Le climat dans le viseur, l’espace en otage. Deux satellites de la NASA, essentiels pour surveiller les gaz à effet de serre, sont sur la sellette de la Maison Blanche. Une décision politique qui soulève l’inquiétude des scientifiques et du Congrès.
Réchauffement climatique : Trump veut éliminer des satellites stratégiques

Cartographier le CO₂ mondial, suivre la croissance des cultures, anticiper les crises alimentaires ou géopolitiques : ces satellites le faisaient. Jusqu’à ce que la Maison-Blanche ordonne leur fin.
Satellites : un coût marginal… pour des données jugées « exceptionnelles »
Le gouvernement Trump a officiellement demandé à la NASA de planifier la fin des missions OCO-2 et OCO-3, deux satellites dédiés à l’observation du dioxyde de carbone (CO₂) et à la surveillance du climat. L’information a été confirmée par plusieurs médias, dont Futurism et NPR.
Ces satellites, conçus pour suivre précisément les émissions de gaz à effet de serre, fournissent également des données sur la photosynthèse et la santé des cultures. Autrement dit, des informations stratégiques utilisées autant par les scientifiques que par les agriculteurs, les compagnies énergétiques ou encore les agences fédérales. Leur suppression pose une question majeure : pourquoi priver les États-Unis d’un outil aussi vital ? « C’est une question de sécurité nationale », affirme David Crisp, ancien responsable des missions OCO.
Le raisonnement budgétaire ne tient pas. En 2023, la NASA avait elle-même recommandé la poursuite des missions pour « au moins trois ans », jugeant que les données recueillies étaient « d'une qualité exceptionnelle ». Le maintien des deux satellites coûte environ 15 millions de dollars par an (soit 13,8 millions d’euros), une goutte d’eau dans le budget total de la NASA, qui s’élève à 25,4 milliards de dollars. « Cela n’a aucun sens économique », tranche David Crisp dans NPR, rappelant que ces missions représentent une fraction infime du budget global.
Les deux appareils, OCO-2 en orbite indépendante, et OCO-3 attaché à la Station spatiale internationale, risquent pourtant d’être détruits. OCO-2 serait désorbité et se consumerait dans l’atmosphère.
Trump et le climat : une hostilité assumée
Cette mesure s’inscrit dans une série de décisions climato-sceptiques du second mandat de Donald Trump, entamé en janvier 2025. L’administration multiplie les coupes dans les programmes scientifiques jugés contraires à ses idées.
Les observatoires OCO sont pourtant les seuls dispositifs fédéraux spécifiquement conçus pour mesurer le CO₂ à l’échelle globale. Selon les scientifiques interrogés par Futurism, leur suppression serait « incompréhensible », car elle revient à saborder des outils uniques pour comprendre les dérèglements climatiques et leurs impacts.
Des propositions alternatives, comme un financement par des universités ou entreprises privées, ont été évoquées, mais inquiètent la communauté scientifique. L’observation terrestre, affirment-ils, ne peut dépendre de logiques commerciales.
Au-delà du choc scientifique, c’est la légalité même de la décision qui est contestée. Les crédits de ces missions ayant déjà été votés pour l’année 2025, l’ordre présidentiel pourrait violer la loi budgétaire. « C’est une décision catastrophique qui pourrait enfreindre la loi », déclare la représentante Zoe Lofgren.
Le Sénat a d’ailleurs proposé un contre-budget maintenant les financements. Le Congrès, à majorité républicain, entend ainsi bloquer ce qu’il qualifie de « coupes dévastatrices ».
En toile de fond, c’est la capacité des États-Unis à rester un acteur majeur de la recherche climatique qui se joue. Pour David Crisp, renoncer aux satellites OCO revient à reculer face aux défis environnementaux : « Ce serait abandonner une partie de notre regard sur la planète. »