J-30 avant la fin du monde !

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Par Charles Sannat Publié le 22 novembre 2012 à 13h59

Bon, au moment où j’écris ces lignes, nous sommes le 21 novembre 2012. Cette date me rappelle furieusement qu’il ne nous reste plus qu’un mois avant la fin du monde annoncée par les Mayas.

C’est important la fin du monde. Cela n’arrive qu’une seule fois dans une vie. Ce qui est bien avec la fin du monde, c’est que je vois d’ici le direct non-stop de BFM TV. Ils sont forts chez BFM TV. On se retrouve au cœur de l’actualité. Qu’est-ce qu’on va s’amuser. Je ne sais pas ce que vous avez prévu, vous, pour la fin du monde. Il y en a plein qui se préparent des soirées « picole » entre amis. Donc ma première prédiction pour le 21 décembre 2012, c’est que les forces de l’ordre risquent d’avoir pas mal de boulot au niveau de l’ivresse sur la voie publique.

Alors que va-t-il se passer le 21 décembre ? Rationnellement a priori rien du tout. Il y a bien un astéroïde qui pourrait frapper notre planète, mais ce ne sera pas avant février ou mars 2013. Non, je crois plus prosaïquement qu’il ne va rien se passer à moins, à moins que la Grèce ne soit frappée directement par un « fiscal cliff » US. Depuis que les Américains piratent les ordinateurs de l’Elysée, il faut s’attendre à tout de leur part.

Autre scénario possible : nos « grands amis depuis des siècles » allemands décident de ne pas aider la Grèce, ce qui est plausible vu l’empressement de la grosse Berta, heu pardon, de la belle Angela à secourir nos grands amis espagnols et bien sûr de sortir son carnet de chèques pour une donation à nos non moins grands amis grecs. Ce qui est sûr, c’est que nous sommes tous de grands amis. Ça ne se voit pas, mais qu’est-ce qu’on le dit ! Cela rassure les foules.

Effectivement, si les chèques ne sont pas faits, cela risquerait de provoquer quelques menus remous. Faire coïncider ce moment avec le 21 décembre me semble une excellente idée. Nos grands mamamouchis pourraient dire tous en cœur, « on y est pour rien, c’est la faute des Mayas ». Et c’est là que la manœuvre devient carrément brillante. Car, pour une fois dans l’histoire de l’humanité, on pourrait accuser un bouc émissaire déjà mort depuis longtemps. « Les Mayas sont des enfoirés ! À bas les Mayas (ça rime) », ou encore « À mort les Mayas »… On pourrait laisser se déverser la colère populaire sur des Mayas disparus depuis plus de 1 000 ans. GÉNIAL !

Bon, sinon, on peut imaginer un krach à Wall Street. Vous savez, la bourse américaine. Une espèce de machin maintenu en lévitation depuis plusieurs années à force d’injections massives de liquidités par la Banque centrale américaine. Tiens, d’ailleurs, à propos de Banque centrale américaine. La FED a été créée en 1913 avec un bail de 99 ans… qui arrive à expiration, je vous le donne en 1 000 (dollars),… le 21 décembre 2012 !! Eh oui, vous ne le saviez pas ça. Ça vous en bouche un coin, j’en suis sûr.

Et là, vous allez tout de suite comprendre où je veux en venir. À propos de la lévitation des marchés maintenus en réanimation dans leur coma dépassé, imaginez que la FED soit autodissoute le 21/12/12, dès le 22, plus d’argent gratuit à pas cher à volonté. Et là, boum badaboum, l’effondrement, « the collapse » comme disent nos amis anglo-saxons. J’adore ce mot « collapse », il sonne tellement fin du monde.

Bon, pour ceux qui auront très peur le 21 décembre, vous pouvez aller vous réfugier dans le bled de Bugarach, quelque part dans le sud de la France. Un certain nombre d’élus se sont déjà réunis là-bas, car c’est le seul endroit de notre pays qui sera épargné. Comprenez par-là que si toute l’économie s’effondre, le distributeur automatique de la Banque Postale continuera à fonctionner uniquement à Bugarach. Autre certitude, les gendarmes de ce village ne vont pas chômer la nuit du 21… Ce n’est pas gagné.

Non, non, mes chers contrariens, il faut savoir être sérieux voyons. Vous l’aurez compris, tout ceci n’est qu’ironie et second degré. Quoique, à défaut de fin du monde, nous pourrions tout de même connaître quelques vicissitudes concernant notre modèle économique. L’idée c’est de dire que ce ne serait pas la fin « du » monde mais la fin « d’un » monde.

