StopCovid : pauvres, vieux et enfants sous bracelet électronique ?

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Modifié le 5 mai 2020 à 11h06
Forfait Mobile Smartphone
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70%Seulement 70% des Français ont un smartphone.

L’application StopCovid, dont le développement est en cours non sans de nombreuses polémiques, se heurte à un problème de taille : la fracture numérique. C’est un peu le problème quand on veut utiliser une technologie de pointe, le smartphone et le Bluetooth, pour tracker la population. Mais Cédric O, secrétaire d’Etat au numérique, a une solution : le bracelet électronique !

Seulement 70% de la population a un smartphone

Le principe de StopCovid, l’application de « contact tracing » qu’est en train de développer, non sans mal, le gouvernement, se base sur la technologie Bluetooth. Activée par défaut et en arrière-plan sur le smartphone de celles et ceux qui accepteront de l’utiliser, car le gouvernement tient, liberté individuelle oblige, à ce qu’elle soit installée sur la base du volontariat, elle permet d’identifier les interactions sociales. L’idée est assez simple : grâce au Bluetooth, les smartphones communiquent entre eux et il est donc possible de savoir avec quels appareils un smartphone donné a été en contact.

Mais le projet part du principe que les personnes qui interagissent entre elles ont un smartphone (en supposant qu’elles aient installé l’application). Or, en France, on estime à 70% le taux de pénétration des smartphones : cela signifie que 30% de la population n’en a pas. De quoi rendre StopCovid bien moins efficace.

Cédric O, dans un billet publié sur Medium, explique donc la solution que le gouvernement est en train de préparer : « pour ceux ne possédant pas de smartphone, une partie de l’équipe est dédiée à essayer de trouver une autre solution — par exemple, un boitier ou un bracelet qui permettraient de se passer des téléphones. »

Mais qui n’a pas de smartphone en France ? Les enfants, les pauvres et les vieux…

Le problème avec ce système de « boîtier » ou de « bracelet électronique » est… qu’il va stigmatiser des populations. Selon les données de Statista, en effet, on ne compte que 62% des 60-69 ans et que 44% des 70 ans et plus qui détiennent un smartphone. Les vieux seront donc sous bracelet électronique. En comparaison, chez les 18-39 ans la pénétration du smartphone est de plus de 95%.

Quand on regarde en termes de revenus, c’est la même chose : alors que les hauts revenus sont 85% à avoir un smartphone, seuls 72% des Français ayant des bas revenus en ont un. Niveau de diplôme ? Idem : 87% des diplômés du supérieur ont un smartphone contre seulement 46% des personnes sans diplôme.

Et il faut bien évidemment ajouter à ces populations, les enfants : en-dessous de dix ans, ils n’ont généralement pas de smartphone : l’âge moyen d’obtention du premier smartphone se situe, en 2019, à 11 ans.

Fracture numérique et stigmatisation…

Le principe du bracelet électronique pose donc de nombreux problèmes : si une personne qui n’a pas de smartphone, que ce soit par choix ou parce qu’elle ne peut pas se le permettre, veut utiliser StopCovid… elle risque de devoir s’afficher auprès de ses amis et de ses connaissances.

Une véritable stigmatisation, surtout chez les plus jeunes : il est facile d’imaginer un collégien ou un lycéen qui serait moqué à cause de son bracelet parce que papa et maman ne peuvent pas lui acheter un smartphone, alors que son voisin de banc dispose du dernier modèle à plus de 1.000 euros. Et n’espérez pas que, chez les adultes, des situations similaires ne se produisent pas…

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Paolo Garoscio

Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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