Le marché, c’est vous et moi

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Par Stéphane Geyres Publié le 24 février 2013 à 16h50

Le marché a mauvaise presse. De nombreux économistes passent un temps important à tenter de nous expliquer que le marché est imparfait, qu’il a des « déficiences » et que ces déficiences présumées justifieraient la multitude de monopoles, réglementations et autres interventionnisme que le pauvre marché subit de nos jours, chaque jour un peu plus.

On parle, à tort, des « marchés » pour évoquer la Bourse ou la Finance, symboles du Mal, des gains aléatoires, spéculatifs et injustifiés. On dit le marché défaillant, c’est-à-dire par exemple incapable de produire les « biens publics », ou encore, incapable de s’auto-rééquilibrer face à un monopole.

Pourtant, le marché n’est rien de bien mystérieux ni de si exécrable, car le marché n’est rien d’autre que l’expression continue du libre-échange entre tous les individus le constituant. Le marché, c’est vous et moi vendant et achetant à d’autres et ainsi reproduit sur l’ensemble de la planète à chaque instant. Le marché n’est donc qu’un mécanisme, un processus, exprimant les choix libres du monde.

Ludwig von Mises, dans l’Action Humaine au début du chapitre XV, nous fait mieux toucher le marché du doigt : « Le marché est un processus, réalisé par le jeu combiné des actions des divers individus coopérant en division du travail. Les forces qui déterminent l’état – continuellement modifié – du marché sont les jugements de valeur de ces individus et leurs actions telles que les dirigent ces jugements de valeur. […] Il n’y a rien qui ne soit de l’homme, rien de mystique en ce qui concerne le marché. Le déroulement du marché est entièrement produit par des actions humaines. »

Une des grandes critiques faite au marché serait son injustice. Par exemple il ne ferait rien contre les méchants capitalistes ou énormes multinationales qui seraient pourtant autant de renards dans le poulailler, conduisant à une mort certaine les petites entreprises. Mais sur un marché libre, rien n’empêche un consommateur d’acheter auprès du petit, pourvu qu’il y trouve son intérêt. Si un gros perdure, c’est que le marché considère qu’il le mérite, c’est-à-dire qu’un nombre conséquent de libres consommateurs préfèrent le rapport qualité prix du gros à celui du petit. Où est l’injustice ?

Il paraît également que le marché ne permettrait pas l’éclosion des « biens publics ». Par exemple, imaginons une commune sans candélabre, envisageant d’en installer dans une rue. Il est bien possible que les riverains ne tomberont pas tous d’accord pour cofinancer cet éclairage. Pourtant, une fois installé, ils en profiteront tous. Ce paradoxe, connu comme un exemple du phénomène dit du « passager clandestin », serait une preuve de dysfonctionnement du marché et la raison justifiant que la mairie impose les riverains pour financer ce projet de réverbères, devenus « biens publics ».

Mais à y regarder de plus près, le dysfonctionnement est ailleurs. Car il serait logique de considérer que si les riverains ne sont pas prêts à financer, c’est que le projet n’est pas leur priorité ou est trop cher pour la valeur qu’ils en retirent. Si à l’inverse le maire proposait un projet moins cher, il y a peut-être un seuil, plus bas, où les riverains seraient prêts à investir. Le rôle du marché est justement de laisser cet arbitrage se faire. Ce n’est pas parce qu’un maire ou autre élu a une idée qui lui semble bonne qu’elle peut être légitimement imposée aux citoyens. Si le marché la rejette, c’est tout au contraire la preuve que le projet manifeste une mauvaise idée. Personne ne peut juger le marché.

On pourrait même aller plus loin et affirmer que le marché, mécanisme social naturel de sélection des projets ou produits qui apportent ou pas de la valeur aux consommateurs, constitue en fait le meilleur témoin de la « justice sociale ». Si par exemple Google atteint une position de monopole de fait sur le marché de la recherche Internet uniquement comme effet du marché et non comme suite à des jeux de pouvoir politique, alors il n’y a rien d’injuste à ce monopole donné par le marché.

Il y a cependant un bémol fondamental à l’analyse précédente. Elle ne tient que si le marché est « libre », c’est-à-dire s’il est réellement et pleinement l’expression non contrainte des choix de ses acteurs. Il est évident qu’un marché où le choix des acteurs est contraint par une réglementation, ou faussé par des jeux de subventions ou avantages fiscaux, n’est plus l’expression pure du libre choix de ses acteurs. Un marché ainsi contraint correspond hélas à nos conditions actuelles.

Un tel marché contraint n’est bien évidemment plus un marché exprimant une quelconque justice, puisqu’il est biaisé dans un sens ou un autre. On s’aperçoit ainsi que la plupart des critiques qu’on peut légitimement faire au marché que nous connaissons n’expriment pas les défauts du mécanisme de marché libre, mais au contraire manifestent les déficiences d’un marché qui a perdu sa liberté.

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Simple citoyen viscéralement optimiste, consultant informatique, 25 ans d'expérience, bilingue, ayant vécu dans 5 pays sur 3 continents et connu l'aventure de la création d'entreprise - dans un pays ou c'est mal vu et très aléatoire. Libéral convaincu et même libertarien, venu au libéralisme après des années d'errance politique et une grande déception de la droite traditionnelle, de ses présidents de la 5eme république et de la "rupture" de 2007. Autodidacte et curieux, découvre l'école autrichienne d'économie et engloutit les opus magni de Mises, Rothbard et Hoppe en quelques mois, puis découvre le libéralisme en tant que doctrine et modèle social. La lecture de Salin, Ron Paul, Hazlitt, Ayn Rand et même Mandelbrot finit de me convaincre du bien fondé de l'analyse libérale. Commence alors le projet de contribuer à mieux faire connaître et comprendre le libéralisme, pour que nos enfants vivent dans un monde digne d'eux...

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