D’ailleurs, il faut noter, car c’est important, que cela porte le doux nom de « risque systémique ». Oui, on ne vous dira pas « effondrement total des structures qui vous entourent et du monde tel que vous le connaissiez », mais « risque systémique ». C’est légèrement moins effrayant que « fin du monde », or, vous le savez bien, il ne faut jamais, JAMAIS effrayer les foules. Alors là, question que tout le monde se pose : est-ce que le risque systémique va se matérialiser le 21 décembre 2012 ? Ma réponse est très simple : comment voulez-vous que je le sache !! Voyons. Je ne suis pas Sannatradamus… Quoique, moi aussi je peux écrire quelques quatrains.

« En ce jour de malheur

Viendra le 21 du dernier mois

L’ancien qui prit fin

Et le nouveau qui fut créé… »

Voilà une belle prophétie… et je laisse les exégètes méditer et analyser cette prose. Sinon, ce qu’il faut bien retenir, c’est que depuis cinq ans nous n’avons réglé aucun de nos problèmes. Strictement aucun. Nous avions un problème de dette, nous avons encore plus de dettes. Nous n’avions pas de croissance, nous n’avons toujours pas de croissance. Nous avions des problèmes environnementaux, nous n’avons même plus de banquise l’été (bien que je n’ai pas vu le niveau de l’eau monter par chez moi, je me demande où sont passés les glaçons fondus). Nous n’avions pas de gouvernance européenne, nous n’avons toujours pas de gouvernance européenne puisqu’ils ne réussissent jamais à se mettre vraiment d’accord sur quelque chose.

Mario Draghi devait nous faire voir ce que nous allions voir, et nous n’avons toujours rien vu. Ben Bernanke, le grand chef de la FED qui sera autodétruite dans trente jours, eh bien même lui n’a plus trop le moral depuis qu’il a enfin compris que ses QE ne servaient à rien. Mais le QE, c’est comme le communisme. Ce n’est pas le communisme qui a un problème nous expliquait le Politburo, c’est parce que nous ne sommes pas allés assez loin dans le communisme. Il faut donc plus de communisme. Et hop, une ‘tite purge. Idem avec les QE. Si les QE ne fonctionnent pas, c’est qu’ils ne sont pas assez forts. Il faut donc encore plus de QE. Nous avions Obama, nous avons toujours Obama…

Bref, vous l’aurez compris, le risque systémique est plus que jamais présent même si personne ne vous en parle. Voire même des fois on vous dit l’inverse en vous expliquant que le pire de la crise est derrière nous. Vous pouvez le croire… Ou pas. Personnellement, je me classe sans ambiguïté dans la catégorie des « ou pas ».

Pour ceux qui ont lu Le cygne noir de Taleb, il faut bien comprendre que l’histoire du monde est façonnée par les événements extrêmes. C’est une réalité historique. Les événements « normaux », dans la « moyenne » ou « prévisibles » n’ont aucune importance. Or le risque systémique est un risque extrême, qui n’a jamais eu autant de chance de devenir réalité.

D’ailleurs, j’ai été particulièrement surpris de lire le dernier compte rendu de l’audition du directeur de l’IRSN (la sécurité nucléaire en France) qui expliquait, devant une commission d’enquête, que nous devions nous préparer aux risques extrêmes, car les risques dits normaux, nous avons des procédures pour cela. Et que l’on peut penser que s’il y a un accident nucléaire grave dans notre pays, ce sera en raison d’événements extraordinaires et imprévisibles. Et si nous aussi nous faisions face à un tsunami ?

Cette prise de conscience des plus hautes autorités me semble pour une fois… rassurante. Alors imaginez maintenant que le 21 décembre 2012 soit bien la fin du monde tel que nous le connaissons. Que nous assistions à la matérialisation du risque systémique. Que la Grèce sorte de l’euro, que l’Allemagne ne paie pas, que les USA se tombent de la muraille fiscale, qu’Israël attaque l’Iran, que le baril de pétrole soit à 300 dollars, et qu’il y ait des ruptures d’approvisionnements, que les banques s’effondrent (pour Dexia c’est déjà fait), bref, imaginez que toutes ces choses parfaitement plausibles se réalisent… comment vous seriez-vous préparé à tout ça ?

Mais rassurez-vous, ce ne sera pas la fin du monde, et si je me trompe, de toute façon, plus personne ne sera là pour m’en faire le reproche alors que si je dis l’inverse…

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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