Dis-moi combien tu gagnes et je te dirais qui tu hais…

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Par Jean-Louis Caccomo Publié le 2 octobre 2014 à 3h38

Les conflits récurrents - qui témoignent d'une panne évidente du « dialogue social » auquel nous croyons tant - sont l'occasion de voir, à chaque manifestation, les catégories sociales brandir ou dénoncer le revenu "scandaleux" du voisin. Et les instituteurs de comparer leur revenu à celui des professeurs de collège, et les professeurs de lycée de comparer leur revenu à celui des professeurs d'université, et les infirmiers de comparer leur revenu à celui des médecins...etc. On ne peut pas dire que ces comportements soient le signe d'une cohésion sociale affirmée.

Mais surtout, quand on veut gagner le revenu d'un médecin, il faut réussir ses longues études de médecine. On ne peut pas vouloir faire des études d'infirmier -- moins exigeantes que des études de médecine - pour avoir ensuite la prétention de revendiquer le revenu d'un médecin.

En fait, la redistribution, non seulement démotive les producteurs de richesse, mais attise la jalousie. Ce n'est donc pas un hasard si c'est dans le pays où la redistribution – au nom du culte de l'égalité à tout crin -- est la plus avancée que les conflits sociaux sont permanents. Comment peut-on encore parler de modèle ?

Mais j'irai encore plus loin au risque de me faire encore plus d'ennemis.

On prend pour acquis intangible - voire principe absolu - qu'un instituteur A devrait gagner autant qu'un instituteur B, qu'un chercheur A devrait gagner autant qu'un chercheur B, sans prendre en compte les différences de talents, de motivation ou d'implication. Mais, en faisant cela, on ne reconnait pas la valeur individuelle, on paye un statut.

Alors certains se plaignent régulièrement, arguant du fait qu'ils « sont mal payés ». Mais mal payés par rapport à qui, par rapport à quoi ? De plus, ne fallait-il pas y penser avant ? Tout ce qui est rare est cher. Il en va de même pour la valeur du travail. Quand on veut être bien payé, on s'engage dans des formations qualifiantes qui débouchent sur des perspectives de carrière gratifiante. Mais souvent, ces formations font peur aux étudiants car elles sont jugées difficiles et sélectives.

On ne peut pas ne pas vouloir faire d'études longues ou qualifiantes mais être payé comme un docteur ou un ingénieur. Par ailleurs, l'argument qui consiste à dire « je suis sous-payé dans mon travail » peut tout aussi bien se discuter. En effet, en économie, on montre que l'on s'aperçoit que l'on est sous-payé par son employeur lorsqu'un autre employeur vous fait une proposition plus intéressante.

Certains de mes collègues chercheurs me disent qu'ils sont mal payés par rapport à nos homologues américains, ce à quoi je réponds : « Tu as raison mais une université américaine t'a-t'elle fait une proposition plus intéressante ? ».... Après un silence gêné, il me répond « Non ». Alors tu n'es peut-être pas si mal payé ici.

Encore une fois, on ne peut pas gagner sur tous les tableaux. Les universités américaines vont faire des propositions mirobolantes aux meilleurs chercheurs du monde entier, mais pas à tous. A l'échelle internationale, aucun chercheur (comme aucun footballeur) ne gagnera le même revenu tout simplement parce que le revenu sanctionne les différences de qualifications, talents et compétences. C'est une loi économique fondamentale que nous n'avons toujours pas compris en France. Mais au nom de quel principe, une partie de la population active devrait échapper à cette loi ?

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Jean-Louis Caccomo est docteur en sciences économiques de l'université de la Méditerranée Maître de conférences - HDR à l'IAE de l'université de Perpignan Via-Domitia. Il est également spécialiste des questions d'innovation et de croissance économique ainsi que chercheur en tourisme international et chroniqueur économique. Il anime enfin, depuis 10 ans, un blog à vocation pédagogique à l'attention de ses étudiants et du grand public.

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