Les véhicules autonomes ne relèvent plus de la science-fiction

Les technologies de conduite autonome évoluent constamment et promettent de réduire les accidents de la route.

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Par Horizon Publié le 31 décembre 2022 à 13h57
Vehicule Autonome Europe Technologie
Les véhicules autonomes ne relèvent plus de la science-fiction - © Economie Matin
15%Les voitures autonomes pourraient réduire de 15% le nombre d'accidents.

C’est une journée comme une autre à Hambourg, dans le nord de l'Allemagne. De nombreux véhicules circulent dans les rues et des piétons qui traversent aux carrefours. Pourtant, dans cette effervescence, un véhicule se déplace sans que son conducteur ait les mains sur le volant ou les pieds sur les pédales.

Il ne s’agit pas d’une dangereuse cascade tournée pour un film mais un des derniers tests de la technologie élaborée par le projet L3Pilot, financé par l'Union européenne. Dans le cadre de ce projet, des chercheurs développent et testent l'électronique nécessaire au pilotage des véhicules autonomes sur les voies urbaines et les autoroutes.

Les réalités de la route

« Il est très important de tester les véhicules autonomes en conditions réelles », a déclaré Aria Etemad, coordinateur du projet L3Pilot et chercheur chez le constructeur automobile allemand Volkswagen. « Les faire rouler dans des environnements artificiels n'est pas suffisant. Nous devons évaluer leur capacité à gérer la réalité complexe et chaotique de la route. »

Les véhicules autonomes ont suscité beaucoup d'intérêt ces dernières années. Des entreprises technologiques américaines telles que Google et Uber ont investi des milliards dans la recherche, aspirant à concrétiser une vision proche de la science-fiction dans laquelle des voitures transporteraient des personnes sans conducteur au volant.

La réalisation de ce rêve est toutefois semée d’embûches puisque les voitures autonomes se sont avérées plus complexes à concevoir que prévu. Des drames tragiques ont même été déplorés, comme le décès en 2018 d'une Américaine percutée par un prototype de véhicule autonome Uber.

Malgré tout, dans l'ombre, des chercheurs comme M. Etemad réalisent de réelles avancées. Et, dans les années à venir, nous verrons probablement apparaître sur les routes d'Europe un nombre croissant de véhicules présentant un degré d'autonomie plus élevé.

Cet objectif devrait permettre à l'Union européenne de réduire à zéro le nombre de décès sur les routes d'ici 2050, contre 19 900 l'an dernier. L’année 2021 a été marquée par une augmentation de 6 % des décès par rapport à 2020.

Selon L3Pilot, les accidents de la route diminueraient de près de 15 % si 30 % des véhicules circulant sur les autoroutes étaient équipés de technologies de conduite autonome. Par ailleurs, les voitures autonomes laissent entrevoir la possibilité de réduire à la fois les embouteillages (en optimisant le transport routier) et le stress des conducteurs.

« Nous avons besoin d'un peu plus de temps », a déclaré M. Etemad, qui coordonne désormais un projet européen de suivi nommé Hi-Drive. « Mais à court terme, de plus en plus de voitures seront équipées de la technologie de conduite autonome. »

Passer à la vitesse supérieure

Le processus sera évolutif, avec des niveaux d'automatisation variables selon les modèles de voitures et les phases de développement.

Une classification commune permet de distinguer six niveaux d'autonomie. Le niveau zéro correspond à un véhicule automobile standard sans aucune automatisation, tandis que le niveau cinq équivaut à une automatisation totale, c'est-à-dire à un véhicule capable de se conduire tout seul dans toutes les conditions possibles.

Selon M. Etemad, les niveaux un et deux sont déjà opérationnels, le premier au moyen d’un régulateur de vitesse adaptatif et le second grâce à l’ajout d’une assistance à la gestion des embouteillages.

Certains véhicules existants se dirigent et freinent déjà tout seuls, par exemple dans des conditions de circulation relativement simples, comme sur une autoroute ou dans un embouteillage.

Dans certains cas, les conducteurs peuvent même retirer leurs mains du volant ou leurs pieds des pédales tout en conservant le contrôle final (et en devant être prêts à tout moment à prendre le relais). Les données provenant des capteurs et des caméras qui équipent la voiture sont entrées dans un logiciel qui utilise généralement l'intelligence artificielle pour prendre des décisions de conduite.

Les constructeurs automobiles essaient de faire progresser l'autonomie jusqu'au niveau trois.

« Ce niveau est similaire au niveau deux, mais le conducteur peut s’adonner à d'autres activités », explique M. Etemad. « Il peut par exemple regarder une vidéo. Il ne doit reprendre le contrôle que lorsque le système le lui demande. »

Ressenti des automobilistes

David Ertl, membre du Bureau européen de la Fédération Internationale de l'Automobile (FIA), explique que les automobilistes font part d’un enthousiasme mêlé d’un certain scepticisme à l'égard de cette technologie, ce qui ne fait qu’augmenter les enjeux de la recherche.

