La moitié des entreprises ne sont pas prêtes pour le défi des réseaux sociaux

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Par Elie Kleiman Publié le 9 novembre 2013 à 4h38

A l'heure où les entreprises utilisent les réseaux sociaux pour promouvoir leurs produits, pour valoriser leur marque employeur ou leur engagement responsable, nombre d'entre elles sont victimes de ce nouveau média lorsqu'une crise les frappe. Pour le comprendre, il convient de regarder de plus près la typologie des crises, leur mode de diffusion dans les médias ainsi que la façon dont les entreprises les anticipent, s'entourent pour les gérer et y répondent.

Les professionnels internationaux de la communication interrogés (étude Freshfields Bruckhaus Deringer – Novembre 2013) s'accordent à dire qu'une crise qui survient au sein d'une grande entreprise prend très vite aujourd'hui une ampleur internationale : dès que la couverture médiatique d'une crise dépasse son pays d'origine, elle s'étend en moyenne à onze pays. Ainsi, plus d'une crise sur quatre (28%) est couverte par les médias internationaux dans l'heure qui suit sa première annonce, plus de deux crises sur trois (69%) étant commentées dans les 24 heures. Les multinationales ne sont pas les seules touchées par l'internationalisation de l'information. Même si l'entreprise est locale, tout sujet la concernant susceptible d'avoir un impact psychologique ou économique important dans d'autres pays peut connaître une diffusion internationale.

Les réseaux sociaux occupent une place centrale dans la diffusion de l'information. Dans 50% des crises, ces médias ont accentué la propagation de l'information ou aggravé le contenu du message dans le pays d'origine de la crise. La diffusion virale, extrêmement rapide, de l'information via les réseaux sociaux a pour conséquence de réduire à quelques heures le temps dont disposent l'entreprise et ses conseils pour analyser les causes de l'incident et mettre en place une communication! Au moment où une crise éclate, elle peut potentiellement se répandre comme un feu de brousse autour du globe. Les dirigeants doivent donc développer avec leurs conseils des méthodes plus efficaces afin de préserver leur réputation et les intérêts essentiels dont ils ont la charge, en dépit de temps de réponse réduits.

Force est de constater, là encore, une tendance au retard. Bien que le plus souvent la prise de conscience d'un risque probable de crise puisse être intervenir plusieurs jours, voire plusieurs mois à l'avance, les entreprises prennent en moyenne 21 heures pour diffuser une première communication coordonnée avec leurs conseils, ce temps de réponse pouvant atteindre 48 heures dans 18% des cas.

La préparation, un facteur clé

Seule une préparation approfondie est de nature à permettre aux entreprises de gérer rapidement et efficacement leur communication, de minimiser la propagation dans les médias d'une information négative et, ainsi, de préserver leur réputation. Mais, confrontés à la réalité du marché, près des deux tiers des professionnels de la communication jugent que les clients qu'ils ont conseillés récemment dans le cadre d'une crise auraient pu mieux s'y préparer.

L'incapacité à anticiper une crise de réputation, dès les premières manifestations, peut s'avérer très coûteuse pour une entreprise, en termes de perte de valeur, de revenus et d'atteinte durable à son image. Par exemple, si l'on s'intéresse au cours de bourse des entreprises, on s'aperçoit qu'elles disposent en moyenne d'une fenêtre de 24 à 48h pendant laquelle les réactions des marchés financiers restent limitées (étude Freshfields – 2012) : frappées par une crise de réputation, 48% des entreprises voient leur cours de bourse chuter le premier jour et 54% le deuxième jour. Au bout d'un mois, la réaction négative des marchés financiers atteint son pic (60%) et 53% des entreprises touchées ne retrouvent pas leur niveau initial de cours de bourse un an après la crise.

Nous constatons que dans la majorité des cas, les entreprises disposent de suffisamment de temps avant qu'une crise ne devienne publique pour s'y préparer et affiner leur communication, y compris dans ses aspects juridiques, avant que les marchés financiers ne réagissent. La fenêtre de temps pendant laquelle l'entreprise peut prendre la mesure de la situation et adapter sa communication est extrêmement brève et exige de se concentrer sur deux axes principaux : d'une part la gestion opérationnelle de la crise, qui impose de mener de front une enquête approfondie et la prise de décisions adéquates, et d'autre part la gestion de la communication, en s'efforçant d'adapter la cadence et le contenu de la communication au rythme dicté par les réseaux sociaux, de collaborer avec les médias afin de limiter l'impact négatif sur la réputation de la société. Les entreprises doivent donc avoir développé et testé, en amont, des procédures flexibles et efficaces afin de tirer parti de ces courtes fenêtres et de réagir dans les meilleurs délais. Les crises purement imprévisibles resteront toujours plus difficiles à gérer mais une bonne préparation, y compris juridique, peut faire une réelle différence à long terme.

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Avocat à la Cour, Elie Kleiman, 47 ans, a rejoint le cabinet Freshfields en août 2000 en qualité d'associé du groupe arbitrage international et contentieux, où il se consacre plus particulièrement à l'arbitrage international et à la résolution des différends complexes. Il est managing partner du bureau de Paris de Freshfields depuis novembre 2011.

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