L’amendement adopté par l’Assemblée nationale dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026, qui transforme l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) en Impôt sur le Patrimoine Improductif (IPI), entend inclure les fonds en euros des contrats d’assurance vie.
IFI + IPI = 0 – L’IPI est un non-sens économique

L’ipi est un non-sens économique, car les fonds euros financent l’Etat (618 milliards d’emprunts publics) et les entreprises (570 milliards en obligations). Déjà mal fondée juridiquement à l’époque de l’ISF, l’assurance vie n’étant pas un actif du patrimoine de l’assuré, cette fois-ci, la démarche, au titre de l’IPI, veut ignorer le contrat lui-même pour atteindre le seul fonds en euros qualifié d’ « improductif » !
La formule marketing cache une imposture intellectuelle et économique : considérer que la fortune, parce qu’elle n’est pas risquée, serait inutile à la collectivité. Rien n’est plus faux. Ce qui est « improductif », c’est cet amendement.
Sans fonds euros, sur qui la France pourrait compter pour financer sa dette ? Sans fonds euros, sur qui nos entreprises pourraient compter pour émettre leurs obligations ?
Plus de 80 % des encours des fonds euros sont ainsi investis dans des obligations souveraines et d’entreprises. Ils assurent aussi la stabilité d’un marché obligataire fragilisé par la hausse des taux longs.
Qualifier les fonds euros d’ « improductifs », c’est nier le rôle stabilisateur de l’épargne longue, celle qui amortit les crises, finance l’Etat, nos entreprises et protège les épargnants contre les aléas de la vie. Taxer de la sorte l’assurance vie pourrait rapporter 4 ou 500 millions mais coûterait 5 à 6 milliards, annuels, de surcoût de la dette publique qui, aussitôt, serait à nouveau dégradée. Par ailleurs, les fonds euros détiennent une part significative d’actions
et financent ainsi le tissu économique. Les idéologies politiques coûtent cher à nos finances publiques.
En poussant ainsi les épargnants à se détourner des fonds euros pour privilégier les unités de compte, l’amendement encourage le transfert du risque financier sur les ménages. Or, les fonds euros constituent le coeur du contrat d’assurance vie. Ils garantissent le capital, protègent contre la volatilité des marchés et justifient la qualification du contrat d’assurance qui implique garantie et mutualisation des risques. Avec ses partenaires, l’Afer est fière d’appartenir à une grande maison de mutualistes de 12 millions d’assurés. Nous saurons faire entendre notre voix. L’amendement contredit frontalement la volonté affichée du gouvernement de protéger les épargnants, notamment les plus âgés, ceux qui détiennent la majorité de ces contrats en euros, pour sécuriser leur retraite, les risques liés à la maladie ou la dépendance. Comment concilier cette taxation avec les discours sur la « réindustrialisation verte », la « stabilité de l’épargne longue » ou le « pacte de confiance » entre l’Etat et les ménages ?
Il ne sert à rien d’afficher une volonté de protection quand on fait voter un funeste amendement d’atteinte à la confiance. Il s’agit là d’une incohérence profonde . D’un côté, on incite les épargnants à constituer une épargne longue et sécurisée ; de l’autre, on taxe comme s’il s’agissait d’un privilège.
Taxer ces fonds euros revient à pénaliser la prudence et à encourager la prise de risque. J’aimerais bien savoir ce que notre régulateur, et notre contrôle prudentiel, pensent d’une telle incohérence.
Quand un Etat taxe la prudence, il décourage l’investissement et prépare d’abord la méfiance, ensuite la défiance.
Sous couvert de « mobilisation de l’épargne vers l’économie réelle », cette disposition, d’apparence technique, marque une profonde rupture de sens et de confiance entre l’Etat et les épargnants dans un climat d’insécurité juridique délétère.
Et maintenant, l’injustice de cet amendement.
Il s’agit d’une injustice fiscale manifeste. Le seuil de déclenchement de 1,3 million d’euros, fixé en 2011 lors de la réforme de l’ISF, n’a jamais été revalorisé. Depuis 14 ans, l’inflation cumulée dépasse 25 % et les prix de l’immobilier ont bondi de plus de 60 %. Ne pas ajuster ce seuil revient à étendre silencieusement l’impôt à de nouveaux foyers, souvent de classe moyenne supérieure, dont la seule « faute » est d’avoir épargné.
Injustice supplémentaire : si le seuil de déclenchement est à 1,3 million d’euros l’impôt s’applique rétroactivement dès 800 000€, créant un effet de seuil inéquitable. C’est là que naît une rupture d’égalité devant l’impôt : deux contribuables séparés de 400 000€ de patrimoine, l’un à 900 000€ et l’autre à 1,3 million ne seront pas soumis au même effort fiscal alors que leur situation économique réelle peut être similaire. Un tel déséquilibre contrevient au principe de légalité, de proportionnalité et d’équité qui fondent la légitimité de tout impôt.
La France n’a pas besoin d’un énième amendement. Le pays a besoin d’exemplarité, de stabilité, de lisibilité et de respect de la stabilité des règles pour que l’intérêt commun recouvre un sens. Une approche fiscale irréfléchie, telle que cet amendement infondé, funeste et partisan, fragilisera un peu plus la France.
