80 km/h : 349 vies sauvées en 20 mois, victoire en demi-teinte et quelques doutes

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Modifié le 21 juillet 2020 à 11h15
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52%52% des Français sont toujours opposés aux 80 km/h.

Marie Gautier-Melleray, nouvelle déléguée interministérielle à la Sécurité Routière du gouvernement Castex, a eu l’opportunité de dévoiler les résultats des deux ans de passage aux 80 km/h sur les routes secondaires. Elle annonce ainsi, en grande pompe, une victoire : 349 vies auraient été sauvées. Mais les résultats sont à prendre avec des pincettes.

349 vies sauvées en 20 mois : on est loin du compte

Réalisée par le Centre d’études et d’expertises sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), l’étude de l’impact sur la sécurité routière du passage à 80 km/h sur les routes secondaires devait durer deux ans. Mais, logiquement, elle s’est arrêtée au final en février 2020, le confinement ayant modifié sensiblement la mobilité des Français. L’étude ne porte donc que sur 20 mois.

Dans cette analyse, le Cerema annonce que 125 vies ont été sauvées sur le réseau concerné (donc hors autoroutes et hors agglomération) au deuxième semestre 2018 et 130 au deuxième semestre 2019 par rapport à la moyenne des morts aux deuxièmes semestres 2013-2017, 76 vies sauvées au 1er semestre 2019 (par rapport à la moyenne des 1er semestres 2013-2017) et 18 vies sauvées en janvier-février 2020 (par rapport à la moyenne des deux mois 2013-2017). Au total, donc, 349 vies sauvées.

C’est clairement une bonne nouvelle… mais elle est loin de ce qu’avait annoncé le gouvernement en 2018 pour justifier la mesure. Ce dernier prévoyait entre 300 et 400 vies sauvées par an, ce qui n’aura été le cas qu’en deux ans.

La vitesse comme seule raison de la baisse des morts ?

Mais ce qui étonne dans les résultats dévoilés par la déléguée interministérielle à la Sécurité Routière est que ces vies semblent avoir été sauvées exclusivement par la baisse de la vitesse. Or, ce n’est probablement pas le cas : en deux ans, les Français ont sans aucun doute changé de voiture : plus de 2 millions de véhicules particuliers neufs ont été vendus en 2018 et en 2019. Plus de 4 millions en deux ans, donc, sur un parc automobile de 32 millions de véhicules particuliers. Autant de nouveaux modèles qui répondent à des règles de sécurité plus strictes et qui, de fait, réduisent le risque de mortalité en cas d’accident. Plus de 10% du parc a donc été changé, sans compter les achats d'occasion.

Car le Cerema le signale : la baisse de 10 km/h sur les routes secondaires n’a pas eu d’impact sur le nombre d’accidents corporels en France. Seule la gravité de ces accidents a baissé ce qui fait que « le nombre de personnes tuées rapporté au nombre d’accidents sur le réseau considéré » a baissé de 10%.

Si on ne peut nier qu’une vitesse inférieure réduise le risque de mortalité en cas d’accident de la route, la vitesse étant la première cause de la mortalité sur les routes de France selon la Sécurité routière, il est difficile de ne pas penser qu’une partie de cette baisse de la mortalité est liée également aux nouvelles règles de sécurité des véhicules. Les 80 km/h ont donc bien sauvé des vies, mais peut-être pas autant que ce que prétend le gouvernement.

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Paolo Garoscio

Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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