Le libre choix de l’assurance de prêt : 10 ans de fausses promesses

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Par Astrid Cousin Modifié le 23 mars 2023 à 9h54
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50%D'après une étude de Securimut, face aux demandes de changement d'assurance emprunteur, dans 50% des cas les banques répondent hors délai.

Cela fait maintenant 10 ans que tous les emprunteurs ont la liberté de choisir une assurance de prêt externe à celle de la banque. En moyenne 15.000 euros d’économies sont à la clé, en faisant simplement jouer la concurrence. Ce levier pour faire baisser ses mensualités permet aux propriétaires de conserver davantage de pouvoir d’achat. Une décennie plus tard, ce qui devrait être une évidence est loin de l’être. : faire valoir ce droit à la déliaison de l’assurance du prêt peut coûter à l’emprunteur une remise en question de son projet de financement par son conseiller bancaire. Malgré une législation qui se positionne en faveur de l’emprunteur, les pratiques illégales des banques persistent.

10 ans de législation en faveur de l'ouverture du marché à la concurrence

Pendant des décennies, la banque détenait le monopole du marché de l’assurance de prêt. Ils ont ainsi pu équiper tous leurs crédits immobiliers de leur contrat groupe, aux tarifs qu’ils souhaitaient, sans concurrence existante. Depuis 10 ans, l’arsenal législatif a permis une libéralisation du marché, tout du moins en théorie :

En 2010 avec la loi Lagarde : L’emprunteur se voit libre d’accéder aux offres des concurrents en couvrant son crédit d’un contrat externe à celui de la banque prêteuse ; : c’est la déliaison entre l’assurance et le crédit. Les assureurs profitent de l’aubaine et viennent braconner sur ce qui était jusque-là la chasse gardée des banques : offres segmentées, accessibles à tout un chacun, à des tarifs hyperconcurrentiels.

En 2014, avec la loi Hamon : constatant que le marché peine à se libéraliser et que les tarifs bancaires sont toujours aussi prohibitifs, une nouvelle arme législative vient renforcer le droit de l’emprunteur de délier son assurance de prêt en lui offrant la possibilité de changer de contrat durant sa première année de vie : la loi Hamon est née. Là encore, le raz de marée attendu n’a pas lieu : le législateur se rend compte que 12 mois pour changer de contrat, dans la vie d’un jeune propriétaire, c’est trop juste et manquent cette unique fenêtre de tir, se retrouvant ainsi prisonniers durant toute la durée de leur prêt d’une assurance plus imposée que choisie.

En 2017, avec l’amendement Bourquin : Fort de ce constat, le sénateur Bourquin œuvre pour donner la possibilité à tous les emprunteurs de changer de contrat chaque année à date d’anniversaire. C’est la libéralisation totale du marché de l’assurance de prêt qui permet à tous ceux qui auraient loupé le coche de pouvoir se délester de leur contrat groupe bancaire au profit d’un autre, tout aussi couvrant -voire plus-, et deux à trois fois moins cher. Désormais, tous les emprunteurs sont concernés et les économies à la clé convainquent rapidement une partie d’entre eux de passer à l’action.

Des pratiques douteuses sous fond de taux de crédit très bas

Dans un environnement de taux d’emprunt très bas, il est peu probable que la banque abandonne un produit d’assurance sur lequel elle marge jusqu’à 80%. L’intervention de la banque dans chaque crédit octroyé lui laisse l’avantage de pouvoir imposer son contrat au moment de la signature du prêt mais aussi de veiller à ce que son client ne change pas d’avis l’année suivante. Malgré la législation, les établissements prêteurs ont continué à vendre « de force » un maximum de contrats groupe en pratiquant des tarifs 2 à 3 fois supérieurs à la concurrence, sans jamais en être inquiétés.

Plus grave encore, certains établissements (Banque Populaire, Caisse d’Épargne, Banque Postale) ont décidé de proposer des contrats d’assurance aux tarifs dégressifs, leur permettant de faire payer le prix fort à l’emprunteur les premières années du crédit pour anticiper une sortie future. Ce montage plutôt courant lui coûte très cher et le pire, c’est qu’il n’y voit que du feu.

Bien heureusement, si la banque prêteuse réussit à imposer son contrat, l’emprunteur peut en changer. Mais là encore, la supercherie continue et les stratagèmes mis en place par les établissements prêteurs pour ne pas voir leur client s’en aller à la concurrence ont été nombreux.

Dans sa dernière étude datant de juillet 2020, Securimut explique qu’en moyenne, malgré leur intervention, un emprunteur sur 4 abandonne les démarches face à des banques qui répondent dans 50% des cas hors délai. Ils énumèrent d’ailleurs tous les blocages courants :

- Objections erronées en vue d’intimidation
- Doubles prélèvements
- Dérogations tarifaires discrétionnaires
- …

Tout est bon pour faire reculer un particulier.

Chez Magnolia.fr, chaque demande de résiliation nécessite une ou plusieurs interventions humaines, c’est un vrai travail d’expertise qui demande beaucoup de patience et de temps. Mais, les efforts finissent toujours pas payer ! Aujourd’hui, ce sont 85% des demandes de changement d’assurance de prêt qui sont acceptées ! Une victoire puisque depuis 2018, chez Magnolia, ce sont 10.000 emprunteurs qui ont profité de leur droit à la résiliation annuelle et ainsi pu récupérer 80 millions d’euros de pouvoir d’achat.

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Astrid Cousin est porte-parole de Magnolia.fr, spécialisé depuis 5 ans dans l'analyse du marché de la distribution de produits bancaires et assuranciels. Aujourd'hui experte en assurance emprunteur, elle appréhende les enjeux comme les tendances spécifiques à la délégation d'assurance.

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