Pourquoi il faut sauver l’euro ?

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Par Cécile Ernst Modifié le 26 juin 2012 à 1h48

La monnaie unique a fêté ses 10 ans d’existence le 1er janvier 2009. Dans la plus discrétion, voire dans l’indifférence générale.

C’est que comme beaucoup d’Européens, les Français étaient à l’époque assez perplexes sur les bienfaits de la monnaie unique.

On leur avait vanté une harmonisation des prix et une suppression des commissions de change favorables au consommateur et à la croissance.

Or dix ans plus tard, le compte n’y était pas et, pire, l’harmonisation des prix touchait le travail entrainant une mise en concurrence des travailleurs européens. Le fameux syndrome du « plombier polonais » …

De quoi rejeter la monnaie unique par un vote négatif sur la Constitution européenne en 2005.

Depuis l’Euro est présenté parfois comme la source de tous nos maux, chômage, inflation, perte de compétitivité etc …

Et face à la crise de la dette, certains n’ont cessé de prédire l’éclatement de la zone Euro qui permettrait à chaque Etat de retrouver sa souveraineté monétaire, de jouer de la dévaluation compétitive pour relancer ses exportations et desserrer l’étau de la contrainte extérieure.

Et pourtant, acculés à un plan d’austérité sans précédent, séduits par la gauche contestataire, en pointe du mouvement des Indignés, les Grecs ont fini par voter pour le maintien dans la zone Euro. A contrecœur certes mais sans ambiguïté ….

Comment expliquer cette issue après des mois d’émeutes, de protestation, de désespoir face à l’effondrement des salaires, de l’emploi et du pouvoir d’achat ?

Parce que les Grecs ont fini par comprendre que leur sort serait bien pire hors de la zone Euro. Et avec eux faut-il l’espérer, bon nombre d’Européens

Il faut sauver l’Euro d’abord parce qu’il oblige nos gouvernements à un minimum de rigueur dans la gestion des finances publiques. C’est parce que nous avons cru pouvoir nous affranchir de cette discipline que nous connaissons aujourd’hui la crise de la dette et de l’Euro et non l’inverse.

Ensuite parce que l’Euro bien géré nous épargne ces fameuses dévaluations compétitives à répétition qu’ont connues la France, l’Italie ou l’Angleterre des années 70 – 80, qui se traduisaient systématiquement par une baisse du cours de change et donc du pouvoir d’achat du Franc. En 1989, 1 Dollar valait 10 Francs, soit 1,60 Euro. Alors qu’aujourd’hui il n’en vaut que la moitié …

De plus l’Euro s’est imposée comme une monnaie internationale aux côtés du Dollar : plus de 20 % des réserves de change des Banques centrales étaient en Euros en 2009, une cinquantaine de pays du pourtour méditerranéen et de l’Europe centrale et orientale ont adopté l’Euro comme monnaie de référence ce qui favorise nos exportations.

Enfin il faut sauver l’Euro car il est une étape vers cette « Union dans la diversité » d’une Europe qui ne veut plus se laisser aller aux vieux démons qui l’ont menée à deux guerres mondiales fatales à la démocratie, de l’Oural à Gibraltar. La préservation de notre modèle social ancré dans une certaine « conception de la personne humaine et de ses droits fondamentaux » ne peut s’accomplir sans une puissance économique capable de rivaliser avec la Chine, l’Inde ou le Brésil, ces économies – continents en pleine expansion.

Ce n’est qu’à cette condition que l’Europe pourra réaliser cette ambition affichée dans le préambule de sa Constitution « de demeurer un espace privilégié de l’espérance humaine ».


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Cécile Ernst est professeur agrégée de sciences économiques et sociales, diplômée de Sciences-Po Paris et de l’Université Paris IX-Dauphine.

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