Le risque de voir le montant et le nombre des amendes exploser est réel

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Par Ingrid Attal Publié le 15 décembre 2013 à 7h43

Les députés ont voté jeudi 12 décembre la dépénalisation du stationnement, dans le cadre du projet de loi sur la modernisation de l’action publique territoriale et sur l’affirmation des métropoles.

Concrètement, les maires vont pouvoir fixer eux-mêmes non seulement le montant du prix du stationnement, mais aussi le montant de la sanction en cas de non paiement par l’automobiliste. Sera donc instaurée en lieu et place de l’amende une redevance dite « forfaitaire post-stationnement ».

Dans le système actuel, le non paiement du stationnement se solde par la réception au domicile d’une contravention de 1ère classe, fixant une amende à 17 €, sanction identique pour tous les contrevenants.

Ce que nous craignons principalement, c’est la dérive qui consisterait pour les maires à augmenter le montant de cette redevance de manière significative, à la fois pour chasser les véhicules particuliers de leur centre-ville, et pour assurer de confortables revenus à la municipalité.

D’un autre côté, ce texte prévoit fort heureusement un volet positif, dans la mesure où l’on peut espérer que certains élus joueront le jeu de la baisse des tarifs de stationnement et du prix du forfait.

Nous verrons toutefois qu’en pratique, il s’agira très certainement de maires qui n’ont pas attendu le vote de ce texte pour moduler le prix du stationnement dans leur commune, et qui ont donc déjà fait le choix d’une politique attractive en termes de stationnement, où les intérêts financiers ne figurent pas au premier plan.

A titre d’exemple, on peut citer la commune de Calais, dont la sénatrice-maire Natacha Bouchart a mis à la disposition de ses administrés 50 000 places de stationnement gratuites (ou avec une période de gratuité), ou encore la commune de Vesoul, qui a introduit de nombreuses places de stationnement pour lesquelles les 30 premières minutes sont gratuites.

Par ailleurs, les maires pouvant désormais déléguer la gestion de la verbalisation du stationnement à des sociétés privées, nous craignons également une politique « du chiffre », comme c’est le cas aujourd’hui pour les services de la fourrière, qui confient l’enlèvement des véhicules aux entreprises privées.

Enfin, la complexité des modalités de contestation des avis de paiement émis suite au non acquittement du prix du stationnement à l’horodateur risque de décourager plus d’un automobiliste : c’est en effet un véritable parcours du combattant qu’il va devoir engager pour faire valoir ses droits.

Actuellement, c’est le juge pénal qui tranche les contestations relatives aux infractions liées au stationnement. Avec le système de dépénalisation, ce ne sera plus le cas. L’automobiliste qui souhaite contester l’avis de recouvrement qu’il a reçu devra adresser un recours auprès de l’entité dont relève l’agent verbalisateur ayant établi ledit avis. Entité qui pourra être une société privée – dont on peut douter à la fois de l’impartialité et de la compétence juridique – dans la mesure où les communes ne sont pas dotées de services juridiques.

Si l’automobiliste se voit opposer un refus, il devra alors saisir le Tribunal administratif et s’acquitter d’un timbre fiscal de 35 €.

Face aux risques de dérives du système, à la complexité qu’il introduit quant à la contestation des avis de paiement et à la non-acceptabilité que cela risque d’engendrer auprès des automobilistes, « 40 millions d’automobilistes » a publié le 13 décembre un manifeste à l’attention de tous les maires de France, intitulé « Je m’engage à ne pas augmenter la redevance de stationnement », dans lequel chaque maire signataire assure à ses administrés qu’il ne les pénalisera pas davantage lors de la mise en application du texte, et promet donc de maintenir le montant de la redevant post-stationnement à 17 €, sinon de le diminuer.

Nous ne pouvons qu’encourager les maires à faire connaître leur engagement dès aujourd’hui, afin de rassurer les automobilistes sur le sort qui leur est réservé dans leur ville.

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Me Ingrid Attal est avocate en droit de l'automobile au barreau de Paris et présidente de la commission juridique de l'association "40 millions d'automobilistes".

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