Le temps qu’il nous reste (1/2)

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Par Charles Sannat Modifié le 30 juillet 2012 à 12h19

Les Allemands pensent qu’ils seraient mieux sans l’euro.

C’est la grande nouvelle du week-end.

Si tout le monde veut sauver l’euro, enfin tout le monde, au niveau des grands chefs des pays européens, en ce qui concerne les peuples les choses sont légèrement différentes.

C’est ainsi que l’on apprend qu’une majorité d’Allemands pense que leur pays serait en meilleure situation sans l’euro, selon un sondage paru dimanche. Il est vrai que le ministre de l’Economie continue à faire part de ses doutes sur le maintien de la Grèce dans la zone euro. Cela n’aide pas. Selon l’hebdomadaire Bild am Sonntag, 51 % des Allemands pensent que l’économie de la première puissance européenne serait dans une meilleure situation sans l’euro et les « bras cassés » qui composent l’union monétaire, contre 29 % qui pensent que la situation serait pire.

Quant au sort de la Grèce, 71 % de nos amis germains souhaitent que la Grèce sortent de la zone euro si elle ne tient pas ses promesses d’austérité... Cela va être difficile.

Le ministre allemand de l’Economie, Philipp Roesler (toujours) estime qu’il y a « des doutes considérables sur le fait que la Grèce tienne ses promesses de réformes »... Cela n’aide pas.

Et de continuer notre cher ministre allemand (qui est l’un des seuls officiels dont les propos restent encore crédibles): « la mise en œuvre est hésitante ». Aucune administration fiscale fonctionnelle n’a encore été mise en place. En outre, il n’y a eu pratiquement aucune avancée dans la privatisation des biens publics promise. Pour rajouter un peu d’ambiance et de piment, il conclut en affirmant que « si la Grèce ne remplit pas ses obligations, il n’y aura plus d’argent. Le pays sera alors insolvable »...

Cela n’est pas gagné en Grèce, mais alors pas du tout ! Mais, pour remonter le moral des troupes (c’est-à dire les mougeons), Rome a promis, avec Berlin et Paris, de tout faire « pour protéger la zone euro ». Cela arrive après les déclarations de Mario Draghi qui avait dit que lui aussi ferait tout le nécessaire et qu’il fallait bien être conscient que ce « serait assez ».

Tout cela laisse une impression de déjà-vu.

Tout le monde est d’accord pour faire tout ce qu’il faut, mais dès qu’il faut concrètement le faire, plus personne n’est joignable et les choses se délitent.

Tout le monde sait ce qu’il faut faire. Imprimer des billets en masse pour éloigner tout spectre d’insolvabilité. Cela aura comme dégât collatéral une inflation plus ou moins incontrôlée. Cela fait cinq ans que les Allemands refusent cette solution. Pourquoi l’accepteraient-ils maintenant ? Cela n’a pas grand sens.

Là encore je suis rassuré, soyez informé qu’une rencontre des deux dirigeants (allemand et italien) à Berlin est prévue dans la deuxième moitié du mois d’août, à l’initiative de Mme Merkel !

Finalement toutes ces déclarations restent des déclarations de principe, sur lesquelles on ne peut qu’être d’accord.

La zone euro prépare une intervention rapide.

Pour que nos petits mougeons passent de bonnes vacances à Palavas les Flots, au camping municipal (j’adore le camping mais plutôt ailleurs qu’en Méditerranée au moins d’août), nos grands vizirs veillent et justement ils ont décidé de sortir l’artillerie lourde. Attention. On « FERA-TOUT-CE-QUI-EST-NECESSAIRE ».

Le FESF n’a encore jamais été utilisé pour racheter de la dette sur les marchés. Il peut agir en théorie sur le marché primaire ou secondaire. Peu importe qu’il y est statut bancaire ou pas, que ce soit pour le FESF ou le MES. L’idée, c’est qu’au bout du bout, la BCE devra imprimer des euros, les mettre dans ce fonds, qui pourra alors acheter de la dette primaire, secondaire ou tertiaire peu importe.

Il faut que la Banque Centrale imprime des billets pour racheter de la dette, ce qui veut dire, vous l’aurez compris, que la BCE doit monétiser. Voilà la seule et unique intervention rapide et crédible. En disant cela je ne soutiens pas fondamentalement la création monétaire débridée. Cependant j’affirme, qu’en l’absence de toute croissance voire même de « décroissance », l’enchaînement récession/austérité amène tout droit à l’insolvabilité et à l’effondrement de notre système. L’utilisation de la planche à billets, conduira inéluctablement à l’érosion massive de la valeur des monnaies, à la refonte du système monétaire internationale, à de grosses difficultés économiques, mais pas d’effondrement généralisé à court ou moyen terme.

