Suspension, fraude massive, budget saturé… À l’approche de sa réouverture, MaPrimeRénov entame un virage drastique. Ce qui devait être une simple subvention se transforme en dispositif rigoureusement encadré. Dès le 30 septembre 2025, seuls les foyers les plus précaires pourront entamer un parcours désormais obligatoire, au sein d’un cadre restreint et plafonné.
MaPrimeRénov : tout ce qui change dès septembre 2025

Depuis sa création en 2020, MaPrimeRénov symbolisait la volonté de l’État d’inciter les particuliers à engager des rénovations énergétiques. En 2025, le succès même du programme a fini par l’asphyxier : budget dépassé, dossiers en surnombre, et dérives multiples. Selon le ministère du Logement, 5 000 cas de fraude ont été formellement identifiés au sein des rénovations globales.
La suspension entamée en juin visait à endiguer cette dérive. Mais sa réactivation, prévue pour le 30 septembre 2025, ne marquera pas un retour à l'identique. Tout change : critères d’éligibilité, plafonds, et logique même du dispositif.
MaPrimeRénov : Un plafond de dossiers annuel
Première restriction : l’État impose un plafond annuel de 200 000 dossiers instruits. Pour les trois derniers mois de 2025, seuls 13 000 projets pourront être enregistrés, souligne CNEWS.
Autrement dit : passé ce seuil, plus aucune demande ne sera acceptée, sauf en 2026. Ce cadrage strict, nouveau dans l’histoire du dispositif, acte le passage d’un modèle ouvert à une gestion budgétaire verrouillée.
Seuls les ménages très modestes autorisés à toucher les aides à la rénovation énergétique… pour l’instant
Le gouvernement réserve désormais l’accès à MaPrimeRénov aux foyers très modestes, selon les plafonds de l’Anah. Ces derniers seront les seuls à pouvoir déposer un dossier dès la réouverture.
Le ministère a précisé : « Dans un premier temps, seuls les ménages très modestes pourront faire une demande de subvention ». Les ménages dits "modestes" pourraient être admis plus tard, mais uniquement « en fonction de la dynamique des nouveaux dossiers », selon la même source. Autrement dit, rien n’est garanti.
MaPrimeRénov : Travaux de rénovation encadrés, gains énergétiques exigés
Autre évolution : le dispositif n’accepte plus les rénovations par geste simple (chauffage, fenêtres, etc.). Toute demande devra porter sur un ensemble cohérent de travaux, accompagné d’un gain énergétique mesurable.
Deux niveaux sont désormais reconnus :
- Pour un gain de 2 classes au DPE, le montant de travaux pris en compte est plafonné à 30 000 €.
- Pour un gain de 3 classes, le plafond est relevé à 40 000 €.
Ces seuils ont été abaissés, puisqu’ils étaient auparavant fixés à 70 000 euros, rappelle CNEWS. Cette réduction traduit une volonté de cibler davantage les rénovations réellement performantes, plutôt que les projets partiels ou dispersés.
Le parcours accompagné devient la norme pour toucher les aides
Désormais, aucun dossier MaPrimeRénov ne pourra être engagé sans un accompagnement encadré. Ce parcours, pris en charge par un conseiller France Rénov’ agréé, constitue une condition d'accès impérative.
Cet interlocuteur :
- Réalisera un audit énergétique.
- Construira un plan de travaux adapté.
- Établira un budget complet avec échelonnement.
- Suivra l’exécution des chantiers jusqu’à réception.
Ce processus devient universel. Il n’est plus optionnel, même pour les rénovations jugées simples. L’État impose ainsi une montée en compétence généralisée des porteurs de projets, tout en verrouillant la chaîne de dépense.
D’autres restrictions cumulatives
Les nouvelles conditions incluent également :
- Une ancienneté minimale du logement portée à 15 ans.
- L’obligation pour le bénéficiaire de résider à titre principal dans le bien.
- La déclaration préalable d’un DPE, validé par un opérateur certifié.
- L’interdiction de commencer les travaux avant validation complète du dossier par l’Anah.
Les contrôles seront renforcés, avec plusieurs niveaux de vérification post-travaux. Ce durcissement répond à la volonté de freiner les montages frauduleux, qui ont explosé en 2023 et 2024.
Le ministère du Logement ne cache pas sa volonté de réduire le nombre de bénéficiaires, et de réorienter les crédits vers des rénovations lourdes, à fort impact énergétique. Dans les faits, plus de 90 % des bénéficiaires potentiels de 2022 à 2024 sont désormais exclus, à moins d’entrer dans les nouvelles grilles. Le gouvernement assume ce tri, en cohérence avec l’orientation écologique de la programmation budgétaire 2025.
Une aide devenue parcours du combattant ?
Loin du guichet universel qu’il était, MaPrimeRénov devient un outil sélectif, exigeant, piloté par des quotas. Il ne s’adresse plus à tous, mais à une minorité solvable, accompagnée, et techniquement prête.
Cette mutation marque la fin d’un cycle : l’aide publique se resserre, au prix d’une accessibilité réduite et d’un engagement administratif alourdi. Reste à voir si les bénéficiaires, désormais triés, obtiendront des rénovations à la hauteur de leurs efforts.
