Fraude sociale : les mesures de Vautrin pour récupérer 13 milliards d’euros

Allocations chômage, comptes bancaires à l’étranger, arrêts maladie injustifiés… Une série de mesures attendues cet automne pourrait transformer en profondeur la lutte contre la fraude sociale. Ce projet de loi est porté par la ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin. Mais à quel prix ?

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By Grégoire Hernandez Published on 4 août 2025 8h59
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Fraude sociale : les mesures de Vautrin pour récupérer 13 milliards d’euros - © Economie Matin
9 200 EUROSAujourd’hui, sur 100 000 euros de revenus illégaux, la Sécurité sociale ne peut récupérer que 9 200 euros via la CSG.

« La fraude sociale est une trahison de celles et ceux qui cotisent pour financer notre modèle social », déclare Catherine Vautrin dans Le Parisien. Le chiffre avancé ? 13 milliards d’euros chaque année.

Accès élargi aux données patrimoniales des allocataires

La ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin, entre dans le dur. Alors que le gouvernement s’est engagé à réaliser 43,8 milliards d’euros d’économies en 2026, l’une des premières cibles est toute trouvée : la fraude sociale. Selon les données du Haut Conseil des finances publiques, ce fléau représenterait une perte annuelle de 13 milliards d’euros. Un gouffre que le gouvernement entend colmater dès cet automne, via un projet de loi dont les grandes lignes ont été dévoilées dans Le Parisien le 2 août 2025 par la ministre.
Le calendrier est serré : à la suite du plan annoncé par le Premier ministre François Bayrou le 15 juillet 2025 pour le budget 2026, l’exécutif veut prouver qu’il s’attaque aussi aux abus, pas seulement au porte-monnaie des contribuables. « Sans majorité, je n’ai aucune garantie. Mais tous les parlementaires veulent mettre fin à la fraude », assure la ministre.

Parmi les mesures annoncées, l’accès aux données patrimoniales figure en haut de la pile. L’idée ? Permettre aux caisses de sécurité sociale d’examiner « les propriétés, données bancaires ou assurance vie » des bénéficiaires d’aides pour détecter les revenus non déclarés. Une extension des pouvoirs de contrôle qui vise à « faciliter la détection des multi-fraudeurs », selon Catherine Vautrin.
Ce dispositif vise notamment les aides au retour à l’emploi. Jusqu’ici, les sommes indûment perçues dans ce cadre n’étaient pas toujours recouvrables. « Nous pourrons demander le remboursement de l’intégralité des sommes, ce qui n’était pas possible aujourd’hui », affirme la ministre. En cas de fraude avérée, l’État se réserve même le droit de débiter directement le compte bancaire du fraudeur.

Chômage et arrêts maladie dans le viseur de Vautrin

Le champ de la réforme s’étend au chômage. Vautrin souhaite que l’allocation ne soit plus versée que sur un compte situé en France ou dans l’Union européenne. Une mesure inspirée d’une proposition de Gabriel Attal en 2023. « C’est un peu compliqué de chercher un travail en France quand vous n’y vivez pas ! », lâche la ministre dans Le Parisien.
Les arrêts maladie abusifs ne seront pas épargnés. Le projet prévoit d’introduire une « pénalité » pour ceux qui détournent le système, sur la base d’une proposition de la Caisse nationale d’assurance maladie. Objectif : limiter les arrêts injustifiés, qui fragilisent l’équilibre de l’Assurance maladie.
Enfin, autre signal fort : les personnes condamnées pour trafic de drogue ne pourront plus cumuler revenus illicites et prestations sociales. Exemple frappant : aujourd’hui, sur 100 000 euros de revenus illégaux, la Sécurité sociale ne peut récupérer que 9 200 euros via la CSG (contribution sociale généralisée). Avec un taux révisé à 45 %, ce seront 45 000 euros. « L’argent devra être remboursé », tranche Vautrin.

Le projet de loi ne se limite pas aux particuliers. Deux autres secteurs sont dans le collimateur du ministère : les transports sanitaires et les organismes de formation. Les premiers, qui coûtent 6,7 milliards d’euros par an à la Sécurité sociale, devront s’équiper d’un dispositif de géolocalisation et d’une facturation électronique intégrée. « C’est un élément de transparence nécessaire », affirme la ministre.
Quant aux organismes de formation financés par des fonds publics, ils seront soumis à des contrôles anonymes. Objectif : identifier les structures fictives ou inefficaces. « Nous voulons détecter les formations qui ne donnent pas réellement accès à une formation », explique Vautrin.
Dernier levier évoqué : les entreprises suspectées de travail dissimulé pourraient se voir « bloquer leurs comptes bancaires pendant la période de contrôle » afin d’éviter qu’elles ne se rendent insolvables.
Thierry Breton, ancien commissaire européen, a rappelé sur BFMTV le 3 août 2025 : « Est-ce que ça suffira ? Bien entendu que non. » Mais dans une France contrainte de surveiller chaque euro dépensé, l’enjeu est clair : faire de la lutte contre la fraude sociale un levier de rééquilibrage budgétaire… sans fragiliser l’État-providence.

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Étudiant en école de journalisme. Journaliste chez Économie Matin de 2023 à 2025.

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