Angela au Tyrol...

D’après un article du Figaro, (que je trouve bien meilleur dans l’opposition que lorsqu’il est pour la majorité mais ceci n’engage que moi bien-sûr), « l’heure est suffisamment grave en zone euro pour que l’on dérange la chancelière Angela Merkel pendant ses vacances, dans le Tyrol. Et pour que Washington dépêche le secrétaire américain au Trésor Tim Geithner dès lundi sur l’île allemande de Sylt en mer du Nord, où le ministre des Finances passe son été » Rien que ça !

Pour Mario Draghi, il faut obtenir une intervention d’envergure sur les marchés pour voler au plus vite au secours de l’Espagne et de l’Italie, étranglées par des taux d’intérêt prohibitifs, sans attendre l’arrêt décisif de la Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe, le 12 septembre...

Et oui la maison brûle, mais pour le Mougeon, tout va très bien. Le problème c’est que Schäuble dément tout rachat de dette espagnole. Alors la BCE pourrait agir seule, comme elle l’a fait dans le passé, en rachetant 220 milliards d’euros de dettes grecque, irlandaise ou portugaise sur le marché secondaire. Le problème c’est que cela n’est pas dans son mandat, certes, mais surtout c’est trop risqué pour son bilan, la BCE étant une entreprise « presque » comme les autres.

L’économie américaine en perte de vitesse

Pendant ce temps aux Etats-Unis la situation ne s’améliore pas vraiment. Les ventes au détail reculent depuis trois mois tandis que la hausse des carnets de commandes est la plus faible depuis le début de la reprise. L’expansion de l’économie américaine a ralenti et tout laisse croire qu’elle ne retrouvera pas de second souffle en deuxième moitié d’année, quelle que soit l’initiative que pourrait prendre la Réserve fédérale. Et quoiqu’en disent les deux candidats à la présidentielle américaine.

Le produit intérieur brut réel américain a progressé de 1,5 % en rythme annuel, d’avril à juin, selon l’évaluation préliminaire du Bureau of Economic Analysis (BEA). Le problème, c’est qu’une croissance du PIB obtenu avec 3 % d’inflation cela fait en réalité une récession de 1,5 %. Comme en plus il a fallu faire entre 8 et 1 0% de dettes sur PIB supplémentaire on peut dire qu’aux USA la récession est d’environ 9,5 % à 11,5 %.

On a donc de la marge avant le retour de la vraie croissance. . . De plus dans l’espèce de dernier hoquet pseudo positif de leur PIB, une grande partie est liée à la reconstitution des stocks, ce qui n’est jamais très bon. Il y a aussi des importations plus importantes que les exportations de sorte que le commerce international a freiné l’expansion, ce qui n’avait pas été le cas souvent depuis le début de la reprise. Sans oublier que durant le deuxième trimestre, l’économie a créé en moyenne 75 000 emplois par mois, contre 226 000 durant l’hiver.

D’autres indicateurs récents en inquiètent plus d’un, comme par exemple la chute de 8,4 % des ventes de maisons neuves en juin alors que les données des mois précédents semblaient indiquer que le marché de l’habitation était sorti enfin de sa longue léthargie. . . effet Facebook, vous vous souvenez ? Quelques milliers d’actionnaires qui allaient être riches grâce à la plus belle introduction « pourrie » de la décennie. Il suffit dans un marché ultra déprimé à tirer un peu les prix et à booster un peu le secteur. Quand on regarde du côté des ventes au détail, elles reculent depuis trois mois tandis que la hausse des carnets de commandes est la plus faible depuis le début de la « reprise ».

Montebourg descend d’un ton

Et voilà! ! Après le psychodrame, le rabibochage et bientôt les câlins ! En effet, le ministre du Redressement productif s’est montré soucieux, vendredi, d’apaiser les choses au sujet de Peugeot. Je peux maintenant lui donner du Monsieur le Ministre si le verbe s’éloigne de la rhétorique des camarades commissaires ! «Je ne veux pas polémiquer avec Philippe Varin (président de PSA). Les choses ont été dites.» «Pour moi, un emploi sauvé, c’est déjà une fierté». Mon passage préféré est le suivant: «c’est une lutte épuisante et difficile» ! Mon pauvre camarade, si au bout de 2 mois vous êtes déjà fatigué du redressement productif, je n’ose imaginer votre état dans cinq ans.

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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