« Les avantages pour les automobilistes seraient réels, notamment en termes de sécurité routière », a-t-il ajouté. « Mais ils demeurent sceptiques quant à la sécurité réelle de la conduite autonome. »

Associée aux projets L3Pilot et Hi-Drive, la FIA défend les intérêts des conducteurs.

À terme, la sécurité et la confiance dépendront non seulement de la technologie, mais aussi de la mise à disposition d'informations suffisantes aux conducteurs sur les fonctions automatisées. Un jour prochain, les examens du permis de conduire devront inclure une formation à la conduite autonome, estime M. Ertl.

La transition entre le niveau deux et le niveau trois est une étape majeure. Les systèmes automatisés doivent être suffisamment sûrs pour que les conducteurs puissent porter leur attention sur autre chose.

Les tests réalisés dans le cadre du projet L3Pilot dans sept pays, notamment en Allemagne, en Italie et en Suède, ont impliqué au total 750 personnes qui ont joué le rôle de conducteur supervisant les opérations, ou de passager, a indiqué M. Etemad.

Lors de ces essais, le véhicule circulait en mode autonome. Un conducteur formé était assis au volant et devait prendre le relais en cas de besoin, a-t-il précisé.

Lacunes

Les technologies actuelles de conduite autonome présentent encore un certain nombre de lacunes.

À titre d'exemple, aux abords d’une zone de travaux routiers, une voiture autonome n'a pas su quoi faire et a rendu la main au conducteur. Le programme Hi-Drive cherche actuellement des solutions à différents problèmes de ce type. Il se poursuivra jusqu'à la mi-2025.

« Nous collaborons avec les gestionnaires d'infrastructures pour localiser les travaux routiers et connaître leur nature », a déclaré M. Etemad. « Ces informations sont transmises au véhicule, lequel peut ainsi mieux s'y préparer. »

Ces situations inattendues rencontrées sur la route font partie des principaux obstacles au développement des véhicules à conduite autonome.

« C'est pourquoi de nombreux constructeurs hésitent à mettre ces systèmes sur le marché », a expliqué M. Etemad. « Nous devons imaginer tous les cas de figure qu’un véhicule doit pouvoir gérer. C’est loin d'être évident. »

De plus grandes ambitions

Pour des niveaux d'autonomie encore plus élevés, il faudra encore s’armer de patience.

« Le niveau quatre pourrait arriver sur le marché sous la forme de taxis ou navettes robotisés », a déclaré M. Etemad. « Ces véhicules sont hautement autonomes, mais les vitesses auxquelles ils circulent sont faibles et les lieux dans lesquels ils se déplacent doivent être clairement délimités. Je suis convaincu que nous verrons des véhicules de ce type circuler en zone urbaine d’ici la fin de la décennie. »

Qu'en est-il du cinquième niveau, dans lequel un véhicule est capable de circuler de manière autonome partout, sur les petites routes de campagne, les autoroutes et dans les centres-villes ? S’agirait-il d’une utopie destinée à rester du domaine de la science-fiction ?

C'est ce que pense M. Etemad. Selon lui, les coûts associés seraient prohibitifs dans un avenir proche, tant pour la technologie automobile que pour l'infrastructure nécessaire, comme les capteurs permettant au véhicule de savoir ce qui se passe sur la route.

« Ce serait tout simplement hors de prix », a conclu M. Etemad. « Dans l'état actuel de nos connaissances et de la technologie, nous devrions nous concentrer sur les niveaux 3 et 4, qui recèlent un réel potentiel. »

Les recherches réalisées dans le cadre de cet article ont été financées par l’UE. Ce document a été publié initialement dans Horizon, le magazine de l’UE dédié à la recherche et à l’innovation.    

LA 4e CONFÉRENCE EUROPÉENNE SUR LA CONDUITE CONNECTÉE ET AUTOMATISÉE (EUCAD2023)

La quatrième conférence européenne sur la conduite connectée et automatisée (EUCAD2023) se tiendra à Bruxelles les 3 et 4 mai 2023.

Elle s'inscrit dans le cadre de l'ambition de la Commission européenne de renforcer l'intelligence, la sécurité, la durabilité et la résilience de notre système de transport, en associant l'automatisation et la numérisation aux objectifs climatiques européens.

EUCAD2023 réunira des dirigeants politiques de la Commission européenne et des États membres, ainsi que des représentants européens et internationaux de premier plan de l'industrie, du secteur universitaire et des autorités compétentes en matière de voirie, pour débattre de la capacité de nos sociétés à déployer des solutions de mobilité intelligentes, inclusives et durables.

Plus d’infos

Consultez les liens ci-dessous pour en savoir plus.

L3Pilot

Hi-Drive

Le plan de la Commission européenne pour une mobilité durable, intelligente et abordable

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