Le projet éolien en mer des deux îles vu par WPD : 20 jours de suspension demandés après 7 années d’engagement

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Par Leopold Sarkar Modifié le 29 novembre 2022 à 10h10

Le dossier de l'attribution du parc éolien au large des îles d'Yeu et de Noirmoutier n'est pas encore refermé. Désireux d'avoir un droit de regard sur les raisons qui ont motivé l'avis de la CRE en faveur du consortium GDF Suez Areva, et sceptique quant à la faisabilité de leur projet, WPD voudrait comprendre ce choix et s'assurer qu'il ne mette pas en péril l'ensemble du projet. WPD a toutefois pris soin de ne pas nuire à son calendrier en engageant une procédure suspensive donnant au juge seulement vingt jours pour examiner les notes techniques attribuées à chaque consortium.

La ministre de l'Écologie Ségolène Royal, après avoir évoqué un choix « très serré », avait finalement préféré, le 7 mai 2014, suivre l'avis de la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Cette dernière s'était prononcée en faveur du projet du consortium GDF Suez/Areva.

Mais l'entreprise WPD a déposé, jeudi 15 mai, un référé précontractuel, car elle s'interroge en particulier sur les conditions d'attribution du lot n° 2 « des îles d'Yeu et de Noirmoutier » et voudrait « s'assurer, sous l'autorité indépendante du juge, que l'analyse des dossiers a bien été strictement appréciée au vu des critères du cahier des charges ».

Il ne s'agit pas pour l'entreprise de mettre des bâtons dans les roues du projet éolien pour lequel elle s'engage depuis maintenant 7 années. Il est bien plutôt question d'obtenir des éclaircissements sur les motivations qui ont prévalu au choix de la CRE. WPD « fait état de fragilités importantes sur l'évaluation de 9 des 16 critères de l'appel d'offres, de nature à modifier la notation et donc la désignation du lauréat ».

C'est une remise en cause d'envergure et qui ne manque pas de légitimité quand on s'intéresse à la nature de l'engagement de l'entreprise dans ce projet, ainsi qu'aux détails des critères d'évaluation ainsi interrogés.

7 années de concertation

Au départ, il faut bien reconnaître que c'est à WPD que revient le mérite d'avoir identifié le site au large de la Vendée comme étant favorable à l'implantation d'éoliennes. « La Vendée est particulièrement ventée et les fonds sont propices à de solides fondations à une distance rendant les éoliennes très peu visibles. Aujourd'hui, la Vendée a l'opportunité de rendre l'équivalent de 70 % de sa consommation d'origine renouvelable, grâce aux éoliennes du parc offshore des deux îles », soulignait déjà l'entreprise en 2008.

Elle n'a cessé depuis lors de s'entretenir avec les acteurs locaux : associations, administration, chambres de commerce et surtout matins pécheurs. Une démarche de concertation qui avait notamment pour but de rassurer ces derniers, le projet éolien n'étant pas sans impacts sur leurs activités. Cette implication locale avait d'ailleurs été mise en avant par José Jouneau, président du comité régional des pêches, au moment d'exprimer la préférence de la profession en faveur du projet du consortium WPD/EDF/Alstom à la mi-janvier.

« Je tiens par ailleurs à souligner que WPD travaille, et ce depuis de nombreuses années, en étroite collaboration avec les professionnels de la pêche des différents ports concernés (...). Au cours de ces années, le respect entre les différents acteurs s'est instauré et lorsque l'on parle de travailler pour les générations futures, la notion de confiance ne se quantifie pas en termes de promesses, mais bien sur des valeurs et des faits » avait déclaré le président dans le communiqué officiel.

Une remise en cause technique appuyée par des études de terrain

Parmi les critères d'évaluation interrogés : « le choix des fondations d'éoliennes, déterminant dans l'élaboration d'un projet éolien en mer, non seulement pour son coût puisqu'il représente 30 % de l'investissement, mais également pour son impact environnemental ».

WPD a mené des études de terrain (géotechnique, hydrodynamique, vent, etc.) qui lui ont notamment permis de s'apercevoir que la dureté des sols rendait impossible le travail de forage, donc le recours aux fondations en jacket. Or, ce sont justement celles utilisées par GDF Suez/Areva, « qui n'a réalisé aucun forage » comme le rappelle WPD dans son communiqué.

« Leur choix de fondation ancrée (contrairement à notre choix de fondation posée) est incompatible avec le site et entraine une sous-évaluation très significative du coût global du projet, ce qui fausse donc la notation de plusieurs critères de l'appel d'offres », précise encore l'entreprise.

Il ne s'agit là que d'un critère d'évaluation parmi d'autres. Elle n'est pas mentionnée dans le communiqué, mais l'éolienne 8 MW promue par Areva donne également lieu à de sérieux doutes techniques, sachant que cette machine n'a encore jamais dépassé le stade, théorique, du croquis. Ce point a d'ailleurs valu à Jérôme Pécresse, président d'Alstom Renewable Power, d'interpeller Luc Oursel, PDG d'Areva, lors de l'annonce des résultats de l'appel d'offres : c'est un pari "audacieux" qu'"il faudra concrétiser" a-t-il déclaré non sans ironie.

Le juge est donc également tenu d'examiner les 8 autres critères pour lesquels WPD met en doute la notation de la CRE. En attendant le verdict, qui doit être rendu sous vingt jours, l'attribution du parc est toujours entre parenthèses.

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Ancien ingénieur financier, je travaille actuellement dans ce domaine et souhaite rendre compte de mes connaissances et de mes analyses en ligne, via un contenu pédagogique sans être simpliste.

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