Dans la négociation commerciale avec les Etats Unis, jouons avec nos atouts !

Cela ne nous plait pas, mais ayons l’humilité de reconnaître que les Etats Unis viennent de nous donner une leçon de négociation. Tirons-en quelques enseignements.

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By Virginie Saks et Francois Verrecchia Published on 7 août 2025 14h07
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Dans la négociation commerciale avec les Etats Unis, jouons avec nos atouts ! - © Economie Matin
15%Trump impose désormais 15% de droits de douane à l'Union européenne

Leçon de négociation numéro 1 : ne pas promettre ce que l'on a pas. Ou avec précaution. Plus problématique que les 15% de droits de douane, les 600 milliards d'investissement privés promis par la Commission européenne en faveur des Etats Unis et sur lesquels la Commission n'a aucune prise. Une occasion en or pour les Etats Unis d'augmenter les droits de douane dans 2 ans lorsque les 600 milliards ne se seront pas réalisés.

Leçon numéro 2 : avoir (au moins) 2 coups d'avance. Arrêtons de nous focaliser sur ce que nous ne maîtrisons pas et préparons nos entreprises à ce monde géopolitique instable et aux nouvelles frontières commerciales. La globalisation que nous avons connue n'est plus ; c'est l'heure des stratégies de multi-localisation et du made in local. Cela commence par une analyse géographique fine des débouchés, des écosystèmes de production et des risques de dépendance. Certaines de nos entreprises, comme l’ETI Septodont (leader mondial des produits anesthésiques) a réparti ses risques avec 7 usines sur 3 continents et une politique d’ancrage territorial en France comme ailleurs dans le monde. Aujourd'hui les droits de douane, demain la Chine envahit Taiwan ; quel impact pour nos entreprises ? Ne nous y trompons pas ; la réelle guerre commerciale ne se joue pas avec l'Europe mais entre la Chine et les Etats Unis.

Leçon numéro 3 : jouer avec ses atouts. L'Europe rencontre des difficultés structurelles mais elle a des cartes en main. En particulier, son marché intérieur n'est pas négligeable : 450 millions de consommateurs et une commande publique de 2500 milliards d'euros, avec la volonté d'un "Buy European Act" qui amènerait les acheteurs publics européens vers du made in Europe. Rappelons que le Buy American Act de 1933 exige que les produits achetés “avec l'argent du contribuable” soient fabriqués avec un minimum de 55 % de composants américains ; nous sommes à moins de 25% aujourd'hui en France.

Leçon numéro 4 : muscler son jeu. Donald Trump n'est pas notre seul interlocuteur ; les entreprises américaines sont aussi parties prenantes. Lorsque la France implante un data center de Microsoft, elle est tenue d'accepter l'extraterritorialité du droit américain qui permet à Microsoft de communiquer librement les données des citoyens français et de l'administration. Une aberration récemment reprise par le Sénat dans sa commission sur les coûts et les modalités effectifs de la commande publique. Apprenons à négocier des contreparties au plus proche des territoires ; un data center peut contribuer aux politiques locales d'innovation sur le numérique, alimenter les réseaux de chauffage urbain (et donc soutenir le pouvoir d'achat des français), financer des actions de solidarité locales... si on lui demande.

Nous entrons de plain pied dans un mélange des genres dans lequel la géopolitique et l'économie sont intrinsèquement liés ; ce que David Baverez décrit parfaitement dans son ouvrage Bienvenue en économie de guerre. Ne jouons plus les surpris, réagissons !

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Compagnum est un cabinet de conseil et d'étude sur la réindustrialisation cofondé par Virginie Saks et Francois Verrecchia.

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