Fashion Pact : greenwashing puissance 7 ?

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Par Rédaction Modifié le 27 août 2019 à 16h09
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@shutter - © Economie Matin

Le Fashion Pact adopté ce week-end en marge du G7 a vu trente des principaux acteurs du monde de l’habillement prendre des engagements en faveur du climat, de la biodiversité et des océans. Mais que pèse vraiment une telle initiative ?

Voilà des années que la cause environnementale figure au programme des grands sommets internationaux. Avec les incendies qui ravagent actuellement l’Amazonie, elle est devenue le point de focalisation des dirigeants des pays les plus riches réunis ce week-end à Biarritz dans le cadre du G7. La sauvegarde de la planète est également l’objet d’un certain nombre d’initiatives prises en périphérie du sommet, à l’image de la déclaration adoptée par plusieurs représentants du secteur de la mode sous le nom de Fashion Pact.

L’affaire remonte au dernier Sommet de la Terre, à l’issue duquel Emmanuel Macron a chargé François-Henri Pinault de réfléchir à une charte environnementale pour les acteurs de la mode. Chargé de réunir au moins 20% des entreprises du secteur, le patron de Kering aura finalement convaincu 30% des acteurs visés. Cette coalition un peu partout qualifiée d’ « historique » s’est mise d’accord autour de trois objectifs : éliminer le plastique à usage unique d’ici 2030, privilégier une agriculture régénérative, favorable au bien-être animal, et n’utiliser que des énergies renouvelables d’ici 2030. On se réjouira de cette prise de conscience de la part d’une industrie, certes prospère, et qui rapporte énormément à un pays comme la France, mais qui se classe au deuxième rang en termes d’impact sur la planète. Rien que pour les émissions de carbone, la mode pèse plus que les vols internationaux et le trafic maritime réunis.

Problème : le périmètre de l’engagement de la neutralité carbone n’est pas défini, ou alors à horizon 2050. Concernant les océans, la réglementation française a déjà pour objectif d’interdire le plastique à usage unique en 2020, et l’Europe en 2021. S'agirait-il donc de déclarations d’intention ? L’aspect solennel et spectaculaire de cette prise de conscience, dans un décor grandiose et officiel, cache, comme souvent, des engagements finalement pas si révolutionnaires. Comme le souligne le journal La Croix, les mesures présentées ont pour caractéristique d’être floues, peu contraignantes, ou non définies dans le temps. D'ailleurs, elles n’ont pas convaincu les représentants d’ONG en pointe sur ces sujets, qui constatent avec fatalisme que certaines marques du secteur continuent d’agir en contradiction flagrante avec des engagements passés.

Que valent de tels engagements ? Et s’il n’était pas contre-productif de communiquer sur sa volonté de changer le monde dans un cadre où, on le sait bien, les grandes promesses aboutissent généralement à des avancées peu significatives ? Le bruit qui ne manquera pas d’entourer ce pacte est à comparer avec le travail concret d’une créatrice comme Stella McCartney qui, depuis des années, agit contre l’utilisation de matières d’origine animale et pour un habillement respectueux de la planète, servant de modèle à tout un pan de l’industrie.

Et quel crédit accorder à un pacte adopté sans l’un des principaux noms du secteur ? L’absence du numéro un du mondial du luxe, LVMH, n’a pas manqué d’interpeller. Du côté de LVMH, on estime qu’on n’a pas besoin de tout ce décorum pour adopter des mesures concrètes. Il faut dire que le groupe s’est doté d’une division Environnement il y a vingt-cinq ans déjà et a récemment passé un partenariat avec l'Unesco.

Finalement, à qui peut bien servir un tel pacte sinon à ceux qui le signent ? Les militants de la cause environnementale dénoncent depuis longtemps sous le terme de greenwashing les initiatives adoptées par des entreprises polluantes pour faire oublier les effets de leurs activités. Aujourd’hui, l’écologie est devenue une cause tellement populaire (et incontestable), qu’elle n’est plus seulement un moyen de masquer ses propres turpitudes, mais un passage obligé dans la communication des entreprises et de leurs dirigeants. Au point qu’on peut se demander si ce genre de plateformes savamment médiatisées ne sert pas avant tout à ses promoteurs à se racheter une bonne conscience.

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