025, l’Assemblée nationale a adopté à une large majorité la réforme inscrivant explicitement le consentement dans la définition pénale du viol et des agressions sexuelles. Ce vote, qualifié d’historique par plusieurs députées, marque un tournant pour le droit pénal français : désormais, le cœur de l’infraction sexuelle repose sur l’absence de consentement, et non plus uniquement sur la preuve d’une contrainte ou d’une violence.
Loi sur le consentement : ce que change le vote historique de l’Assemblée nationale

À Paris, dans l’hémicycle du Palais-Bourbon, les députés ont validé jeudi 23 octobre 2025 l’accord issu de la commission mixte paritaire (CMP) sur la redéfinition du viol dans le code pénal. Le texte, adopté par 155 voix pour contre 31 voix contre, exclusivement de la part de la droite et l’extrême-droite (UDR et RN), introduit pour la première fois dans la loi la notion de consentement explicite en matière de relations sexuelles.
Viol : Une réécriture du code pénal centrée sur le consentement
Le texte adopté redéfinit les agressions sexuelles comme « tout acte sexuel non consenti ». La loi précise que le consentement doit être « libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable ». Ces termes, issus de l’accord trouvé le 21 octobre 2025 en CMP entre députés et sénateurs, s’appliqueront désormais à l’ensemble des infractions sexuelles prévues par le code pénal.
Concrètement, l’article de référence stipule : « Au sens de la présente section, le consentement est libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable. Il est apprécié au regard des circonstances. Il ne peut être déduit du seul silence ou de la seule absence de réaction de la victime. » Cette définition vise à combler une faille juridique : jusqu’ici, pour qualifier un viol, les magistrats devaient prouver la contrainte, la menace, la violence ou la surprise. Désormais, c’est l’absence de consentement qui fonde l’infraction, ce qui rapproche la France de la plupart des pays européens ayant adopté la logique du « seul un oui est un oui ».
Le terme « circonstances » a été retenu par la commission pour guider l’appréciation judiciaire du consentement. La sénatrice Dominique Vérien, co-rapporteure du texte, a expliqué sur Public Sénat : « Le terme de circonstances répond à nos attentes, c’est-à-dire que ne rien dire ne veut pas dire consentir. » Selon elle, cette précision évite les interprétations restrictives du silence ou de la peur de la victime.
Cette avancée législative ne supprime pas les critères classiques de contrainte ou de menace ; elle les réaffirme. Le texte rappelle expressément : « Il n’y a pas de consentement si l’acte à caractère sexuel est commis avec violence, contrainte, menace ou surprise, quelle que soit leur nature ».
Un vote massif mais pas d’unanimité
Le 23 octobre 2025, à neuf heures du matin, l’Assemblée nationale a validé le texte issu de la CMP. Sur 186 suffrages exprimés, 155 députés ont voté pour et 31 contre. L’adoption a été saluée par les bancs de la majorité comme une victoire féministe et républicaine.
La députée Marie-Charlotte Garin a résumé la portée symbolique du texte en déclarant : « Céder ne sera plus jamais consentir », relaye CNEWS. Pour sa collègue Véronique Riotton, également députée de la majorité, « Nous passons collectivement de la culture du viol à la culture du consentement ». Ces mots traduisent la volonté de faire évoluer la jurisprudence vers une compréhension plus fine des comportements sexuels imposés sans accord explicite.
Le gouvernement, par la voix d’Aurore Bergé, ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, a salué un « progrès de civilisation ». « Consentir, ce n’est pas ne pas dire “non”. Consentir, c’est dire “oui”. Un “oui” explicite », a-t-elle déclaré sur LCP à l’issue du scrutin.
Ce vote met fin à plus de trois ans de débats juridiques et politiques. L’idée d’inscrire le consentement dans le code pénal avait émergé après plusieurs affaires médiatisées et critiques du Conseil de l’Europe, qui estimait que la France devait se conformer à la Convention d’Istanbul. Le calendrier parlementaire s’est accéléré en octobre 2025, lorsque la CMP a trouvé un compromis sur la formulation du texte. Le prochain vote au Sénat, prévu le 29 octobre 2025, devrait entériner définitivement la réforme.
Des effets attendus sur la justice et la société
L’inscription du consentement dans la loi n’est pas qu’une question de sémantique ; elle modifie le déroulé du procès pénal. En pratique, les juges d’instruction et les juridictions devront désormais examiner si un acte sexuel a été réellement voulu par la victime, indépendamment de la preuve d’une résistance physique. Cette évolution pourrait, selon plusieurs juristes cités par Public Sénat, élargir le champ des incriminations et renforcer la protection des victimes.
Le texte du code pénal révisé introduit une logique de preuve inversée : l’enquête cherchera d’abord à établir s’il y a eu un consentement libre et éclairé, plutôt qu’à démontrer la contrainte. Cette approche impose de nouvelles obligations aux magistrats et aux enquêteurs, notamment pour recueillir des témoignages plus précis sur le déroulement des faits et sur les signes d’accord ou de refus.
Sur le plan juridique, cette redéfinition s’inscrit dans la continuité de la loi de 2021 sur les violences sexuelles sur mineurs, qui avait déjà renforcé la protection des enfants. Elle prolonge un mouvement européen : en 2025, dix-huit États membres de l’Union européenne ont déjà adopté une législation fondée sur le consentement, selon le rapport de la Commission européenne sur l’égalité de genre.
