Bonne nouvelle pour les voyageurs, qui pourront en profiter une fois la pandémie de Covid-19 passée et les voyages à nouveau autorisés… et mauvaise nouvelle pour les compagnies aériennes qui risquent, dans les mois et années à venir, de faire face à des grèves sur fond de réduction des coûts ou licenciements massifs. La grève n’est pas une circonstance extraordinaire, a tranché la CJUE.
La compagnie SAS ne voulait pas rembourser le billet
Tout a commencé bien avant la crise : en 2019. Lorsqu’une grève a éclaté au sein des pilotes de la compagnie scandinave SAS, ces derniers réclamant de meilleures conditions de travail et, notamment, une augmentation salariale, des dizaines de vols avaient été annulés. La grève aura même duré une semaine, perturbant le trafic aérien du transporteur des jours durant.
Or, ces vols annulés n’avaient pas conduit au remboursement : SAS estimait que la grève pouvait être considérée « circonstance extraordinaire », l’une des raisons qui permettent aux compagnies de ne pas offrir de remboursement. C’est le cas, par exemple, lorsqu’un volcan entre en éruption et que les avions sont cloués au sol car les faire décoller est trop dangereux.
Mais SAS n’avait pas compté sur un passager qui, estimant être dans son droit concernant le remboursement de son billet, a porté l’affaire devant les tribunaux.
Le passager avait raison : la grève des pilotes ouvre la voie au remboursement
Saisie dans cette affaire par le tribunal de première instance de Sollentuna en Suède, la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) s’est penchée sur la question. Ce qui posait problème au tribunal est que la grève des pilotes qui a causé l’annulation du vol était annoncée et organisée dans les règles. La compagnie aurait donc pu anticiper.
La CJUE a rappelé, dans son verdict du 23 mars 2021, que « la notion de « circonstance extraordinaire », prévue par le règlement sur les droits des passagers aériens, désigne des événements qui remplissent deux conditions cumulatives, dont le respect doit faire l’objet d’une appréciation au cas par cas, à savoir, d’une part, ne pas être inhérents, par leur nature ou leur origine, à l’exercice normal de l’activité d’un transporteur aérien et, d’autre part, échapper à la maîtrise effective de celui-ci ».
Or, selon la CJUE, la grève en question ayant été organisée comme il se doit et étant liée aux conditions de travail, le transporteur ne peut invoquer la clause de circonstance extraordinaire : « selon la Cour, ne relève pas de la notion de « circonstance extraordinaire », au sens du règlement sur les droits des passagers aériens, une grève du personnel d’un transporteur aérien effectif liée à des revendications afférentes aux relations de travail entre ledit transporteur et son personnel, susceptibles d’être traitées dans le cadre du dialogue social interne à l’entreprise, incluant la négociation salariale. »
La compagnie SAS, comme toutes les autres compagnies aériennes si la même situation se produit, doit donc rembourser les billets des vols annulés à cause d’une grève qui est lancée par ses propres salariés.