Shein et Temu pourraient disparaître des moteurs de recherche

La France hausse le ton contre les géants de la fast fashion. En première ligne, Shein et Temu, dont le déréférencement est désormais réclamé à Bruxelles par Paris et les représentants du commerce. Une mesure radicale qui pourrait rebattre les cartes du e-commerce en Europe.

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By Adélaïde Motte Published on 5 septembre 2025 9h20
Shein Temu Pourraient Disparaitre Moteurs Recherche
Shein et Temu pourraient disparaître des moteurs de recherche - © Economie Matin
50 %Plus de 50 % des jeunes de 15 à 25 ans affirment avoir effectué au moins un achat sur Shein ou Temu.

Le 5 septembre 2025, la ministre déléguée au Commerce Olivia Grégoire a officiellement demandé à la Commission européenne de pouvoir déréférencer Shein et Temu. Cette offensive s’inscrit dans un bras de fer avec des plateformes accusées de contourner les règles, d’échapper aux normes et de fragiliser le tissu commercial français. Le gouvernement estime que seule cette solution permettrait de limiter l’impact croissant de ces acteurs du e-commerce.

Pourquoi la France vise Shein et Temu

La France souhaite instaurer un pouvoir de déréférencement au niveau européen. L’objectif est de retirer la visibilité en ligne de Shein et Temu dans les moteurs de recherche ou applications, sans pour autant interdire directement leurs sites. Cette approche, jugée pragmatique, répond à une difficulté majeure : ces plateformes opèrent depuis l’étranger, échappant ainsi à l’application stricte des règles européennes.

Les fédérations du commerce rappellent que Shein et Temu pratiquent une concurrence agressive. Elles sont accusées de ne pas respecter les normes de sécurité, de durabilité et parfois de contourner la TVA. « Nous ne pouvons pas laisser prospérer des acteurs qui contournent les règles européennes », a martelé Olivia Grégoire dans Franceinfo.

Un marché colossal et des pratiques contestées

Le poids de Shein et Temu en France est déjà considérable. Shein revendiquait 1 million de clients actifs en 2024. Plus de 50 % des jeunes de 15 à 25 ans affirment avoir effectué au moins un achat sur Shein ou Temu. Cette pénétration rapide témoigne d’une stratégie ultra-compétitive, combinant prix cassés et campagnes publicitaires massives.

Pour les commerçants traditionnels, la menace est directe. « Ces plateformes représentent une menace directe pour des milliers de commerces de proximité en France », alertent les fédérations. La Fédération du commerce et de la distribution (FCD) estime pour sa part que « le déréférencement est aujourd’hui la seule mesure réellement applicable face à ces géants du e-commerce ».

Shein et Temu, une concurrence impossible à battre

D’après les fédérations du commerce, Shein et Temu faussent la concurrence en cumulant plusieurs avantages structurels : leurs prix très bas reposent sur une production externalisée à faible coût et un modèle logistique optimisé, qui leur permet d’expédier directement depuis l’Asie sans supporter les mêmes charges fiscales ni les contraintes réglementaires des enseignes européennes.

De plus, ces plateformes ne garantissent pas toujours le respect de la TVA, des normes environnementales ou de sécurité imposées aux détaillants français, créant un déséquilibre profond. Face à cette stratégie agressive, il devient quasiment impossible de se battre à armes égales, car un magasin implanté en France doit assumer des coûts incomparables liés aux loyers, aux salaires et aux obligations légales, ce qui le place mécaniquement en position défavorable. Or, les différences sont telles, notamment en matières de réglementations sécuritaires et de normes s'appliquant aux produits vendus, que même avec une fiscalité drastiquement diminuée, Shein et Temu continueraient à tenir le haut du pavé.

Le déréférencement, dernier recours face à un vide réglementaire

Le déréférencement n’équivaut pas à un bannissement pur et simple. Il s’agirait plutôt d’empêcher Shein et Temu d’apparaître dans les résultats des moteurs de recherche, limitant ainsi leur visibilité auprès des consommateurs européens. Une telle mesure a déjà été appliquée dans d’autres contextes, notamment pour des sites de paris illégaux ou de contenus jugés dangereux.

Cette piste est jugée incontournable faute de leviers plus rapides. Les représentants du commerce expliquent qu’une régulation classique prendrait des années, alors que Shein et Temu captent déjà une part croissante du marché français. Olivia Grégoire a insisté : « Le déréférencement est une réponse concrète face à des pratiques qui affaiblissent notre économie et nos commerçants », selon Franceinfo.

La Commission européenne, un acteur majeur

La France a officiellement saisi la Commission européenne pour que cette compétence de déréférencement soit reconnue à l’échelle du marché unique. Une telle décision ne peut être prise qu’au niveau européen afin d’éviter un patchwork réglementaire. Bruxelles devra donc examiner si le Digital Services Act, déjà en vigueur, peut servir de base juridique à cette demande. Le procédé vise à réduire l’accessibilité sans interdire totalement l’existence d’un site. Dans le cas de Shein et Temu, l’enjeu serait économique : préserver la concurrence loyale et protéger les règles européennes de durabilité.

Ade Costume Droit

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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