Un truc que j’aime beaucoup

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Par Bill Bonner Publié le 4 février 2020 à 5h15
Depenses Trump Administration Usa Budget Etat
4,6%En 2019, le déficit américain officiel se montait à 984 Mds$, soit 4,6% du PIB.

Les taux négatifs permettent aux gouvernements de multiplier les dépenses et les déficits ; malheureusement, les dettes doivent être remboursées – généralement par le peuple lui-même.

« On ne sait carrément pas où ça mène, mais on emprunte de l’argent, et quand on doit le rembourser, c’est eux qui vous payent. C’est un truc que j’aime beaucoup. »

– Donald Trump au sujet des taux d’intérêts négatifs

Les nouvelles du moment nous aident à répondre à la question implicite du président américain.

La première vient du Wall Street Journal :

« La dette nationale américaine passera à 98% du PIB d’ici 2030, d’après les prévisions du Congressional Budget Office [NDLR : Commission budgétaire du Congrès US]. »

Les prévisions en question sont-elles crédibles ?

Des déficits, et alors ?

Les ronds-de-cuir imaginent que nous ne connaîtrons ni crise financière ni récession sur la décennie qui vient. Est-ce bien réaliste ?

Même une légère récession réduirait les recettes fiscales du gouvernement US tout en augmentant ses dépenses. Les déficits se creuseraient à mesure que le PIB sombre.

En 2019, le déficit américain officiel se montait à 984 Mds$, soit 4,6% du PIB. L’économie, de son côté, ne s’est développée que de 2,3%, ou 460 Mds$. En d’autres termes, la dette augmente deux fois plus rapidement que le PIB… alors que nous sommes encore en phase d’expansion économique.

Ajoutez une récession et vous arrivez rapidement à une dette totale de 40 000 Mds$… avec une économie de seulement 26 000 Mds$ et un ratio dette/PIB plus proche des 150% que des 100%.

« Qu’est-ce qui ne va pas avec les déficits ? » nous demande un lecteur. Ce qui ne va pas ? C’est que toutes les dettes doivent être remboursées.

Quelqu’un paie – que ce soit le prêteur, l’emprunteur ou le public innocent. « L’inflation », c’est la méthode employée par les plus gros emprunteurs au monde – les autorités – pour s’assurer que ce ne soit pas eux.

Conséquences toxiques

Parallèlement, nous avons lu dans l’Atlanta Journal-Constitution un article sur un nouvel accord commercial :

« Le président Donald Trump a crié victoire lors d’une cérémonie à la Maison Blanche mercredi, après avoir signé une législation formalisant la mise en place d’un nouvel accord commercial impliquant les Etats-Unis, le Mexique et le Canada – qui stimulera la croissance économique américaine sur une bonne partie [des Etats-Unis], selon les prédictions du président [américain]. »

Ces deux sujets d’actualité semblent avoir aussi peu en commun que Donald Trump et Elizabeth Warren, mais tout comme les deux politiciens, elles font partie des conséquences les plus toxiques du système de fausse monnaie.

Les déficits ont pris le mors aux dents parce qu’on les a laissés faire. Les taux bas que Donald Trump apprécie tant ont rendu cela possible. L’impression de fausse monnaie permet aux autorités de dépenser sans augmenter les impôts.

A présent, le gouvernement n’a même plus besoin d’emprunter pour combler les trous. Lorsque les taux repo se sont envolés le 17 septembre 2019, la Réserve fédérale s’est empressée d’imprimer de l’argent. Désormais, elle couvrira les déficits US avec le genre d’argent que les Allemands utilisaient comme papier peint en 1923.

En attendant, d’où vient ce nouvel accord commercial ? Ah… c’est un peu plus compliqué. Mais c’est une histoire qui vaut la peine d’être contée.

Un changement de fond

De 1890 à 1971, les Etats-Unis étaient le plus grand exportateur au monde, sans un seul déficit commercial en 81 ans.

Mais le jour même, ou presque, où l’administration Nixon a réveillé le monstre de la fausse monnaie, ils ont arrêté de fabriquer des choses pour commencer à en consommer – en provenance du reste du monde. Un déficit commercial est apparu en 1971, pour la première fois en 80 ans. Depuis, la balance commerciale US n’a été positive qu’une seule année.

Que s’est-il passé ?

Avant le système de fausse monnaie, les déséquilibres commerciaux étaient réglés en or. Les Etats-Unis, par exemple, ont engrangé de gigantesques quantités d’or tandis qu’ils vendaient des fournitures de guerre à l’Europe durant les Première et Deuxième guerres mondiales. Le Royaume-Uni et la France ont accumulé de gros déficits commerciaux. Les Etats-Unis avaient des surplus.

Après 1971, les pays ne payaient plus en or… de sorte qu’il n’y avait plus de craintes sur les déficits commerciaux.

La Chine engrangeait des dollars en vendant des produits aux Etats-Unis. Avant cela, elle aurait pris les dollars du Trésor US, et les aurait échangés contre de l’or. Cela aurait réduit la masse monétaire américaine… augmentant les taux d’intérêts, ralentissant l’économie et rééquilibrant le commerce.

Mais après 1971, l’inflation de fausse monnaie a déformé ce mécanisme, lui donnant une nouvelle forme perverse. La Chine re-prêtait simplement les dollars aux Etats-Unis (en achetant des bons du Trésor US)… permettant aux Américains d’emprunter et dépenser plus encore.

Soulevez une lampe aux Etats-Unis… retournez une télévision… vous verrez une étiquette Made in China.

Arnaqués par les autorités

Le déficit commercial américain a atteint les 6% du PIB en 2005. Ensuite, alors qu’une quantité croissante de dollars affluait dans ses caisses, la Chine a construit des usines, des villes, des routes, des aéroports – des améliorations d’infrastructures et de capitaux qui l’ont rendu de plus en plus compétitive sur les marchés mondiaux.

Cela s’est révélé être un désastre pour les villes industrielles US et la classe ouvrière. Les vrais emplois à haut salaire ont décliné. Selon Project Syndicate :

« Durant les deux décennies de 1979 à 1999, le nombre d’emplois manufacturiers aux Etats-Unis a décliné, passant de 19 millions à 17 millions. Mais, sur la décennie suivante, entre 1999 et 2009, ce chiffre s’est effondré à 12 millions. »

Les salaires US ont arrêté de croître en 1975. L’homme américain moyen gagne en fait moins aujourd’hui qu’il y a 45 ans.

A mesure que les meilleurs postes disparaissaient, cela grognait de plus en plus dans les régions industrielles.

Les gens savaient que quelque chose n’allait pas. Peu réalisaient qu’ils se faisaient arnaquer par leurs propres autorités et banquiers centraux.

On leur affirmait plutôt que tout était de la faute des « mauvais accords commerciaux ». Ou des Chinois. Ou des Mexicains. Ainsi, la semaine dernière, ils ont applaudi la « victoire » de Donald Trump.

Les Américains ne semblent pas réaliser ce qui se passe – que le vrai problème, c’est l’inflation de fausse monnaie… que l’inflation est partout et toujours une arnaque… et que les arnaqués, c’est eux.

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Fondateur et président d'Agora Inc., une maison d'édition publiant des lettres d'information financières pour les investisseurs particuliers.

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