Non-dits et vices de la loi sur l’economie sociale et solidaire

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Par Stanislas de Bentzmann Modifié le 12 novembre 2014 à 7h01

CroissancePlus confirme son opposition aux articles 19, 20 et 98 de loi sur l'Economie Sociale et Solidaire.

Il ne s'agit pas ici de remettre en cause le principe d'une possible reprise de l'entreprise par tout ou partie de ses collaborateurs, s'ils en ont les compétences et les financements.
Toutefois, imposer une nouvelle contrainte par une disposition législative bancale et créatrice d'insécurité juridique est extrêmement dangereux.
La cession est un moment critique dans la vie d'une entreprise. Toute modification de la législation sur de telles opérations nécessite une extrême précision, et une prise en compte réaliste du fonctionnement de l'économie. Pour les multiples raisons énumérées ci-dessous, le dispositif législatif d'information des salariés contenu dans les articles précités de la loi ESS ne correspond visiblement pas à ces exigences.
CroissancePlus a donc sollicité ses adhérents entrepreneurs et partenaires, qui ont participés à l'élaboration de ce document.

Sur les textes d'application :
Quelle est la valeur juridique du guide « droit d'information préalable des salariés ? »

Sur la temporalité :
Le préavis d'information doit-il être donné 2 mois avant le signing ou 2 mois avant le closing ? Quelle est la procédure de calcul du délai ? Faut-il prendre en compte les ouvrables, ouvrés, féries ?
Que se passe-t-il si le signing ne vaut pas promesse de vente ?
Le point de départ du délai de deux mois pour les entreprises de moins de 50 salariés n'est pas clair. Que signifie « lorsque le propriétaire veut céder » ?
Quel est le délai et quelle peut être la forme du recours d'un salarié?
Que signifie exactement « publication » pour la cession de contrôle d'une entreprise ? Ce cas de figure implique-t-il l'application de ce texte ?
Les rédactions de la loi, du décret et du guide étant tellement imprécises, le calcul du délai de trois mois à compter de la publication de la loi n'est pas clair.
En effet, et au regard de la parution au Journal Officiel, celle-ci s'applique-t-elle dès le 1er novembre 2014 ou à compter du 2 novembre 2014 ?
Quid des actes de cession sous conditions suspensives signés avant l'entrée en vigueur du dispositif, dont les conditions suspensives seraient levées après l'entrée en vigueur du dispositif et dont le transfert de propriété serait réalisé à cette date
Quid du point de départ du délai de l'action en nullité en cas de cession de droits sociaux non soumise à publicité ?

Sur la qualification de « cession » :
Les dispositions légales font référence à des cessions. Quelle est la définition juridique du terme « cession » et qu'englobe-t-il comme type d'opérations ? La cession se définit comme la transmission entre vifs, du cédant au cessionnaire, d'un droit réel ou personnel, à titre onéreux ou à titre gratuit. (Cornu, Vocabulaire juridique, 2008). La question se pose de savoir si les opérations de fusions, scissions et apport partiel d'actif soumis au régime juridique des scissions ou les opérations d'apport sont susceptibles d'être assimilées à une cession ?
Qu'en est-il des cessions de contrôle en plusieurs étapes ? (Par exemple 3 cessions de 33% par un ou des actionnaires)
Le dispositif s'applique-t-il en cas de démembrement de propriété ?
En cas de scission de l'entreprise, et non de cession, l'entreprise change également de propriétaire. La procédure prévue dans la loi s'applique-t-elle ?
Comment procéder en cas d'augmentation de capital entrainant un changement de contrôle?
Comment procéder en cas d'opération mixte incluant une cession minoritaire et/ou une scission et/ou un apport partiel et une augmentation de capital et incluant un changement de contrôle par un actionnaire ou un bloc d'actionnaires ?
Comment définissez-vous la notion de bloc majoritaire dans ce cadre ?
En cas de holding, que faire en cas de cession de plus de 50% sans changement du bénéficiaire économique "controlant" ?
Qu'en est-il des fusions ou acquisitions par échange de titres ? Y-a-t-il "cession" ? Si oui dans quel cas précisément?
Le pacte Dutreil, visant à faciliter les transmissions intrafamiliales, est-il concerné par ce dispositif ? Comment avez-vous pris en compte la transmission à titre gratuit ?
Est-il prévu une exception pour les cessions intra-groupe ?
Ces dispositions s'appliquent-elles en cas de cessions conjointes ou rapprochées par plusieurs cédants de participations inférieures individuellement à 50% du capital de la société cédée mais représentant, prises ensemble, plus de 50% du capital ?
Le guide assimile l'apport à la cession. Toutefois, cette position est extrêmement contestable. Dans un cas il y a un prix (vente), dans l'autre il y a remise de droits sociaux en échange (apport). Quelles sont vos explications ?
Une cession de la nue-propriété de titres rentre-t-elle dans le champ de la loi ?
Pour les valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital, faut-il raisonner en capital potentiel ? Une obligation convertible n'est pas nécessairement convertie. Les choses sont plus certaines avec une Obligation Remboursable en Action, car l'obligation deviendra nécessairement une action.
Si l'on cumule actions, parts sociales et valeurs donnant accès à la majorité du capital, que se passe-t-il?

