Le dernier rapport de l’INSEE dresse un constat saisissant. La pauvreté atteint un niveau inédit en France, tandis que les plus aisés consolident leur avance. À quoi tient cette bascule ? Une redistribution brisée, des choix politiques clivants, et un modèle de ruissellement qui n’était qu’un écran de fumée et qui a complètement échoué.
Le taux de pauvreté atteint un record en France, le « ruissellement » était bien un mirage

Le 7 juillet 2025, l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a publié ses chiffres définitifs sur la pauvreté en France en 2023. Le constat est sans appel : la progression est historique. Pour la première fois depuis la création de l’indicateur en 1996, le taux de pauvreté atteint 15,4 %, soit 9,8 millions de personnes vivant avec un revenu inférieur à 1 288 euros par mois. De quoi confirmer que les inégalités se creusent malgré les beaux discours du gouvernement et de la droite.
Plus d’un demi-million de pauvres de plus en France en un an
Dans ce bilan, les inégalités ne se résument pas à des pourcentages froids. Elles découpent la société en deux dynamiques opposées. En 2023, 650 000 personnes supplémentaires sont passées sous le seuil de pauvreté. Le choc est rude, car il affecte d’abord les familles monoparentales – dont le taux de pauvreté a bondi de 2,9 points –, les personnes au chômage, les jeunes de moins de 30 ans, ainsi que les micro-entrepreneurs aux revenus fragmentés.
Le rapport souligne également une corrélation entre les baisses d’aide et l’aggravation de la situation : « Cette hausse s’explique par l'arrêt des aides exceptionnelles, notamment l'indemnité inflation et la prime exceptionnelle de rentrée », détaille Michel Duée, chef du département ressources de l’INSEE relayé par Franceinfo. Ce retrait brutal d’amortisseurs conjoncturels a plongé des milliers de foyers dans une situation critique.
Par contraste, les retraités s’en sortent relativement mieux : leur taux de pauvreté n’a augmenté que de 0,3 point, notamment grâce à la revalorisation du minimum contributif prévue dans la réforme des retraites.
Qui s’enrichit ? Des classes moyennes dynamiques, et des ultra-riches protégés amis de Macron et compagnie
Pendant que certains reculent, d’autres avancent. Le niveau de vie des 10 % les plus riches a continué de croître en 2023, notamment en raison du rendement des produits financiers et de la stabilité du marché de l’emploi qualifié. Les classes moyennes ont, elles aussi, bénéficié d’un regain, ce qui a mécaniquement renforcé la fracture. L’écart entre les déciles extrêmes atteint un nouveau sommet : les plus aisés gagnent 3,49 fois plus que les plus modestes.
Le Monde explique : « Le niveau de vie des plus modestes a augmenté moins rapidement que l'inflation tandis que celui des plus aisés a été dynamique ». Une dynamique asymétrique qui alimente une concentration du patrimoine dans les mains d’une minorité et de quelques milliardaires qui font tout pour éviter de devoir rendre des comptes ou même rendre un peu d’argent.
Le mirage du ruissellement : Macron et les libéraux mentent effrontément
En 2018, Emmanuel Macron justifiait sa réforme de l’impôt sur la fortune par un effet “trickle-down” : faire prospérer les premiers de cordée pour en faire profiter l’ensemble de la société. Six ans plus tard, la promesse semble s’être évaporée. L’étude de l’INSEE ne montre aucune amélioration du sort des plus modestes en lien avec l’enrichissement des plus riches. Au contraire, les inégalités s’amplifient malgré la croissance des patrimoines les plus élevés. Mais le gouvernement refuse d’admettre son erreur : la taxe Zucman, pourtant demandée par le peuple et par plusieurs prix Nobel d’Economie, est systématiquement refusée par la classe politique qui semble décidée à défendre les moins de 2.000 ménages qui devraient la payer si elle était instaurée.
Le constat est dur pour une doctrine libérale qui visait à stimuler l’investissement par des baisses fiscales ciblées. « Le ruissellement ne produit aucun effet visible à court terme », souligne un rapport cité par Le Monde. Pire : il aggrave, par rebond, le sentiment d’abandon et la défiance sociale.
Une pauvreté structurelle en France
Au-delà des 15,4 %, c’est toute une précarité multidimensionnelle qui s’installe. L’INSEE note que 4 % de la population cumule pauvreté monétaire, privation matérielle et faible intensité de travail. Cette combinaison, lourde de conséquences, dépasse le simple manque de revenus pour devenir une exclusion systémique.
L’Observatoire des inégalités observe également un recul de l’égalité des chances, avec un accès à l’éducation, au logement et à la santé plus difficile pour les populations précaires. La fracture territoriale, elle, n’a pas disparu : les départements ruraux et certaines périphéries urbaines enregistrent les progressions les plus fortes du taux de pauvreté.
Lutte contre la pauvreté : des pistes, mais aucun signal de redressement clair
Les chiffres 2023 posent un constat que la classe politique devrait décrier, mais aucune mesure structurelle n’a encore été annoncée à la hauteur du choc social. Le SMIC n’a pas été revalorisé en proportion de l’inflation. Les prestations sociales, elles, n’ont pas connu de coup de pouce significatif. L’automatisation croissante du traitement des dossiers d’aide, ajoutée à la complexité administrative, laisse de côté de nombreux foyers fragiles.
Face à cette impasse, les associations plaident pour un revenu universel d’existence, tandis que des voix politiques appellent à un retour de l’ISF. Mais en l’absence d’orientation politique claire, les tendances 2025 risquent de confirmer un enracinement durable de la pauvreté dans la société française. Et pire : les Français devront composer avec un budget d'austérité probablement inédit depuis plus de 40 ans, qui risque fort d'exacerber la tendance et peser lourd sur les ménages, y compris les plus fragiles.
Pendant ce temps, les milliardaires continuent de cumuler les milliards sans qu’aucun compte ne leur soit demandé.
