La douche froide de l’Insee : la croissance à 1,3 % en 2016

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Modifié le 7 octobre 2016 à 6h08
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3,3%Le déficit public risque d'être plus élevé que 3,3 % fin 2016, l'amende de Bruxelles pend au nez de la France.

C'est un véritable coup dur pour le gouvernement à quelques mois de l'élection Présidentielle de 2017 et alors que la loi de Finances 2017 vient d'être présentée : jeudi 6 octobre 2016 l'Insee a fortement réduit son estimation de croissance pour l'année 2016 la faisant chuter en-dessous de la prévision du gouvernement de 1,5 %. L'Insee faisait office d'outsider : c'était la seule institution qui y croyait encore.

L'Insee coupe dans la croissance française et présente même ses excuses

Jusqu'à présent l'Insee était du côté du gouvernement. Si ce dernier n'a jamais remis en doute son objectif de croissance de 1,5 % pour 2016, niveau de croissance sur lequel a été construite la Loi de Finances 2016 qui devrait permettre au déficit public de se réduire, l'Insee tablait même sur 1,6 %. C'était la seule des institutions à y croire : de la Banque de France à Bruxelles en passant par l'OCDE ou le FMI, tous pensaient au contraire que la France n'allait pas atteindre un tel niveau de croissance.

Avec l'Insee de son côté, toutefois, le gouvernement pouvait encore sauver la face et continuer de clamer une croissance à 1,5 %. Désormais, il ne pourra plus. L'Insee a coupé dans la croissance française lui retirant 0,3 % et la faisant donc tomber à 1,3 % pour 2016. L'Institut de statistiques a même présenté ses excuses confirmant qu'il a commis "une erreur d'anticipation supérieure à d'habitude".

La faute aux attentats et aux grèves ? Vraiment ?

Comme pour les chiffres du chômage, particulièrement mauvais au mois d'août 2016, le coupable de cette révision à la baisse de la croissance française est tout trouvé : c'est Daesh. Les attentats de juillet 2016 à Nice couplés aux grèves contre la Loi Travail du début de l'année auraient freiné la croissance française.

L'Insee estime que les grèves ont impacté des secteurs plus vastes et inattendus que ce que l'Institut avait prévu ce qui expliquerait, en partie, la croissance en berne de 2016. En 2015, la croissance n'a été que de 1,2 % donc la reprise est loin d'être là.

Mais ces justifications sont étonnantes : le FMI, l'OCDE et même la Commission Européenne ont toujours clamé, et ce bien avant les grèves et les attentats, que la France n'allait connaître une croissance que de 1,2 % ou 1,3 %. Des estimations rapidement confirmées par la Banque de France mais que le gouvernement de François Hollande a toujours balayées d'un revers de la main. Finalement, ce sont eux qui avaient raison.

Désormais, le gouvernement ne peut plus faire la sourde oreille. En déplacement à Washington lorsque l'Insee a donné ce coup de massue, Michel Sapin, ministre de l'Economie et des Finances, n'a pas osé clamer à nouveau une croissance de 1,5 %. Il a simplement déclaré : "nous serons aux alentours de 1,5 %"... un changement lexical qui en dit long...

La croissance réduite en 2016, qu'en sera-t-il du déficit public pour 2016 et 2017 ?

Les soucis, pour le gouvernement, ne s'arrêtent pas là : il reste la question du déficit public pour 2016 et 2017, un déficit qui doit chuter sous la barre des 3 % d'ici fin 2017 faute de quoi la Commission Européenne va infliger une amende pouvant atteindre 4 milliards d'euros à la France pour non-respect du Pacte de Stabilité. Or, le gouvernement a fondé ses lois de Finances de 2016 et 2017 sur une croissance de 1,5 % les deux années, si ce n'est plus.

Pour 2016, ça semble fichu. Corollaire de cet échec : le déficit public, qui devait baisser à 3,3 %, sera plus élevé. Et ça va compliquer les choses lourdement pour le gouvernement. Car tout va se répéter en 2017.

La Loi de Finances 2017, présentée au début de l'Automne par le gouvernement, se base en effet sur une croissance de 1,5 % en 2017 après une croissance de 1,5 % en 2016 pour permettre au déficit de chuter à 2,7 % à la fin de l'année. La croissance en 2016 sera donc moins élevée, laissant sur le dos de l'Etat un déficit supérieur aux 3,3 % prévus. Les économies devront donc être beaucoup plus importantes qu'annoncé en 2017 (ou les impôts plus élevés) pour que l'objectif du gouvernement soit atteint.

Paolo Garoscio

Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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