Le savoir-faire : la clé de l’industrie européenne

Le monde contemporain évolue à une vitesse vertigineuse, où l’innovation progresse de manière exponentielle. Au cours des cent dernières années, nous avons connu davantage d’innovations que durant les quatre mille années qui les ont précédées. Les conflits en Europe, les crises énergétiques et environnementales accélèrent le changement des modèles de consommation et de production, dictant ainsi les contours de l’innovation de demain.

Adrien Laurentin
Par Adrien Laurentin Publié le 2 mai 2024 à 5h30
industrie, europe, investissement, production, technologie
30%30 % des métiers d'aujourd'hui disparaîtront au cours des dix prochaines années

Parmi tous les secteurs, l'industrie, en tant que source fondamentale des produits qui façonnent notre quotidien, se trouve au premier plan de cette transformation inévitable.

I/ Les compétences à l'ère de l'industrie 4.0 et des enjeux environnementaux

L'industrie 4.0, terme désignant la quatrième révolution industrielle, se caractérise par de nouveaux modes de production au sein des usines. Pour optimiser leurs chaînes de production, les "usines du futur" s'appuient sur des technologies telles que l'intelligence artificielle, la robotique, l'internet des objets, l'impression 3D et le cloud computing. Ces concepts, en constante évolution, sont désormais essentiels pour toute entreprise aspirant à rester compétitive.

Parallèlement, la prise de conscience croissante de nos limites planétaires nous oblige à repenser nos processus de production pour consommer et polluer moins. Par exemple, l'interdiction des voitures diesel en Europe d'ici 2033 nécessite une refonte substantielle des produits et des méthodes de production. Cependant, une étude de la BPI révèle que 75 % des directeurs d'usine en Europe estiment que leurs équipes ne possèdent pas encore les compétences requises pour répondre aux défis des prochaines années. En d'autres termes, notre main-d'œuvre manque actuellement de qualification technique pour s'adapter à ces évolutions.

En outre, l'innovation engendre de nouveaux métiers qui peuvent rendre obsolètes certains emplois actuels. En effet, environ 30 % des métiers d'aujourd'hui disparaîtront au cours des dix prochaines années en raison de ces transformations technologiques. Afin de s'adapter, les industriels doivent d'urgence anticiper ces changements, simplifier et digitaliser le suivi des compétences, et mettre en place des plans de montée en compétences rapide, voire réorienter les individus vers de nouveaux domaines professionnels.

II/ La reprise en main européenne : la nécessité de relocaliser rapidement

La question de la relocalisation industrielle est devenue centrale dans le débat public. La crise du COVID-19 a révélé notre incapacité à produire localement des biens essentiels tels que les masques ou les médicaments, exposant ainsi notre dépendance vis-à-vis de l'étranger. Il y a trente ans, par souci de rentabilité, nous avons délocalisé nos usines à l'étranger, négligeant ainsi la transmission et la préservation de notre savoir-faire industriel.

Pour renverser cette tendance, nous devons être en mesure de répliquer les modèles étrangers sur notre territoire et former un grand nombre de personnes à ces nouvelles méthodes de production. Ceci est réalisable, mais cela nécessite des investissements dans le recrutement, la formation, ainsi que la simplification et la digitalisation des compétences pour permettre à chacun d'acquérir rapidement les aptitudes requises.

III/ Les défis persistants de l'industrie : coûts, pénibilité, turnover, productivité, et départs à la retraite

Le coût élevé du travail en France limite notre compétitivité face aux pays en voie de développement. Pour rester concurrentiels, nous devons nous orienter vers des produits techniquement avancés et de haute qualité tout en maximisant notre productivité.

Cependant, cette dernière dépend en grande partie de nos ressources humaines, où plusieurs défis se présentent :

  • Le turnover et le taux d'absentéisme sont trop élevés, compromettant la cohérence organisationnelle.

  • L'agilité des équipes au sein des usines est faible, et la spécialisation excessive des employés entrave l'efficacité opérationnelle.

  • Le départ à la retraite imminent de nombreux travailleurs expérimentés risque de faire disparaître des savoir-faire essentiels, tandis que les jeunes générations se montrent moins enclines à rejoindre le secteur industriel.

Face à ces défis, il est impératif de repenser nos stratégies de gestion des ressources humaines, en misant sur la formation continue, la polyvalence et la valorisation des métiers industriels, afin de garantir la pérennité et la compétitivité de notre industrie à long terme.

En conclusion, pour prospérer dans ce nouvel environnement industriel, il est crucial de placer l'humain au cœur de nos préoccupations et d'investir massivement dans le développement des compétences et l'adaptation aux évolutions technologiques. Les défis actuels nous offrent également des opportunités de réinventer notre industrie, en la recentrant sur des valeurs durables et en assurant sa relocalisation et sa pérennité sur le territoire européen.

Adrien Laurentin

co-fondateur & CEO chez Mercateam

Suivez-nous sur Google News Economie Matin - Soutenez-nous en nous ajoutant à vos favoris Google Actualités.

Aucun commentaire à «Le savoir-faire : la clé de l’industrie européenne»

Laisser un commentaire

* Champs requis