Changement d’heure : bienvenue en absurdie !

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Par Ludovic Grangeon Modifié le 26 mars 2018 à 6h50
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2 milliards d'eurosL'impact économique négatif du changement d'heure est de 2 milliards d'euros minimum.

Il existe des mesures dont s’emparent d’obscurs et minuscules responsables, sans mesurer les conséquences sociales, économiques, techniques et humaines de leurs décisions, jusqu’à la dictature technocratique ou la manipulation financière.

On reste glacé par cette froideur sectaire, cette grise inconscience , ce manque profond de lucidité. Le contrôle démocratique était jusqu’à présent absent de ce domaine. Le Parlement Européen vient opportunément de reprendre le pouvoir pour le changement d’heure. Il est urgent qu’il le fasse également au plus vite en termes d’organisation hospitalière ou d’énergies renouvelables, deux domaines où le désastre est tout autant effarant.

Le premier exemple en est le changement d’heure

Par de tortueuses justifications, plus personne ne se souvient des origines de cette mesure. Rappelons tout d’abord que la France et l’Espagne sont restées fortement décalées toute l’année, hiver comme été, en avance d’une heure par rapport à leur véritable fuseau horaire. Cette mesure date de l’invasion allemande depuis 1940, par commodité pour les forces d'occupation. Elle est depuis restée en place car la rectification n’est jamais intervenue, prévue en juin 1945, puis annulée en novembre. En réalité, Paris, Londres, Madrid, et Rabat sont sur le même fuseau horaire réel, mais seuls le Royaume uni et le Maroc le respectent. La justification européenne ne tient pas puisque, par exemple, le Portugal est sur le fuseau horaire correct.

Le changement d’heure a une incidence encore plus limitée : la France fait la largeur d’un fuseau horaire; il y a donc environ une heure d’écart de lever du jour entre Est et Ouest. Ainsi, fin mars, le soleil se lève à 8h10 à Brest, mais à 7h20 à Strasbourg. Lors d’un changement d’heure, il faut déjà diviser par trois l’impact théorique des mesures d’économie d’énergie, qui sont calculées de façon absurde en appliquant le même horaire à l’ensemble du territoire, alors qu’elles devraient l’être par département. Par ailleurs la répartition territoriale de la population et son mode de vie n’ont pas du tout les mêmes impacts en termes de changement d’horaire (urbain/rural, atelier/bureau, extérieur/intérieur par exemple). Ces facteurs ne sont pas pris en compte. Enfin, la gestion raisonnée de l’éclairage public, introduite récemment, supprime encore une grande partie de la justification de cette mesure, et c'est encore plus vrai avec les nouveaux types d'ampoules électriques.

Tout ça pour ça… !

En termes économiques, l’Ademe n’est jamais parvenue qu’à publier un seul chiffre, en économies d'énergie à 440 Gigawatts/heure, la "consommation électrique de 800 000 ménages". Ce chiffre ridicule concerne seulement 3% des 25 millions de ménages français (Insee). Où sont les usines et les bureaux ? Il semble en plus ne correspondre qu'à l'éclairage, ce qui ramène à encore pire, soit 0.3% de la consommation totale des ménages français (environ 5000 kwh/an pour un ménage selon la CRE). .L'Ademe exagère souvent dans ses effets d'annonce avec de gros chiffres qui n'ont que peu de sens, dont les zéros deviennent autant de bulles. Ces "prévisions" ne sont pas actualisées alors que ...l'Ademe a lancé à grands frais des campagnes pour le remplacement des ampoules d'éclairage. Ramené en coût industriel, ce chiffre peu plausible représente en réalité un montant dérisoire de 18 millions d'euros en production, ou 35 millions en termes de coût consommateur. Et si on y ajoutait l’effet carbone, on arriverait à peine à 40 millions. Il faut en plus diviser ce chiffre ridicule par trois pour son impact réel géographique, soit à peine 20 millions pour la France entière.

En face de cette dérision technocratique, les médecins ne comptent plus les problèmes de trouble du sommeil, de dépression, d’atteinte du rythme scolaire, d’augmentation des accidents cardiaques et vasculaires, d’accidents du travail dus au manque de concentration, d’accidents de la circulation. Le nombre de personnes touchées est au minimum de 16 à 20 millions en France. Le coût d’une journée maladie oscillant entre 400 et 3000 euros selon la personne, si seulement un dixième des personnes touchées ne connaissaient qu’une seule journée de perturbation, le coût en serait de dix à trente fois les « économies » du changement d’heure, entre 650 et 900 millions euros au minimum. Et nous savons tous que ce taux est bien plus important, au moins d'1.8 milliard.

Ce n’est pas tout, il faut y ajouter les pertes considérables dans l’activité agricole, l'élevage d'animaux, les cliniques et hôpitaux, l'enseignement,dans la boulangerie, la chimie, les fleuristes, les apiculteurs, le génie civil, la pêche et l'aquaculture, l'irrigation, les fruits et légumes, les modifications d’automates, les publications d’horaires, les changements d’horaires d’accueil, les transports, etc... dont l’impact économique est au moins égal à celui des problèmes de santé.

Pour quelques dizaines de millions théoriques, la totalité de la population subit de graves dommages humains, sociaux, techniques, sanitaires, dont l’impact économique négatif est au moins de deux milliards d'euros, probablement du double, et surtout l’impact humain totalement méprisé. La suppression du changement d'horaire est à intervenir au plus tôt car elle aura un effet bénéfique considérable sur l'économie et surtout sur le bien être des personnes.

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Ludovic Grangeon a été partenaire de plusieurs réseaux d’expertise en management et innovation sociale de l'entreprise. Il milite à présent pour le développement local et l’équilibre des territoires au sein de différentes associations. Il a créé en grande école et auprès des universités  plusieurs axes d’étude, de recherche et d’action dans le domaine de l’économie sociale, de la stratégie d’entreprise et des nouvelles technologies. Il a également été chef de mission et président de groupe de travail de normalisation au sein du comité stratégique national Afnor management et services. Il a participé régulièrement aux Journées nationales de l’Economie, intervenant et animateur. Son activité professionnelle a été exercée dans l'aménagement du territoire, les collectivités locales, en France et auprès de gouvernements étrangers, à la Caisse des Dépôts et Consignations, dans le capital risque, l’énergie, les systèmes d’information, la protection sociale et la retraite.

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