Sur la qualification de « salarié »
Quels sont les « salariés » habilités à s'exprimer au moment de l'information ? Les personnes en CDI ? CDD ? Alternance ? Les apprentis ? Les stagiaires ?
Que se passe-t-il en cas d'absence de longue durée d'un salarié, par exemple à l'occasion d'un congé de maternité, d'un congé maladie, ou encore d'un congé sans solde ?
Que se passe-t-il si le salarié est en période de préavis, ou en période d'essai qui se termine avant la fin des deux mois?
Les collaborateurs en portage salarial sont-ils concernés ?
Un salarié en procédure de rupture conventionnelle ou de licenciement est-il concerné ? Ne peut-il pas se servir de la signature d'une feuille d'information comme d'un moyen de pression sur son employeur ?

Sur la territorialité de la mesure :
Que se passe-t-il si le salarié dépend d'une filiale d'entreprise étrangère implantée en France ?
Que se passe-t-il si le salarié dépend d'une filiale d'entreprise française implantée à l'étranger ?
Quid de la cession à une entreprise étrangère, par exemple d'une filiale française à une entreprise allemande par une entreprise américaine ?
Sur l'état financier de l'entreprise :
Que se passe-t-il si la société est en cessation de paiement dans les 2 mois suivant l'information aux salariés ?
Est-il possible de réduire le délai d'information, notamment en cas de problème de refinancement ?
Quid de l'information en cas de procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire ?

Sur la nature de l'entreprise
Qu'en est-il des entreprises cotées en bourse et du respect droit boursier (délit d'initiés)?
Dans le cas d'une société ayant plusieurs activités, et qui en cède une, qu'en est-il des cessions d'actifs ? Doit-on informer les salariés de l'entité vendue ou tous les salariés ? Que faire des collaborateurs dont le périmètre de travail n'est pas concerné par l'opération ?
Comment faire pour des petits groupes avec une société de tête et une ou des filiales, en cas de cession de la société de tête ?
Faut-il informer les salariés de la société de tête ou du groupe en entier?
L'obligation d'informer les salariés au moins deux mois avant la cession s'applique-t-elle à des sociétés de moins de 50 salariés qui ne sont pas des PME ? (ex. holding de groupes importants)
Comment calculer les seuils des PME entre 50 et 249 salariés? La loi ESS n'explique pas comment les seuils applicables à la définition de PME s'appliquent en cas de groupe de sociétés. Les apprécie-t-on sur une base consolidée au niveau du groupe ou au niveau de la seule société dont les titres sont cédés ?
Quid pour les cessions de fonds de commerce partielles : Comment apprécier les seuils (entreprises de moins de 250 salariés) par rapport à l'effectif total de l'entreprise ou à celui affecté au fonds de commerce ?
Si un même propriétaire possède plusieurs fonds de commerce au sein d'une même structure juridique et qu'il décide d'en céder un, doit-il informer les collaborateurs de chacun des fonds ou seulement de celui concerné ?
S'il s'agit d'une société en commandite par actions, la cession de plus de 50% des actions ne conduit à rien : ce sont les commandités qui restent maîtres de l'affaire. Que se passe-t-il en l'espèce ?
Si un même propriétaire dispose de plusieurs franchises réunies au sein d'une même structure juridique, et qu'il souhaite céder un de ses établissements, doit-il en informer les collaborateurs de tous ses établissements ou seulement ceux de l'établissement concerné ?

Sur le contenu de l'information à donner aux salariés
Faut-il considérer que l'information communiquée aux salariés devrait être identique à celle fournie au comité d'entreprise ?
Quand le projet de cession existe mais que l'acheteur rencontre des problèmes de financement, faut-il en informer les salariés ?
Dans les entreprises de moins de 50 salariés : l'information doit-elle seulement porter sur la volonté du cédant de procéder à la cession et sur le fait que les salariés puissent présenter une offre d'acquisition (simple courrier). Ou faut-il communiquer des informations économiques précises ?

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Stanislas de Bentzmann est Président de CroissancePlus et cofondateur de Devoteam.

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