Stress au travail : la pertinence d’une prise en charge globale

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Par Catherine Aliotta Modifié le 10 juillet 2016 à 10h00
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12 %12 % de la population active française seraient concernés par l'épuisement professionel.

Une prise en charge efficace du stress dans la sphère professionnelle relève autant de stratégies individuelles que collectives.

Le stress au travail fait aujourd’hui partie des difficultés communes à de nombreux pays européens. Si la moitié des salariés européens se disent aujourd’hui stressés dans leur vie professionnelle (Source : Agence Européenne pour la Sécurité et la Santé au Travail), la réalité recouvre des situations disparates dont il est difficile de délimiter les contours de manière précise. Le concept même de burn-out reste à lui seul difficile à évaluer. L’Institut National de la Veille Sanitaire (INVS) estime que 30 000 personnes sont à risque de burn-out par exemple, tandis que le cabinet Technologia, spécialisé dans la prévention des risques sociaux, considère dans une étude que 3,2 millions de personnes (soit 12% de la population active) sont potentiellement concernées par l’épuisement professionnel.

Le stress est problématique lorsqu’il devient chronique

Traverser une période de stress de temps à autre n’est pas forcément problématique en soi. L’organisme recèle d’étonnantes capacités d’adaptation et peut absorber une pression supplémentaire, à condition que celle-ci soit occasionnelle et limitée dans le temps. En revanche, c’est bien le caractère répété et chronique sur la durée qui rend le stress pathogène.

Surcharge de travail, manque de clarté, exigences contradictoires, pénurie de moyens pour accomplir les tâches requises, précarité et insécurité de l’emploi font partie des facteurs le plus souvent incriminés comme générateurs de stress. Par ailleurs, la période de crise économique que nous connaissons entraîne un climat de tension dans l’entreprise, génère un sentiment d’insécurité et se traduit par le besoin impérieux d’être encore plus compétitif pour pouvoir faire face. Le télétravail et la place croissante qu’ont pris les nouvelles technologies dans nos vies ont décloisonné la sphère privée et la sphère professionnelle. Ainsi, près de 55% des cadres travaillent le week-end et 30% d’entre eux pendant les vacances. (Source : Cadreo). Si toutes les catégories socioprofessionnelles sont aujourd’hui concernées, notons que le stress n’aura pas les mêmes conséquences chez le salarié qui peut prendre le temps de se remettre en forme en posant des congés que chez l’entrepreneur soumis à une pression économique et financière beaucoup plus impactante sur sa vie.

Assumer sa part de responsabilité personnelle face au stress

S’il est facile de jeter l’opprobre sur les managers, chacun se doit de réfléchir et d’assumer sa part de responsabilité face au stress. Le salarié peut en effet se mettre aussi la pression tout seul et adopter des comportements néfastes à son équilibre. C’est le cas lorsqu’il ne s’octroie jamais de temps de décompression et qu’il surinvestit sa vie professionnelle au détriment des autres sphères (loisirs, amis, famille, vie affective et sociale). Un besoin excessif de reconnaissance dirigé vers l’entreprise (qui rappelons-le, n’est pas là pour combler ce besoin) peut à lui seul créer un cercle vicieux en amenant la personne à en faire trop pour espérer une hypothétique reconnaissance. Combien de salariés quittent leur bureau tardivement dans l’espoir de voir leur investissement professionnel récompensé par leur hiérarchie ? Savoir repérer ses propres limites et sa vulnérabilité face au stress permet de mettre en place des comportements plus adaptés et respectueux d’un équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Une réflexion menée avec l’aide d’un coach ou d’un thérapeute sur son propre rapport au travail s’avère donc souvent salutaire.

Agir au niveau organisationnel

Si l’acceptation d’une part de responsabilité individuelle est nécessaire, elle n’est cependant pas suffisante pour permettre d’enrayer le stress généré par une organisation défaillante. En effet, un salarié aura beau mettre en place des stratégies efficaces pour gérer son stress, s’il se heurte régulièrement à des problématiques managerielles et organisationnelles inflexibles, il sera vite confronté à des limites. Par ailleurs, agir seul de manière autonome peut aussi contribuer à masquer les dysfonctionnements d’une structure. Offrir un espace de parole dans un cadre collectif permet de faire émerger des situations partagés par d’autres collègues et de trouver des solutions collectives à même de faire évoluer la structure (apprendre à gérer les priorités, agir pour retrouver de bonnes conditions de travail…). Organiser une journée annuelle dédiée au bien-être ou offrir des espaces de décompression au sein de l’entreprise (salle de sport, baby-foot…) sont des initiatives louables qui ne seront pas pour autant suffisantes pour changer en profondeur le mode de fonctionnement d’une organisation. Une réflexion de la politique globale doit donc également être envisagée. C’est le rôle de la médecine du travail, des DRH mais aussi des syndicats et des structures telles que les CHST (Comités d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail). Si de plus en plus d’entreprises sont sensibilisées aux problèmes liés au stress, il reste encore beaucoup à faire pour transformer en profondeur les modes organisationnels pathogènes d’un grand nombre d’entreprises.

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Catherine Aliotta est Présidente de la Chambre Syndicale de la Sophrologie. Elle est également directrice de l'Institut de Formation à la Sophrologie (Paris) et auteur de plusieurs livres.

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