Les origines de la crise de la zone euro : la faute aux dépenses publiques ?

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Par Aloïs Navarro Publié le 25 juillet 2014 à 2h29

Les occasions ne manquent pas d'entendre un dirigeant politique incriminer les dépenses publiques comme l'élément ayant mis le feu aux poudres. Cependant, quand on s'attarde sur la chronologie et la séquence des événements ayant amené à la situation actuelle, l'endettement public n'est pas la cause initiale, mais bien la conséquence de la crise.

La crise de la zone euro est une crise de l'endettement privé (cf graphique 1), permis par des taux d'intérêt réels faibles, comme le reconnait Vitor Constancio, vice-président de la BCE .

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En effet, l'euro a conféré des taux d'intérêt allemands aux pays périphériques, alors que leur inflation (du fait que leur économie était en rattrapage, ce qui induit de la croissance mais aussi de l'inflation) était supérieure à celle de l'Allemagne. Les taux réels (qui sont les taux nominaux (ceux inscrits sur le contrat) moins l'inflation) étaient donc négatifs.

En clair, emprunter rapportait de l'argent ! Les investisseurs ont donc été conduits à s'endetter (vu que l'argent n'était pas cher). Le problème était alors que ces investissements ne nourrissaient pas des secteurs productifs et à forts gains de productivité, mais des secteurs à la forte rentabilité à court terme comme la construction par exemple, en Espagne notamment, débouchant sur des bulles spéculatives. Le crédit coulant à flot, la consommation des ménages augmenta, la demande intérieure également, ce qui accru les importations dans ces pays. Le déficit extérieur courant s'est alors élargi, amplifiant la dette extérieure.

Ainsi, P.Artus explique que la « La crise de la zone euro était donc initialement une crise de balance des paiements due à l'excès de demande privée ; elle est devenue une crise des dettes publiques due à l'excès de demande publique. »

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Contrairement aux européistes fous et obnubilés par leurs « illusions » supranationales qui pariaient sur la fin des crises de la balance des paiements, les pays périphériques de la zone euro ont subi de plein fouet ce que J.Pisani-Ferry pensait comme révolu en 1990 . En effet, de 1999 à 2008, l'épargne des pays du nord de la zone finançait les déficits extérieurs des pays du Sud. Avec la crise financière de 2008, il y eut ce qu'on appelle un « sudden stop », c'est-à-dire que les épargnants du nord ne voulaient plus financer les déficits du Sud. Ceci conduisit à une fragmentation des marchés financiers et à une nécessite pour les pays périphériques de procéder à une élimination de leur déficits extérieurs (qu'ils ne pouvaient plus financer aussi facilement) en diminuant leur demande intérieur (donc réduire les importations).

Cependant, l'austérité apparait comme nocive. Comme le rappelle R.Krugman, « il est plus facile de reculer l'heure d'une heure (dévaluation), que de demander à tout le monde devenir une heure à l'avance (accepter des baisses de salaires). » En effet, la dévaluation interne suppose une flexibilité remarquable du marché du travail et de l'ajustement des « prix » (des salaires) à la baisse. Or, dans la plupart des pays européens (sauf l'Irlande), les salaires sont plutôt rigides, c'est-à-dire qu'ils baissent difficilement. (cf graphique ci-dessous).

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En revanche, la dévaluation à l'avantage de réaliser l'ajustement de manière quasi-instantanée.

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Aloïs Navarro est étudiant en Master de Droit et d'Economie, passionné par les questions monétaires et notamment l'euro. Il est également trésorier du collectif Marianne.

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